La rationalisation de l’exécutif dans le nouveau constitutionnalisme des États de l’Afrique noire francophone

Cas du Cameroun, Bénin, Tchad et Gabon

DOI : 10.52497/revue-cmh.244

Résumés

Le nouveau constitutionnalisme, né en Afrique noire francophone au lendemain du vent de démocratisation, était porteur d’espoir de la rationalisation d’un exécutif autocratique. Hélas, cet espoir demeure tempéré dans cette partie du continent noir, en général, et au Cameroun, Bénin, Tchad et Gabon, en particulier. La présente réflexion expose, d’une part, de 1990 à 2000, une rationalisation opérationnelle de l’exécutif marquée par la limitation de ses pouvoirs dans le premier cycle du nouveau constitutionnalisme, d’autre part, depuis 2000, une mise en berne de la rationalisation de l’exécutif à travers la résurgence du renforcement desdits pouvoirs dans le second cycle. L’étude débouche sur les mesures à prendre en vue de la mise en place d’un constitutionnalisme adapté aux réalités africaines et de nature à entrainer une réelle normalisation de l’Exécutif ainsi que l’affermissement de l’État de droit.

The new constitutionalism born in black Francophone Africa at the dawn of the new democracy brought hope to the rationalisation of an autocratic Executive. Unfortunately, this hope is undermined. In this part of the continent in general, and in Cameroon, Benin, Chad and Gabon in particular. This present study highlights on a one hand, a rationalisation of the Executive marked by a limitation of its powers in the first phase of the new constitutionalism which runs from 1990-2000. On the other hand, it is concerned with the issue of the rationalisation of the Executive since 2000 through the resurgence of the reinforcement of the said powers. This study presents measures to be taken in view of putting in place a constitutionalism adapted to the African realities and to ensure a real normalisation of the Executive, as well as strengthening the rule if law.

Index

Mots-clés

exécutif, constitutionnalisme, Afrique noire francophone

Keywords

executive, constitutionalism, French speaking Sub-Saharan Africa

Plan

Texte intégral

Introduction

L’une des moissons précieuses qu’on souhaitait récolter en Afrique noire francophone, après le passage du vent de l’Est dédié à la démocratisation, était la rationalisation irrévocable d’un exécutif qui avait les allures d’un pouvoir tout-puissant. Hélas, le nouveau constitutionnalisme mis en place dans cette partie du continent n’a pas réussi à le rationaliser c’est-à-dire à normaliser, limiter et contenir définitivement cet exécutif dans des proportions justes, logiques et aptes à impulser les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit. La rationalisation de l’exécutif renvoie ainsi à la normalisation et à la canalisation de ses prérogatives dans des limites justes et raisonnables.

L’exécutif intègre à la fois le président de la République et le gouvernement1. Il est l’ensemble des organes gouvernementaux et administratifs qui sont non seulement chargés de la mise en œuvre des lois, mais aussi de la définition de la politique de la nation et qui possèdent une prépondérance dans l’initiative législative2. Il découle de cette définition que le pouvoir exécutif a toujours pris en charge les fonctions suprêmes. Cette primauté du pouvoir exécutif3 viendrait, entre autres, du fait qu’il est « le premier pouvoir de l’État, celui dont les autres se sont détachés, mais qui demeure leur souche commune »4. Ce triomphe de l’Exécutif5, qu’on note dans les États de l’Afrique noire francophone en général et au Cameroun, au Bénin, au Tchad et au Gabon en particulier, a tendance à mettre en péril les droits de l’Homme, la démocratie et l’État de droit. La montée en puissance du pouvoir exécutif, à travers le renforcement de ses prérogatives, est devenue un rituel dans le continent noir. Cette liturgie a fini même par entrainer en sa faveur le renforcement de la conception majestueuse du pouvoir qui peut être monocéphale ou bicéphale. Le pouvoir exécutif peut être monocéphale : dans ce sens, le président de la République est chef de l’État et chef du gouvernement. Les cas du Bénin au regard de la Constitution du 11 décembre 19906 et du Tchad en vertu de la Constitution du 4 mai 20187 sont illustratifs. L’Exécutif peut aussi être bicéphale : sous cet angle, il existe un président de la République, chef de l’État, et un Premier ministre, chef du gouvernement. Les cas du Cameroun sur la base de la Constitution du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 20088 et du Gabon sur la base de la Constitution du 26 mars 1991 révisée, entre autres, le 12 janvier 20189 sont significatifs. L’Exécutif, qu’il soit monocéphale ou bicéphale, occupe une place privilégiée dans le nouveau constitutionnalisme.

Le constitutionnalisme renvoie à l’idée de l’encadrement juridique du pouvoir politique comme l’expriment le professeur Louis Favoreu et autres10. Dès lors, l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics sont soumis à des règles établies par le corps social au sens de Rousseau11. Ces règles s’imposent aux organes de l’État, aussi bien dans leurs relations horizontales réciproques12 que dans les relations verticales avec les citoyens13. Le constitutionnalisme est perçu comme « une doctrine fondée sur la défense de la supériorité de la Constitution à l’égard des autres règles de droit en vue d’assurer la limitation du pouvoir politique »14. Il s’agit d’un « mouvement tendant à concevoir la Constitution comme instrument de limitation de l’arbitraire politique »15. Selon Philippe Raynaud, le constitutionnalisme désigne « les régimes politiques qui, grâce à l’établissement d’un contrôle de constitutionnalité exercé par une instance politico-judiciaire “indépendante”, rendent possible la limitation du pouvoir législatif lui‑même en veillant à la conformité des lois à la Constitution et à ses principes généraux, et non pas simplement à la légalité des actions du pouvoir exécutif et de l’administration »16. En tant que théorie du droit, le constitutionnalisme insiste de ce fait sur le rôle et la fonction de la Constitution dans la hiérarchie des normes par rapport à la loi ainsi que sur le contrôle de la constitutionnalité des lois. Cette idée est bien ancrée dans le nouveau constitutionnalisme entendu comme le constitutionnalisme contemporain ou le constitutionnalisme d’aujourd’hui17, tel qu’il se manifeste en Afrique noire francophone depuis le début de la décennie 1990 jusqu’à nos jours, avec l’émergence des juridictions constitutionnelles18 issues de nouvelles Constitutions. Le nouveau constitutionnalisme induit alors deux choses : la première est la limitation du pouvoir, c’est-à-dire la séparation des pouvoirs dans sa conception contemporaine, laquelle postule l’existence d’un juge constitutionnel chargé d’assurer effectivement la soumission du pouvoir politique (exécutif et législatif) à la Constitution et le règne de l’État de droit, en précisant la teneur de la Constitution. La seconde est la garantie des principales libertés.

L’Afrique noire francophone depuis l’avènement du constitutionnalisme des années 1990, dit nouveau constitutionnalisme, a connu deux cycles, vagues ou générations. Le premier cycle de ce constitutionnalisme couvre la décennie 1990 c’est-à-dire 1990-2000. Il est caractérisé par la limitation des pouvoirs de l’Exécutif à travers l’expansion des droits et libertés, l’émergence des contre-pouvoirs, la limitation de mandats présidentiels, le souci de consolidation de la démocratie et de l’affermissement de l’État de droit. Le second cycle a commencé depuis l’an 2000 jusqu’à nos jours. Il est marqué par une remise en cause de certaines valeurs de la démocratie et de l’État de droit. On y note le retour à l’hégémonie des pouvoirs du président de la République, la résurgence dans certains pays de l’illimitation de mandats présidentiels, la prolifération des actes injustifiables de l’Exécutif, bref des manipulations nocives ou intempestives de la Constitution dans l’intérêt du renforcement exagéré des pouvoirs du chef de l’Exécutif. Le nouveau constitutionnalisme employé dans le cadre de la présente étude intègre les deux cycles ou générations.

Le choix des quatre pays dans le cadre de cette étude n’est pas neutre. Le Cameroun, le Tchad et le Gabon ont connu deux cycles ou vagues du constitutionnalisme contemporain enclenché depuis 1990 en Afrique. Le Bénin quant à lui a connu un seul cycle en vertu de sa stabilité constitutionnelle depuis 1990. Le Cameroun et le Gabon ont un Exécutif bicéphale, un mandat présidentiel illimité dans le nombre, un régime politique semi-présidentiel de jure et présidentialiste de facto19. Le Bénin et le Tchad ont un Exécutif monocéphale, un mandat présidentiel limité dans le nombre, un régime politique présidentiel sur le plan théorique et présidentialiste sur le plan pratique. Ainsi, le choix de ces pays semble pertinent pour mieux rendre compte des considérations nouvelles sur l’Exécutif et précisément de la problématique de la rationalisation du pouvoir exécutif dans le constitutionnalisme contemporain.

Sans être un thème vulgaire ou une problématique de premier ordre, la réflexion consacrée à la rationalisation de l’Exécutif reste un sujet digne d’intérêt. Cet intérêt est à la fois scientifique et pratique. Sur le plan scientifique, les débats sur la rationalisation de l’Exécutif dans le nouveau constitutionnalisme demeurent d’actualité et peuvent être renouvelés sous l’angle où les auteurs ne s’intéressent pas ou s’intéressent très peu. Il s’agit d’une contribution nouvelle dirigée vers un champ de recherche encore en friche et qui mérite, à travers cette étude, d’être déblayé. Sur le plan pratique, la présente étude expose et examine les tendances de la rationalisation de l’Exécutif à l’ère du constitutionnalisme contemporain.

Comment se décline la rationalisation de l’Exécutif dans le nouveau constitutionnalisme des États de l’Afrique noire francophone en général et au Cameroun, Bénin, Tchad et Gabon en particulier ? La réponse à cette question autorise de mettre en exergue l’espoir mitigé qui entoure la rationalisation de ce pouvoir dans cette zone. Pour mieux aborder cette recherche, un recours sera fait à la dogmatique20 et à la casuistique21. Ces deux méthodes seront complétées par un appel au droit comparé22. Notre approche sera ainsi juridique. À cette approche, il faudra adjoindre les techniques de recherches23 qui se présentent sur deux points à savoir la technique documentaire24 et celle axée sur l’enquête25. La conjugaison de ces considérations méthodologiques permet d’exposer dans une analyse minutieuse la trajectoire de la rationalisation du pouvoir exécutif dans le constitutionnalisme contemporain. Il s’agit concrètement dans la présente réflexion de mettre en exergue la période de gloire de cette rationalisation ainsi que son affaiblissement issu entre temps des mutations de certaines dispositions constitutionnelles. Ainsi, à l’examen du nouveau constitutionnalisme en Afrique noire francophone, il convient de noter, d’une part, de 1990 à 2000, une rationalisation opérationnelle de l’Exécutif marquée par la limitation de ses pouvoirs (I), d’autre part, depuis l’an 2000, une mise en berne de la rationalisation de l’Exécutif à travers la résurgence du renforcement desdits pouvoirs (II).

I. De 1990 à 2000, une rationalisation opérationnelle de l’exécutif 

Le premier cycle du nouveau constitutionnalisme en Afrique noire francophone, en général, et au Cameroun, Bénin, Tchad et Gabon, en particulier, est marqué par une limitation des pouvoirs de l’exécutif. On comprend dès lors que ces pouvoirs, bien qu’immenses26, ne sont pas absolus. L’exécutif dans le constitutionnalisme contemporain reste encadré et contrôlé. Le but recherché est de parvenir à sa rationalisation. Cette dernière passe par les actions des contre-pouvoirs qui ont une influence sur l’exécutif (A) et par la limitation de mandats présidentiels (B).

A. L’influence des contre-pouvoirs sur l’exécutif

Le contre-pouvoir « est un pouvoir qui se veut contre un autre, c’est-à-dire en face-à-face, et partage de la légitimité d’un champ, d’une fonction ou d’une idée »27. L’objectif des contre-pouvoirs est de limiter l’exercice abusif des prérogatives de l’exécutif, en tant que pouvoir hégémonique, car, « tout homme qui dispose du pouvoir est tenté d’en abuser » et « pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir », écrivait Montesquieu28. Il s’agit à travers les contre‑pouvoirs institutionnels (1) et non institutionnels (2) de rationaliser l’exécutif, c’est-à-dire de le contrôler et de veiller à ce qu’il tempère son hégémonie à travers sa soumission à la règle de droit.

1. Le contrôle des contre-pouvoirs institutionnels sur l’exécutif

La démocratie ne peut véritablement exister en l’absence de contre-pouvoirs capables de limiter la toute‑puissance des pouvoirs et notamment du pouvoir exécutif. C’est dans cette perspective que des contre-pouvoirs institutionnels29 ont vu le jour dans le souci d’aboutir à un exécutif rationalisé et au rééquilibrage des rapports entre cet exécutif et les autres pouvoirs30. Ainsi, dans la démocratie constitutionnelle, tout pouvoir appelle un contre-pouvoir chargé de le contrôler en vue de le modérer. Généralement animés par l’idée des « checks and balances », la caractéristique des contre-pouvoirs est celle du « containment ». La mission des contre-pouvoirs est double : d’une part, contrôler et sanctionner les excès du « pouvoir d’en face », car, tout pouvoir est potentiellement dominant ; d’autre part, garantir l’équilibre général du système par des réajustements spontanés ou provoqués entre les pouvoirs. À l’analyse des Constitutions des États africains francophones, deux contre-pouvoirs ont été institués dans le souci de limiter la toute-puissance du pouvoir exécutif et le soumettre aux exigences de la règle de droit. Il s’agit du contre-pouvoir politique et du contre-pouvoir juridictionnel.

Parlant du contre-pouvoir politique, il convient de relever que son existence permet d’assurer le fonctionnement des institutions démocratiques. L’opposition parlementaire à ce sujet joue un rôle fondamental, car ses actions sont de nature à entrainer l’équilibre des pouvoirs. Olivier Duhamel et Yves Meny définissent l’opposition parlementaire comme « les partis ou groupements politiques qui, au sein du parlement, sont en désaccord avec le gouvernement »31. Le parlement, contrepoids de l’exécutif, contrôle l’action gouvernementale à travers l’interpellation, les questions écrites et orales, les pétitions et les commissions parlementaires d’enquête32. La rénovation de la mission de contrôle de l’action gouvernementale permet au parlement d’affirmer sa capacité à s’identifier non pas seulement en un véritable pouvoir, un pouvoir libre et indépendant, mais aussi en un pertinent contre-pouvoir à l’égard de l’exécutif. Cette fonction de contrôle prend deux aspects : le contrôle sans engagement de responsabilité33, d’une part, le contrôle avec possibilité d’engagement de responsabilité34, d’autre part. Dans les démocraties modernes, le véritable objectif du contrôle parlementaire n’est pas de créer des ennuis au gouvernement, mais de surveiller les administrations et d’obliger l’exécutif à en corriger les erreurs35. À ce stade, l’opposition parlementaire devient indispensable comme en témoigne l’affaire de l’ex-ministre camerounais des Postes et Télécommunications Mounchipou Seidou déclenchée au Cameroun en 1999 par l’opposition parlementaire et plus précisément par les députés du Social Democratic Front (SDF)36.

On comprend dès lors que l’opposition parlementaire37 joue deux fonctions capitales : d’une part, en assurant une mission de contre-pouvoir dans les Chambres, elle permet d’éviter la toute-puissance de la majorité pouvant conduire à des atteintes au droit des minorités. D’autre part, elle permet le pluralisme politique et favorise la possibilité d’une alternance indispensable en démocratie. Sous cet angle, l’opposition politique devient « un attribut nécessaire de la démocratie »38, qui permet d’assurer la légitimité du système dans son ensemble. C’est donc à juste raison que le constituant sénégalais dès le préambule de la Constitution reconnaît l’opposition comme « un pilier fondamental de la démocratie et un rouage indispensable au bon fonctionnement du mécanisme démocratique »39. De ce point de vue, il est très difficile d’envisager un État démocratique en l’absence d’une véritable opposition susceptible de remplacer la majorité. Ce dernier point représente le talon d’Achille du constitutionnalisme africain. Les actions de contestation, de dénonciation, de boycotte et de contrôle engagées dans les assemblées parlementaires par les partis de l’opposition comme le Social Democratic Front (SDF) au Cameroun, l’alliance Parti national pour la Démocratie et le Développement (PNDD) – Parti du Renouveau démocratique (PRD) au Bénin, l’Union Nationale pour la Démocratie et le Renouveau (UNDR) ou l’Union pour le Renouveau et la Démocratie (URD) au Tchad, le Rassemblement national des Bûcherons (RNB) ou encore le Parti Gabonais du Progrès (PGP) au Gabon, illustrent au cours de la décennie 90 la place incontestable de l’opposition dans la rationalisation de l’exécutif et la construction de la démocratie.

Mais, cette opposition, au regard de ses missions, était perçue par les gouvernants comme « une hérésie par rapport aux valeurs politiquement correctes du moment »40 et un danger qu’il faille tenir loin du pouvoir politique. Les stratégies faites au Cameroun, au Bénin, au Tchad et au Gabon visant à déstabiliser les partis de l’opposition et les maintenir dans un état d’inféodation en constituent une preuve.

En dépit de tout, on ne doit pas nier le rôle important joué par le parlement, surtout l’opposition parlementaire, dans la rationalisation de l’exécutif au cours du premier cycle du nouveau constitutionnalisme en Afrique noire francophone. À travers sa mission de contrôle, de dénonciation et de contestation, cette opposition parlementaire s’est affirmée comme un véritable contre-pouvoir de l’exécutif. Dans le souci d’une efficacité accrue de leurs missions, les parlementaires, en général, notamment ceux de l’opposition, en particulier, « doivent bénéficier de prérogatives supplémentaires pour être en mesure d’œuvrer de concert avec la majorité gouvernementale, ainsi que de contrôler l’action du gouvernement et de la critiquer si besoin »41. Ainsi donc, les démocraties africaines désireuses de consolider leur pluralisme devraient définir explicitement les droits de l’opposition dans les Constitutions. Mais, quoi qu’il en soit, l’affirmation de la nécessité d’une opposition parlementaire ne suffit pas pour normaliser efficacement l’exécutif. Il faut y associer les contre-pouvoirs juridictionnels.

Comme les contre-pouvoirs politiques, les contre-pouvoirs juridictionnels, encore appelés contre‑pouvoirs juridiques, peuvent être définis comme l’ensemble des institutions disposant d’une autorité de la chose jugée. Il s’agit, non seulement du pouvoir judiciaire, mais aussi, des juridictions constitutionnelles. La justice, en tant qu’institution, est aujourd’hui considérée dans son ensemble comme le dernier rempart de protection des citoyens contre l’administration en Afrique noire francophone. Cette justice doit tenir le pari de disqualifier l’arbitraire des gouvernants et d’assurer corrélativement la protection juridictionnelle des citoyens. L’enracinement de l’organe et l’essor de son rôle sont devenus incontestables dans le paysage juridictionnel africain. Dans le principe, l’intervention du juge (judiciaire, administratif ou constitutionnel) vise à soumettre l’administration et plus précisément les membres du pouvoir exécutif au respect de la règle de droit qui régit l’exercice du pouvoir, à contenir les privilèges dans les limites que leur assigne la norme juridique et à permettre aux administrés, soit de paralyser une activité administrative irrégulière, soit d’obtenir une certaine compensation pour les préjudices qu’elle a pu leur causer. C’est ce qui explique la condamnation récurrente de l’administration relevant du pouvoir exécutif au cours de la décennie 90 tant au Cameroun, au Bénin, au Tchad qu’au Gabon42.

Puisque le pouvoir principal s’incarne en la personne du président de la République, le principe des contre‑pouvoirs exercé par la juridiction judiciaire, administrative et surtout constitutionnelle est de modérer l’influence de celui-ci, qu’il s’agisse d’interroger ou, si nécessaire, de contrer ses décisions quand celles-ci sont jugées mauvaises. En Afrique noire francophone, on a assisté régulièrement à l’annulation de nombreux actes de l’exécutif, parce que non conformes à la règle de droit ou peu respectueux des droits de l’homme43. De tous les juges susévoqués, la place accordée au juge constitutionnel dans le nouveau constitutionnalisme est capitale. Cela ne devrait en être autrement, car, « l’idée de justice constitutionnelle est intimement liée au développement du constitutionnalisme entendu comme un mouvement tendant à soumettre le fonctionnement des pouvoirs publics à un ensemble des règles établies »44. Si les contre-pouvoirs, à l’instar des juridictions constitutionnelles, disparaissent ou s’affaiblissent, alors le pouvoir principal s’en trouve omnipotent. Les contre-pouvoirs exercés par les juridictions constitutionnelles en Afrique devraient en principe consister en une atténuation de la toute‑puissance présidentielle. Ils doivent mettre fin à l’arbitraire et à l’hégémonie présidentielle. C’est dans cette perspective que le juge constitutionnel est considéré comme la figure centrale de la démocratie et de l’État de droit. À ce titre, il est appelé à contribuer, d’une part, à la préservation du principe de la séparation des pouvoirs et, d’autre part, à l’équilibre desdits pouvoirs. À partir de là, « la démocratie constitutionnelle peut être présentée comme un espace d’articulation des pouvoirs et des contre-pouvoirs »45.

Dans tous les cas, l’efficacité du contre-pouvoir juridictionnel reste tributaire de la manière par laquelle les décisions du juge s’imposent à l’égard de tous et de manière absolue lorsqu’elles sont définitives. Cette efficacité devient le baromètre de la légitimité fonctionnelle de ce juge. Le cas béninois est illustratif. Dans ce pays, le juge se comporte, structurellement, comme un véritable contre-pouvoir : il modère, freine, empêche les pouvoirs, tout en participant, réécrivant ou modifiant le sens de la norme. Sous cet angle, la Cour constitutionnelle béninoise semble s’affirmer en « co-auteur de la constitution » voire en « co-constituant décomplexé » selon les termes du Professeur Alain Ondoua46. La Constitution béninoise, en consacrant l’existence d’une véritable Cour constitutionnelle47 dont l’audace jurisprudentielle est appréciable48 et en consacrant l’existence d’un incontestable pouvoir judiciaire composé de la Cour suprême, des Cours d’appel et des Tribunaux49 et dont l’article 125 précise l’indépendance, va tout à fait dans le sens de la construction d’un contre-pouvoir juridictionnel authentique et capable de rationaliser l’exécutif c’est-à-dire de contrôler ses actions et les maintenir dans des proportions justes, raisonnables et conformes aux exigences de la démocratie et de l’État de droit. Le Gabon s’efforce d’affirmer l’audace de son juge constitutionnel qui, à l’instar du juge béninois, peut être saisi par tout citoyen dont les droits ont été violés par les pouvoirs publics. De même, ce juge interprète, réécrit ou modifie le sens de la norme constitutionnelle50.

Il est ainsi loisible de noter que dans le premier cycle du nouveau constitutionnalisme, en dehors des actes de gouvernement au sens strict51 ou des actes qualifiés comme tels52, tous les actes des membres de l’exécutif, y compris les actes du président de la République sont justiciables devant le juge, qu’il soit administratif ou judiciaire et parfois constitutionnel (cas du Bénin et du Gabon). Cette situation contribue sans nul doute à la rationalisation de l’exécutif à travers les contre-pouvoirs juridictionnels puisque tous les actes administratifs entachés d’excès de pouvoir et pris par le chef ou membres de l’exécutif étaient susceptibles de recours juridictionnels en annulation et/ou en indemnisation. À cette période, les actes du président de la République n’étaient pas encore placés dans l’injusticiabilité comme c’est le cas aujourd’hui dans l’immense majorité des États d’Afrique noire francophone à la faveur de nouvelles dispositions constitutionnelles53.

Comme on peut le constater, les contre-pouvoirs institutionnels remplissent une fonction d’adaptation constante et de modération permanente par le contrôle structurel de la frontière des compétences des autres pouvoirs. Malheureusement, ces contre-pouvoirs institutionnels, dans l’immense majorité des États africains et plus précisément au Cameroun, au Gabon, au Tchad et au Bénin, sont neutralisés par le pouvoir exécutif. Cette neutralisation passe par l’immixtion intempestive de l’exécutif dans les domaines législatif et judiciaire. En effet, dans le souci de préserver la suprématie présidentielle, le chef de l’exécutif détient d’importants pouvoirs en matière législative et judiciaire comme il sera démontré dans les lignes à venir54. Au regard de cette situation inconfortable, les contre-pouvoirs institutionnels se trouvent parfois neutralisés et affaiblis. Ce qui explique le recours aux contre-pouvoirs non institutionnels, lesquels exercent aussi le contrôle sur l’exécutif.

2. Le contrôle des contre-pouvoirs non institutionnels sur l’exécutif

Les contre-pouvoirs non institutionnels renvoient dans le cadre de cette étude au tiers pouvoir55 c’est‑à‑dire aux pouvoirs qui s’exercent en dehors du cadre institutionnel. Le tiers pouvoir correspond à un ensemble de structures formelles et indépendantes des institutions dont le principal objectif est de participer à la vie démocratique. Il apparaît dès lors comme « une forme d’expression et d’organisation du peuple contre le pouvoir politique prétendument démocratique »56. En effet, lorsque les décisions sont destinées à l’ensemble de la société et non pas seulement aux institutions, et dans un contexte où l’effectivité des contre-pouvoirs traditionnels (parlement, justice) est affaiblie, il est logique que des contre-pouvoirs non institutionnels censurent les actions des gouvernants pour limiter les excès. De ce point de vue, ces contre-pouvoirs non institutionnels permettent une « expression publique qui est en soi un acte politique »57. Leur existence favorise « le jeu démocratique qui se réduirait au face-à-face gouvernants/gouvernés »58. Ainsi, les groupes d’intérêt sont des composantes des contre-pouvoirs non institutionnels ou du tiers pouvoir. Le tiers pouvoir peut être assimilé ainsi à la notion de société civile c’est-à-dire à « un ensemble d’organisation structurée ayant une activité propre et s’accomplissant dans le cadre des lois et libertés citoyennes »59. C’est parce que la notion de société civile permet de faire un lien entre la limitation du pouvoir exécutif et la démocratisation qu’elle est assimilable à celle de tiers pouvoir qui implique aussi une diversification et une multiplication des expressions de la souveraineté du peuple.

Dans un contexte où les contre-pouvoirs institutionnels (parlement et justice) sont en complicité avec le pouvoir exécutif, on assiste depuis un certain temps en Afrique à une multiplication des revendications d’une citoyenneté qui vise à reconnaître des droits sociaux, économiques ou encore catégoriels60. Ces nouveaux acteurs non institutionnels constituent des groupes de pression. En effet, dans un contexte de présidentialisme paternaliste, la multiplication de ces tiers pouvoirs peut permettre de « tempérer la tyrannie de la majorité »61 et la puissance de l’exécutif. À l’inertie ou à l’inefficacité des contre-pouvoirs institutionnels, répond désormais la mobilisation des tiers pouvoirs dont l’objet n’est pas l’accession au pouvoir d’État, mais sa réorientation sur les objectifs portés par le peuple ou aussi l’alternance à la tête du pouvoir. Sous cet angle, les actions des tiers pouvoirs sont favorables à la standardisation de l’exécutif puisqu’elles visent, entre autres, à limiter les abus ou les excès des gouvernants.

La limitation du pouvoir qui, à cet égard, constitue un enjeu essentiel pour le constitutionnalisme ne saurait réduire son objet aux rapports de force entre pouvoir et contre-pouvoirs institutionnels. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’intervention de nombreux syndicats à l’instar du syndicat national des enseignants du Supérieur au Cameroun, de celui du personnel de la santé ou encore du syndicat des enseignants du secondaire. À côté de cette forme classique de revendication des groupes organisés, s’émerge aussi une nouvelle forme axée sur les revendications populaires dans la rue.

Les revendications populaires, comme contre-pouvoirs, prennent depuis un certain temps de l’ampleur en Afrique et se manifestent dans la rue avec des pancartes portant des messages. De cette manière, en favorisant l’expression publique du plus grand nombre, les tiers pouvoirs veulent représenter les intérêts du peuple ou du moins d’une partie importante de celui-ci avec pour objectif d’influencer les pouvoirs politiques et ainsi contribuer à éviter la tyrannie de la majorité62. La décennie 90 en Afrique noire francophone a été caractérisée par des revendications dont le but était de limiter les excès de pouvoir des dirigeants ainsi que les comportements dictatoriaux. Ces comportements se sont poursuivis au-delà de la décennie 90. Dans ce sens, le soulèvement populaire de février 2008 au Cameroun pouvait bien être considéré comme la révolte d’un peuple opprimé en quête de démocratie et d’affirmation de sa dignité63. Les revendications populaires dans la rue, hier et aujourd’hui, sont la preuve de défense des droits d’un peuple désireux d’intervenir directement dans l’arène politique sans compter sur la représentation traditionnelle. Elles visent à contrôler et limiter les actions de l’exécutif afin d’affermir la démocratie et l’État de droit. En Afrique, continent au sein duquel la démocratie et l’État de droit sont encore à la recherche de leurs repères, les revendications populaires visent, entre autres, à favoriser l’alternance au pouvoir. Dans les pays où le code électoral est taillé à la mesure des intérêts des détenteurs du pouvoir pour les maintenir à vie audit pouvoir, il est parfois pertinent de faire recours à la rue pour obtenir l’alternance. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en Algérie et au Soudan. Dans ces deux pays, le soulèvement du peuple a abouti en avril 2019 à la démission des présidents de la République Abdelaziz Bouteflika de l’Algérie et Omar El-Bechir du Soudan. Mais, dans les États-gendarmes à forte connotation autoritaire, ces revendications populaires sont réprimées énergiquement.

Quoi qu’il en soit, l’émergence des tiers pouvoirs favorise une réhabilitation du gouvernement du peuple sans pour autant oblitérer le régime représentatif, mais en indiquant le danger d’une gouvernance sans le peuple64. À travers leurs actions de contrôle et de revendication, les contre-pouvoirs non institutionnels tempèrent l’hégémonie des gouvernants, incitent la séparation des pouvoirs et participent à la rationalisation de l’exécutif.

Au-delà de tout, les contre-pouvoirs, qu’ils soient politiques, juridiques ou pas, institutionnels ou non institutionnels, ont pour effet de limiter la puissance de l’appareil dirigeant de l’État65. Ils assurent la respiration d’un système démocratique en permettant le contrôle régulier des organes investis. Ils sont donc vitaux pour le bon exercice de la démocratie. Selon le professeur Pierre Avril, les contre-pouvoirs sont la transposition moderne, dans un sens plus complexe, de la séparation des pouvoirs au sens de Montesquieu66. Ils s’incorporent dans un objectif global de limitation des pouvoirs de l’exécutif et conséquemment de sa rationalisation. La limitation de mandats présidentiels s’inscrit dans la même perspective.

B. La limitation de mandats présidentiels

La limitation de mandats est un second volet de la normalisation de l’exécutif. Elle permet d’éviter non seulement la gestion à vie des affaires publiques par une seule personne, mais aussi la possibilité d’exercice héréditaire des fonctions de l’État. Le mandat devient de ce fait un élément important de l’encadrement du pouvoir dans la mesure où il est vu comme le rapport entre le représentant et le représenté67. L’intérêt accordé au mandat devient capital lorsqu’il touche le président de la République. Au regard de la rationalisation de l’exécutif, le mandat présidentiel soulève deux préoccupations : la première est relative à sa limitation quant à la durée (1), la seconde concerne la limitation quant au nombre (2).

1. La limitation de la durée du mandat présidentiel

La durée du mandat présidentiel est le temps légalement reconnu au président de la République après son élection pour exercer ses fonctions. Au Cameroun, par exemple, cette durée est de sept ans68. Au Bénin, elle est de cinq ans69, au Tchad de six ans70 et au Gabon de sept ans71. On comprend ainsi que la durée du mandat présidentiel en Afrique noire francophone varie en fonction des pays. Certains États ont opté pour un mandat de quatre ans72 ou de cinq ans73. D’autres ont adopté un mandat de six ans74 ou de sept ans75. Quelle qu’en soit la durée du mandat instituée, il convient de retenir que la fin du mandat présidentiel permet aux États démocratiques d’organiser les élections libres et transparentes afin de faciliter la circulation des élites au sommet de l’État. Cette alternance est un vecteur de crédibilité démocratique. Pour la faciliter, le constituant nigérien a clairement affirmé qu’« en aucun cas, nul ne peut… proroger le mandat (présidentiel) pour quelque motif que ce soit »76. Il revient ainsi au président de la République sortant l’obligation de déclencher et de bien superviser le processus électoral destiné à cette fin. Le respect du calendrier électoral garantit une rotation des élites gouvernantes. Sous cet angle, la limitation de la durée du mandat présidentiel devient un élément d’encadrement de l’exécutif et de sa standardisation, car, elle permet aux représentés (mandants) de juger la représentation (mandat) de son représentant (mandataire) et de tirer les conséquences. C’est pourquoi la durée du mandat ne doit pas être trop longue. Elle doit être raisonnable pour faciliter le contrôle des actions effectuées au cours d’une période donnée. D’ailleurs, « le pouvoir trop prolongé corrompt plus profondément »77. Cette durée raisonnable adoptée dans la majorité des États est de cinq ans. Ce qui permet d’éviter une dérive oligarchique au pouvoir. Cette attitude liée à la durée raisonnable du mandat favorise l’émergence d’une pensée nouvelle ainsi que la normalisation de l’exécutif.

L’un des atouts de la limitation de la durée du mandat est qu’elle permet aux dirigeants de ne pas avoir trop de temps pour affaiblir l’autorité des autres pouvoirs ou marginaliser leurs adversaires politiques. Cet élément contribue encore à la rationalisation de l’exécutif en ce qu’il permet aux contre-pouvoirs institutionnels et non institutionnels ainsi qu’à l’ensemble des populations de contrôler efficacement les actions de l’Exécutif, de dresser le bilan d’une période précise et de voir s’il y a lieu de renouveler encore ou non la confiance. Ainsi, avec la limitation de la durée de mandats présidentiels, « celui qui obéit devrait avoir espoir qu’il commandera un jour, et celui qui commande devrait se dire que dans un temps court, il aura à obéir »78. Dans cette perspective, les détenteurs du pouvoir exécutif sont donc tenus, lors de l’exercice du mandat en cours, de remplir leurs fonctions de manière convenable, de produire des résultats pour laisser un héritage positif à leur successeur ou pour briguer un autre mandat. À cet effet, ils sont obligés d’agir toujours dans des proportions justes, raisonnables et aptes à impulser les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit, faute de quoi, ils pourraient être sanctionnés en fin de mandat par les électeurs, si les élections sont libres, transparentes et honnêtes. On comprend dès lors que la limitation de la durée de mandats permet de promouvoir l’alternance démocratique. De ce fait, elle favorise la bonne gouvernance. Ce qui est en adéquation avec le maintien de l’exécutif dans des normes standards, car la bonne gouvernance contribue de manière importante à la normalisation des pouvoirs de l’exécutif et plus précisément de son chef. En effet, ayant peur d’être déçu lors de la prochaine élection, le président de la République en exercice est tenu dans un État qui se veut démocratique de limiter ses pouvoirs et de n’agir que dans les proportions que lui confèrent la Constitution et autres textes de la République. Sous cet angle, ses pouvoirs deviennent standardisés et réduits à des éléments justes et logiques. La limitation de mandats dans sa durée contribue ainsi à la rationalisation de l’exécutif. Cela a été démontré en Afrique noire francophone en général et particulièrement au Bénin au cours de la décennie 90 avec le vent de la démocratisation.

Néanmoins, il importe de rappeler que dans certains pays, la durée de mandats présidentiels fait régulièrement l’objet des manipulations constitutionnelles, car, au regard des intérêts en jeu, on peut quitter d’un mandat de quatre ans à celui de six ans ou d’un mandat de cinq ans à celui de sept ans. De même, le respect de l’horloge électorale n’est pas la chose la mieux partagée dans les États de l’Afrique noire francophone. Les chefs d’État au pouvoir frissonnent toujours à la fin de leur mandat et ont tendance dans les États virtuellement démocratiques à proroger ledit mandat pour demeurer au pouvoir79. Le cas du Niger en 2010, sous la présidence de Mamadou Tandja, est illustratif80. C’est pourquoi il est important pour les constituants de prendre des précautions juridiques nécessaires en prescrivant formellement dans la Constitution qu’en aucun cas, un président de la République en exercice ne peut abréger le mandat pour se faire élire81 ou proroger ledit mandat pour quelque raison que ce soit82. Un tel garde-fou juridique contribuerait davantage à la rationalisation de l’exécutif. La limitation du nombre de mandats présidentiels vise le même objectif.

2. La limitation du nombre de mandats présidentiels

La limitation du nombre de mandats présidentiels n’est pas une spécificité africaine. Aux États-Unis, la limitation a été une coutume constitutionnelle pendant plus d’un siècle avant d’être consacrée en 1947 par le 22e amendement de la Constitution. En France, le principe de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels successifs a d’abord été institué en 1848 sous l’influence d’Alexis de Tocqueville, ensuite pratiqué à la faveur de la Constitution d’octobre 194683 et enfin systématisé dans le cadre de la réforme instituant le quinquennat84. En Afrique, les clauses limitatives du nombre de mandats présidentiels sont devenues la pierre angulaire des Chartes constitutionnelles de 1990. Les dirigeants africains, affaiblis par la vague de la démocratisation, ont été contraints d’accepter l’introduction de ces clauses. C’est pourquoi la limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique noire francophone a toujours été considérée dans l’immense majorité des États comme l’une des innovations du nouveau constitutionnalisme des années 199085. Elle s’inscrit en marge de la présidence à vie ou, à tout le moins, de la longévité au pouvoir qui avait été instituée par les régimes politiques à parti unique. La limitation de mandats est salutaire en Afrique au regard du fait que dans ce continent les élections ont été toujours entachées pour l’essentiel de fraudes massives.

L’innovation constitutionnelle tendant à la limitation de mandats a reçu un accueil mitigé : ses détracteurs la décrient et soutiennent qu’elle constitue une négation de la souveraineté populaire en ce qu’elle remet en cause la capacité naturelle du peuple à distinguer le bon grain de l’ivraie, la vertu du vice86. Pour ces détracteurs, cette pratique est antidémocratique puisqu’elle nuit à certains citoyens, bien qu’ayant déjà exercé la fonction présidentielle, d’être encore candidats à une élection alors qu’il revient au peuple souverain de limiter le mandat en votant contre un candidat qu’il juge défaillant ou inapproprié87. Ses défenseurs la célèbrent et pensent qu’elle permet de lutter contre l’anomalie que constitue l’existence des monarques de fait dans les Républiques africaines et facilite l’organisation d’élections politiques crédibles88. Ces élections favorisent le renouvellement régulier de la classe politique c’est‑à‑dire l’alternance démocratique89. Cette alternance est un contrepoids à l’hégémonie présidentielle puisqu’elle déclenche le mécanisme de responsabilisation des dirigeants. Elle contribue de ce fait à la rationalisation des prérogatives présidentielles ainsi qu’à la normalisation des pouvoirs de l’exécutif.

De même, la limitation de mandats promeut le renforcement des capacités parmi les citoyens, favorise le développement des institutions étatiques, facilite la transition pacifique au pouvoir, stimule les détenteurs du pouvoir qui veulent à la fin de leur mandat laisser un bilan positif à se mettre au travail, limite les prérogatives de l’exécutif sur le plan matériel ainsi que temporaire et participe à la rationalisation de ce pouvoir hégémonique. La limitation de mandats peut, de ce fait, être considérée, surtout dans les États où les élections ne sont pas libres, transparentes et honnêtes, comme un vecteur de développement de la démocratie. Sur ce point, le principe de la séparation des pouvoirs, le respect des libertés civiles et politiques, la tenue d’élections libres et transparentes, l’alternance et la consolidation de la paix sociale sont des éléments indicateurs qui, nés de la limitation de mandats, contribuent à la rationalisation de l’exécutif.

À l’examen de certaines Constitutions des États africains, on note que la limitation de mandats présidentiels y figure en place privilégiée. En effet, le mandat présidentiel pour l’instant, et peut-être en attendant d’éventuelles révisions constitutionnelles, est renouvelable une seule fois en Afrique du Sud, au Bénin, au Burundi, au Congo, au Ghana, au Tchad, en Guinée, au Mali, au Niger, en RCA, au Nigéria, en RDC, au Soudan, en Zambie, au Rwanda, en Mauritanie… Ce mandat est renouvelable deux fois aux Seychelles.

Il importe de relever qu’au cours de la décennie 1990, le principe de la limitation du nombre de mandats était à la mode en Afrique noire francophone. La Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 en son article 6 (2) l’avait consacré avant de revenir sur l’illimitation en avril 200890. Ce qui a permis au président Paul Biya d’être réélu en 2011. Le Tchad l’a consacré aussi en 199691, l’a retiré de la Constitution en 2005, ce qui a permis au président Idriss Deby Itno de briguer un autre mandat en 2006. Cette clause vient encore d’être intégrée dans la Constitution tchadienne en 2018. Le Gabon, pour sa part, avait introduit cette clause en 199192 et l’a supprimée en 2003 pour permettre à l’ex-président défunt Omar Bongo de se présenter autant de fois à l’élection présidentielle. Au Bénin, introduite depuis décembre 199093, la limitation de mandats présidentiels reste intacte jusqu’à nos jours grâce à la stabilité constitutionnelle. Ainsi, la limitation du nombre de mandats présidentiels est une donnée du constitutionnalisme contemporain qui vise à limiter et à normaliser les prérogatives politico-administratives concentrées entre les mains du président de la République au mépris de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs. Elle est donc un contrepoids à l’hégémonie présidentielle puisqu’elle permet de réduire les pouvoirs des dirigeants et d’accélérer la démocratie dans les États où la fraude électorale s’est installée. Sous cet angle, la problématique de la limitation du nombre de mandats ne devrait plus être discriminatoire et s’appliquer seulement au président de la République. Elle doit désormais concerner l’ensemble des élus politiques à savoir président de la République, sénateurs, députés à l’Assemblée nationale, président du Conseil régional, maire.

Au-delà de tout, le professeur Chantebout rappelle sans équivoque que, « quelle que soit la stature d’un homme, il est néfaste pour la démocratie qu’il reste au pouvoir trop longtemps et qu’il finisse par s’identifier à l’État aux yeux des citoyens »94. C’est dans cette logique que s’inscrit la théorie de la limitation de mandats. Cette théorie limite les pouvoirs du chef de l’État et favorise la rationalisation de l’exécutif puisqu’elle impose aux dirigeants, du fait de la démocratie qu’elle promeut, les bornes juridiques de leurs prérogatives. Malheureusement, les efforts de normalisation de l’exécutif engagés en Afrique noire francophone ne feront pas long feu, car, dans le second cycle du nouveau constitutionnalisme commencé depuis l’an 2000, on va assister à une mise en berne de cette rationalisation.

II. Depuis l’an 2000, une mise en berne de la rationalisation de l’exécutif

L’examen du second cycle du nouveau constitutionnalisme africain laisse transparaître la résurgence d’un exécutif fort95, placé au-dessus des autres organes de l’État. Malgré l’avènement de ce nouveau constitutionnalisme, on note que les États africains francophones ont continué à développer un régime présidentialiste faisant du chef de l’exécutif presqu’un monarque. À cette allure, la standardisation de l’exécutif devient difficile dans cette seconde vague du constitutionnalisme contemporain. Qu’est-ce qui justifie cette résurgence d’un exécutif fort et comment se manifeste-t-elle ? Cette double interrogation nécessite que soient analysées la justification (A) et l’expression (B) de la mise en berne de la rationalisation de l’exécutif.

A. La justification de la mise en berne

Depuis la décennie 2000 jusqu’à nos jours, on assiste à une nouvelle vague de révision constitutionnelle dans l’immense majorité des États d’Afrique francophone96. C’est cette situation qui a entrainé ce qu’on peut qualifier aujourd’hui de seconde vague du nouveau constitutionnalisme dont la tendance est l’hypertrophie des pouvoirs de l’exécutif. Deux raisons essentielles méritent d’être examinées pour justifier le retour dans certains pays à un exécutif hégémonique et conséquemment à la mise en berne de la rationalisation de ce pouvoir : la difficile adaptation du nouveau constitutionnalisme importé (1) et le souci de la reconstruction d’un État-nation fort (2).

1. La difficile adaptation du nouveau constitutionnalisme importé

Marquée par des mouvements de contestations contre l’autoritarisme, la séquence du constitutionnalisme des transitions démocratiques97 aurait sensiblement actualisé la question de l’importation d’instruments juridiques pour stabiliser nombre de régimes politiques chancelants. La finalité de toute importation juridique est de trouver une compatibilité, voire une cohésion, avec l’ordre juridique récepteur pour aboutir à l’affermissement de l’État de droit et au développement de la nation. Mais, pour que cet objectif soit atteint, le droit importé doit s’acclimater sur le plan local en prenant en compte les réalités de la société. Le nouveau constitutionnalisme africain ne s’est pas soumis à cette exigence. C’est pourquoi le constitutionnalisme pratiqué en Afrique a du mal à s’enraciner, car, au lieu d’être conçu selon les réalités africaines, il a été reçu de l’Occident sans un effort de toilettage aux fins d’adaptation. À la vérité, le premier cycle du néo-constitutionnalisme a connu en Afrique noire francophone la difficile appropriation due à la pénible adaptation du modèle importé. C’est cette posture qui explique dans cette partie du continent les problèmes de l’ordre constitutionnel qu’on ressent à travers les signes inquiétants d’inadéquation entre la norme et la pratique. Ces problèmes sont aussi à l’origine de la remise en cause de la rationalisation de l’exécutif puisqu’ils ont entrainé le renforcement des pouvoirs du président de la République dans la seconde vague du nouveau constitutionnalisme. Le professeur Maurice Kamto observait à propos du constitutionnalisme africain que « l’Afrique est le continent des incertitudes et des espoirs perpétuellement déçus »98. Ce constitutionnalisme importé ou imposé n’a pas pris en compte les valeurs africaines. Pourtant, dans toute société, il existe un certain nombre de valeurs qui, par l’adhésion qu’elles rencontrent, suscitent la cohésion du groupe. Elles peuvent s’attacher à des qualités physiques, intellectuelles ou morales, à la tradition ou à la coutume des membres du groupe, à certains types d’activités, au mode de relations des individus les uns avec les autres, à la mentalité collective, etc.

Une norme, est-elle constitutionnelle, resterait une chimère si elle ne prend pas en compte les valeurs de la société pour laquelle elle est conçue. Le constitutionnalisme occidental ne pouvait ainsi mieux s’épanouir en Afrique noire francophone. Cela peut se comprendre, car, la première génération du nouveau constitutionnalisme a été importée de l’extérieur au lieu d’être construite selon les aspirations des États de l’Afrique noire francophone. Il n’a pas pris en compte la pluralité culturelle qui caractérise la société politique africaine99. Ce quasi-échec du constitutionnalisme importé a entrainé conséquemment la remise en cause de la rationalisation de l’exécutif. Objet d’un transfert et accepté par contrainte, il a eu de la peine à s’enraciner solidement puisqu’il a été obtenu au mépris flagrant du principe « ubi societas, ibi jus ». C’est pourquoi il souffre encore d’une difficile implantation sociologique. Or, en l’absence d’une intériorisation dans la société des principes cardinaux qui soutendent ce constitutionnalisme dans le continent noir, il restera plaqué sur le corps social sans véritable emprise. C’est cette pénible adaptation du premier cycle du nouveau constitutionnalisme qui va entrainer de multiples révisions constitutionnelles en Afrique noire francophone. Ces révisions parfois importunes de la Constitution ont finalement fragilisé les bases du premier cycle du nouveau constitutionnalisme africain et entrainé le second cycle lancé vers les années 2000. Ce second cycle est marqué, entre autres, par la résurgence d’un exécutif hégémonique. Ce qui porte atteinte au principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs. Cette atteinte affecte les contre-pouvoirs institutionnels et affaiblit de ce fait la rationalité de l’exécutif recherchée.

Face à cette situation, le constitutionnalisme africain doit mettre un terme au « déni constitutionnel du tribalisme qui enferme les élites dans une espèce de schizophrénie alors qu’elles ont tout à gagner à prendre en compte la question tribale à bras-le-corps pour mieux la maîtriser »100. Pour le professeur Ahadzi-Nonou, on doit cesser de frapper cette question tribale « d’un véritable ostracisme constitutionnel » et de « l’ignorer juridiquement »101. Ainsi, le constitutionnalisme africain doit reconnaître le caractère multiethnique de la population au lieu de n’évoquer le fait tribal que pour en interdire toute expression formelle102. Ce constitutionnalisme a tout à gagner en incluant une certaine « authenticité » africaine dans sa conception juridique de l’État et de la démocratie. C’est cette défaillance qui a entrainé, entre autres, en Afrique noire francophone le basculement vers le second cycle du nouveau constitutionnalisme. Ce nouveau constitutionnalisme de la seconde vague entend sacrifier certaines valeurs africaines acquises au cours du premier cycle, mais encore en édification telles que la rationalisation de l’exécutif, les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit. En revanche, il entend rendre le pouvoir exécutif hégémonique à l’effet de reconstruire un État et une nation forts.

2. Le souci de reconstruction d’un État-nation fort

L’État-nation est un État qui coïncide avec une nation établie sur un territoire délimité et défini en fonction d’une identité commune de la population qui lui confère sa légitimité. Il se caractérise par une autorité fondée sur une souveraineté émanant de citoyens qui forment une communauté à la fois politique et culturelle ou ethnique. Produit d’une longue histoire commencée aux xiiie-xive siècles en Europe et développée par la révolution française, l’État-nation connaît son apogée après la seconde guerre mondiale lorsque le président américain Wilson impose à l’Europe comme politique de paix le principe selon lequel toute nation dispose du droit de se constituer en État103.

Dès les indépendances, les dirigeants des États africains se sont fixé pour objectif majeur, entre autres, la mise en place d’un État-nation fort avec un chef omnipotent. Cette logique devrait se développer sans souci en Afrique jusqu’au début de la décennie 1990 où elle sera entravée par le vent de la démocratisation. Avec ce vent violent, porteur du nouveau constitutionnalisme, l’État-nation a vu ses racines fragiliser au cours de cette décennie. Étant une personne morale, l’État-nation est incarné par son chef qui est en même temps le chef de l’exécutif. La limitation de ses pouvoirs imposée au cours du premier cycle du nouveau constitutionnalisme, au regard des exigences des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit, a amolli les bases de l’État-nation en Afrique qui, peut-être, n’était pas encore prêt à recevoir un tel bouleversement. En vertu des libertés accordées, le multipartisme refait surface pour favoriser un parlement multicolore, le mandat du président de la République est limité, les actes de l’exécutif sont restreints, contrôlés et davantage justiciables devant le juge, les contre‑pouvoirs institutionnels et non institutionnels s’implantent efficacement, le maintien de l’ordre public devient difficile au regard des revendications sociales. L’unité nationale est menacée. Dans l’ensemble, le constat est clair : en dépit des bienfaits du premier cycle du nouveau constitutionnalisme dans le domaine des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit, il a fragilisé l’État-nation en Afrique noire francophone en le vidant d’une grande partie de ses prérogatives et en exposant ses actes à toute annulation judiciaire. Ainsi, les enjeux des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit n’ont pas été favorables au renforcement des pouvoirs de l’exécutif et partant des bases de l’État-nation. Par conséquent, l’autorité de l’État s’est affaiblie. Il est urgent de la conquérir. C’est pourquoi, les dirigeants africains dans beaucoup de pays comme le Cameroun, le Tchad et le Gabon vont renouer avec les mentalités de l’autoritarisme. Il est question de renforcer les pouvoirs de l’exécutif et conséquemment de l’État-nation qui ont été amoindris par le vent de la démocratie. Cette attitude a pour influence la mise en berne de la normalisation de l’exécutif acquise au cours de la première vague du nouveau constitutionnalisme.

Mais comment concilier dans le cadre normatif et institutionnel le souci de l’édification d’un État-nation fort avec les exigences de la rationalisation de l’exécutif et de l’État de droit ? Tel est l’un des défis que les États africains sont appelés à relever. Dans le souci de l’édification d’un État-nation fort en Afrique, la référence à une analyse réaliste du constitutionnalisme, qui tient compte des réalités sociologiques, religieuses, culturelles, ethniques et économiques, s’est imposée. Cette démarche met en lumière la spécificité des conditions du pouvoir en Afrique, l’existence des éléments propres, de nouveaux éléments d’explication (structure sociale, culture politique, croyance aux valeurs, l’évocation des questions tabou comme l’ethnie, l’autochtonie, etc.). Avec l’évolution de la société africaine, on a abouti à une conception plus réaliste de l’État à savoir l’État-Ethnie. Cette théorie est défendue par les professeurs Ahadzi‑Nonou104, Gonidec105, Rossatanga-Rignault106 et Kpodar107. Le réalisme en cette matière recommande de construire ou de reconstruire l’État-nation avec les matériaux locaux dont on dispose. Il faut donc, comme suggère un auteur, « prendre le parti des ethnies et accepter les États africains tels qu’ils sont, c’est-à-dire avec leurs diversités internes »108. Sous cet angle, il n’est pas prétentieux, ni audacieux, pour les dirigeants africains de modifier la forme de l’État pour l’adapter à la spécificité africaine.

Quelle qu’en soit la forme de l’État adoptée, l’unanimité en Afrique noire francophone en général et particulièrement au Cameroun, au Bénin, au Tchad et au Gabon se forme sur le caractère sacré de l’unité nationale. Il s’agit de l’unité dans la diversité plurielle (ethnie, culture, langues, religions, autochtonie…). Dans ces pays, les gouvernants sont prêts à tout sacrifier au profit de la consolidation de l’unité nationale érigée en principe constitutionnel sacro-saint. Au Cameroun, depuis la naissance de la crise dite anglophone en 2016, la notion de l’unité nationale à travers le slogan le « Cameroun est un et indivisible » est devenue fréquente dans les discours politiques des gouvernants. Cela ne devrait en être autrement, car, le chef de l’État, de par les dispositions constitutionnelles, a été érigé en garant de cette unité en Afrique noire francophone109. Il n’est donc pas étonnant de constater que les principes d’unité, d’intégrité et d’indivisibilité soient devenus une constance du droit constitutionnel contemporain. Sur cette base, la plupart des pays interdisent explicitement ou implicitement la sécession. Elle est considérée comme une atteinte grave à l’unité nationale et à l’intégrité du territoire.

Quoi qu’il en soit, le second cycle du nouveau constitutionnalisme en Afrique noire francophone renoue avec le flux autoritaire incompatible avec la rationalisation de l’exécutif. Cette autorité est incarnée par le pouvoir exécutif et s’exprime de plusieurs manières.

B. L’expression de la mise en berne

L’Afrique noire francophone a été formellement considérée comme une terre fertile du régime semi‑parlementaire pour certains pays et présidentiel pour d’autres. Le premier régime, issu d’un syncrétisme entre le régime présidentiel et le régime parlementaire, a développé sur le plan théorique une influence réciproque entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Le second est marqué par une stricte séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Mais, dans les faits, ces régimes ont été transformés en Afrique noire francophone, malgré l’avènement du nouveau constitutionnalisme, en un présidentialisme à outrance110 mettant en berne la normalisation de l’exécutif. Cette mise en berne se manifeste ou s’exprime par l’hypertrophie des pouvoirs du président de la République (1) et la prolifération des actes injusticiables de l’exécutif (2).

1. L’hypertrophie des pouvoirs du président de la République

Depuis les premiers temps de l’indépendance jusqu’à nos jours, le président de la République en Afrique noire francophone est apparu comme le pivot des constitutions111. Tirant sa légitimité, pour celui qui est légalement élu, du suffrage universel, le chef de l’État en Afrique est la clef de voûte du régime. En effet, décideur, bâtisseur, pierre de fondation des institutions, le président de la République, en un mot, mérite plus que quiconque, au sein des démocraties pluralistes, le titre de « monarque républicain »112. En Afrique, s’il est vrai que pendant longtemps, le système de parti unique avait conféré une tendance au présidentialisme, l’ouverture au multipartisme a permis de mettre en évidence dans une version un peu démocratique le statut du président de la République qui représente l’État aussi bien dans l’ordre interne113 que dans l’ordre international114. Investi par la norme fondamentale du titre de chef de l’État, le président de la République est le gardien de la Constitution115, le garant de l’intégrité territoriale et de l’indépendance nationale, l’arbitre dans le fonctionnement des institutions étatiques. Il jouit en période de crise des prérogatives exceptionnelles pouvant lui permettre de concentrer entre ses mains les principaux pouvoirs publics constitutionnels. C’est ainsi qu’il a le pouvoir de rétablissement du fonctionnement régulier des institutions et la sauvegarde de la nation. Il peut à cet effet décréter l’État d’urgence, l’État d’exception ou encore l’État de siège selon les cas116. On parle, au regard de l’étendue de ses pouvoirs en période de crise, de dictature temporaire du président de la République. Ainsi, en période normale comme en période de crise, la tendance dans la pratique constitutionnelle en Afrique francophone est une réaffirmation de la suprématie du président de la République117. C’est donc à juste raison que l’on pense aujourd’hui que la fonction du président de la République est la plus élevée, la plus prestigieuse et sans doute la plus enviée. C’est ainsi qu’il s’immisce de manière intempestive dans les pouvoirs législatif et judiciaire.

Le président de la République a la mainmise sur le pouvoir législatif. En effet, le pouvoir exécutif dispose dans le domaine législatif le pouvoir d’initiative. Ainsi, dans les États africains, l’initiative de la loi appartient concurremment à l’exécutif et au parlement118. En dehors des projets de loi et du droit d’amendement venant de l’exécutif, on note aussi le pouvoir réglementaire autonome que lui confère la Constitution. Le président de la République peut, à cet effet, légiférer par ordonnance ou par décret dans les domaines bien déterminés. Il détient aussi l’initiative référendaire. De même, l’exécutif intervient dans les débats parlementaires. Cette intervention se manifeste au niveau de la convocation des sessions, de l’élaboration de l’ordre du jour des plénières, de la reconnaissance au président de la République d’un droit de communication119, de la reconnaissance aux membres du gouvernement du droit d’accès et d’audition en plénière et en commission120, de la reconnaissance au président de la République du pouvoir de promulgation des textes votés par le parlement. En outre, le président de la République, dans un régime semi-parlementaire, a le droit de dissolution de l’Assemblée nationale121.

Ces prérogatives se poursuivent dans l’informel, car, pendant longtemps, l’exécutif multiplie des stratégies fines pour mettre l’opposition (parlementaire) hors d’état de nuire. Au Cameroun, au Gabon, au Tchad et au Bénin, l’opposition est malmenée et réduite presqu’à néant. On se souvient avec tristesse que lors des dernières élections législatives du 28 avril 2019 au Bénin, les partis de l’opposition n’y ont pas pris part et ont vu leurs candidatures toutes invalidées. En conséquence, on se retrouve au Bénin pour cette législature débutée en 2019 avec un parlement ayant une seule coloration politique. Ainsi, dans le second cycle du constitutionnalisme, l’opposition qui était forte dans le premier cycle est maîtrisée, neutralisée et réduite à une proportion insignifiante. N’ayant plus les moyens de sa politique, elle est devenue mendiante et affaiblie par le rouleau compresseur des détenteurs du pouvoir. On est ainsi quitté d’une opposition revitalisée à une opposition émasculée pour paraphraser le professeur Théodore Holo122. Ainsi, en dépit de l’article 3 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance de 2007123, qui pose le renforcement du pluralisme politique par la reconnaissance de l’opposition politique comme un moyen de consolidation de la démocratie, tout continue d’être fait dans la pratique pour que la majorité demeure majoritaire et la minorité, minoritaire. Dans ce sens, le premier obstacle pour l’émergence d’une véritable opposition (parlementaire) sur le continent noir est l’absence de transparence lors des opérations électorales. Il faut noter que la « démocratie africaine » se distingue des autres par une persistante mascarade électorale, perpétrée par les gouvernants pour se maintenir au pouvoir. C’est pourquoi on assiste dans certains pays à la remise en cause de la limitation du nombre de mandats présidentiels. Dans cette perspective, des élections sont organisées avec pour objectif de réduire à une portion incongrue les partis ou candidats de l’opposition124.

Comme on le voit, le présidentialisme négro-africain favorise l’hégémonie du président de la République et se caractérise par un déséquilibre des pouvoirs très favorable à l’Exécutif et un affaiblissement corrélatif du pouvoir législatif. Ce déséquilibre limite le contre-pouvoir politique (l’opposition parlementaire) et entraine l’échec de la standardisation de l’Exécutif recherchée. Cette influence de l’Exécutif sur le parlement s’étend aussi sur le pouvoir judiciaire.

Le président de la République a également la mainmise sur le pouvoir judiciaire. En effet, le système judiciaire africain est marqué du sceau de l’autoritarisme absolu du chef de l’État qui est le chef de l’Exécutif. Il est le président du Conseil supérieur de la magistrature. D’ailleurs, c’est lui qui crée les juridictions, détermine leur ressort territorial et modifie ledit ressort par décret suivant les nécessités de service125. C’est encore et toujours lui qui gère la carrière des magistrats en les intégrant dans le corps, en procédant à leur promotion en grade, en les nommant discrétionnairement tantôt au siège tantôt au parquet, en les affectant et en les sanctionnant sur le plan disciplinaire. Au-delà du pouvoir judiciaire, il nomme les membres du Conseil constitutionnel. Cette influence hypothèque l’équilibre des pouvoirs et entraine à travers l’hypertrophie des pouvoirs présidentiels la remise en cause de la rationalisation de l’Exécutif.

À la vérité, dans les États de l’Afrique noire francophone, la séparation des pouvoirs s’assimile à une simple fleur d’ornement, l’idéal étant la sacralisation des pouvoirs du président de la République qui est à la fois le chef de l’Exécutif, le tuteur de fait du parlement et le père adoptif du pouvoir judiciaire. De ce fait, le président de la République devient cette autorité omniprésente et omnipotente, le chef de « l’institution qui englobe et surplombe toutes les institutions sociales »126.

L’examen du nouveau constitutionnalisme dans les États de l’Afrique noire francophone fait apparaître une donnée importante dans l’existence et le fonctionnement du présidentialisme : les grandes responsabilités constitutionnelles du président de la République coïncident avec les grands pouvoirs. C’est ainsi que dans un régime semi - parlementaire, comme au Cameroun et au Gabon, le président de la République est le chef de l’Exécutif avec un Premier ministre, chef du gouvernement, minoré. Dans un régime présidentiel moniste comme au Bénin et au Tchad, il détient seul le pouvoir exécutif puisqu’il est à la fois chef de l’État et chef du gouvernement. Dans tous les cas, l’analyse du nouveau constitutionnalisme africain de la seconde génération laisse transparaître que les Constitutions telles qu’élaborées ont pour but principal de renforcer la position du chef de l’Exécutif de sorte que « sa fonction ne soit pas, selon la tradition rappelée par tous les constitutionnalistes, de limiter le pouvoir par le droit, mais, au contraire, de le fortifier »127. Le professeur Dubouis parle de « dictature constitutionnelle »128. Ce sont ces pouvoirs exacerbés du président de la République conférés sans frein par la Constitution qui expliquent la mise en berne de la normalisation du pouvoir exécutif. Ce qui est curieux c’est qu’avec ce second cycle du nouveau constitutionnalisme, on assiste à la prolifération des actes injusticiables de l’Exécutif.

2. La prolifération des actes injusticiables de l’exécutif

En Afrique noire francophone, de nombreux actes pris par le président de la République sont exempts de tout contrôle juridictionnel. L’accès au prétoire des juges judiciaire, administratif et constitutionnel devient ainsi considérablement restreint à cause de la prolifération des actes injusticiables. Malgré les critiques formulées dans ce domaine, les États africains de culture francophone continuent d’avoir le culte des actes administratifs injusticiables. Le juge administratif camerounais, depuis 1980, l’a affirmé dans plusieurs espèces129. La notion d’acte administratif injusticiable, au fil des ans, va connaître une évolution sensible puisque la loi camerounaise n° 2003/016 du 22 décembre 2003 relative au règlement des litiges portant sur les limites des circonscriptions administratives et des unités de commandement traditionnel va instituer une immunité juridictionnelle partielle touchant les actes y afférents. À cet effet, ces actes réglementaires ne peuvent pas faire l’objet de recours en annulation conformément aux dispositions de l’article 2 de cette loi qui dispose que : « est irrecevable, nonobstant toutes dispositions législatives contraires, tout recours judiciaire en annulation d’un acte pris pour le règlement des litiges portant sur la limite des circonscriptions administratives ». Par contre, ils peuvent faire l’objet d’un recours en indemnisation au regard du libellé de cet article. C’est pourquoi il est préférable de parler d’une immunité partielle.

De même, à tort ou à raison, la Chambre administrative de la Cour suprême du Cameroun a estimé que le décret présidentiel n° 2008/463 du 30 décembre 2008 portant nomination des membres du Conseil électoral d’Élections Cameroon (ELECAM) est un acte de gouvernement insusceptible de recours. En effet, en application de l’article 4 de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs130, la haute instance juridictionnelle a estimé que « le décret querellé nommant les membres du Conseil électoral est une question politique dont la décision appartient exclusivement au président de la République » ; qu’il « s’agit d’un acte… qu’aucune juridiction ne peut connaître et non susceptible de recours et que cet acte échappe par sa nature à tout contrôle juridictionnel… »131.

Concernant particulièrement le président de la République, bien que susceptible d’être traduit devant la Haute Cour de justice pour haute trahison132, il ne peut, dans certains pays comme le Cameroun, le Tchad, le Gabon, le Congo, etc., exception faite au Bénin133, faire l’objet des poursuites devant la juridiction de droit commun. Cette protection du chef de l’État le couvre même à sa retraite présidentielle c’est-à-dire après la cessation de ses fonctions. Le constituant congolais est à cet effet sans équivoque :

Aucune poursuite pour les faits qualifiés crime ou délit ou pour manquement grave à ses devoirs commis à l’occasion de l’exercice de sa fonction ne peut plus être exercée contre le président de la République après la cessation de ses fonctions. La violation des dispositions ci-dessus constitue le crime de forfaiture ou de haute trahison conformément à la loi134.

Pour le constituant gabonais, « le président de la République qui a cessé d’exercer ses fonctions ne peut être mis en cause, poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé pour les faits définis par la loi organique prévue à l’article 81 de la Constitution »135. Selon la Constitution tchadienne du 4 mai 2018, « Le président de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison telle que prévue à l’article 157 »136. De même, au Cameroun, « les actes accomplis par le président de la République en application des articles 5, 8, 9 et 10 (de la Constitution) sont couverts par l’immunité et ne sauraient engager sa responsabilité à l’issue de son mandat »137. Allant dans le même sens, le constituant sénégalais dans le souci de la protection du chef de l’Exécutif dispose que « le président de la République n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison »138. C’est dire qu’en dehors des cas de haute trahison, le président ne répond d’aucun acte bien qu’il soit auteur139. Ces dispositions ont été reprises par les constituants nigérien140, centrafricain141, etc. Elles couvrent d’immunité absolue, totale et perpétuelle, ab initio et ab futuro, les angles entiers des actes du président de la République en dehors de ceux relatifs à la haute trahison.

La soustraction de ces actes de tout contrôle juridictionnel n’est pas un signe protecteur des droits de l’Homme142. De même, elle n’est pas favorable à la consolidation de l’État de droit143 amorcée depuis le retour du nouveau constitutionnalisme africain. Les dispositions susévoquées de la Constitution gabonaise (article 78), tchadienne (article 83), camerounaise (article 53 [3]) et autres posent les fondements abusifs d’actes de gouvernement par prédétermination de la Constitution, démesurés et potentiellement démultipliés144. En conséquence, ces actes de gouvernement « à coup sûr ne se borneraient plus à limiter cette catégorie classique aux antiques actes de l’Exécutif relatifs aux relations entre pouvoirs constitutionnels ou relatifs aux relations internationales »145. La leçon du doyen Louis Favoreu enseignée depuis 1962 n’a pas été saisie par la majorité des systèmes juridiques africains. Pour le professeur, « aucun acte de l’Exécutif ne peut logiquement se voir reconnaître le statut d’acte incontestable, car, quelle que soit l’activité qu’il exerce, l’Exécutif est soumis à la loi, du moins, à la Constitution »146.

Au-delà de tout, on peut noter que le constituant et le législateur africains n’ont pris nullement en compte dans la prolifération des actes administratifs injusticiables les exigences de l’État de droit. La protection des intérêts du président de la République a pris le dessus sur ces exigences, car, la trajectoire juridique tracée par le constituant en ce qui concerne l’immunité des actes présidentiels est inquiétante. Cette immunité vise à renforcer la souveraineté présidentielle. À cette allure, le rôle des contre-pouvoirs devient de ce fait foncièrement affaibli. Conséquemment, la rationalisation de l’Exécutif recherchée dans le nouveau constitutionnalisme se trouve écartelée parce que confrontée à de nombreuses difficultés. Il en est de même du constitutionnalisme qui devient dévalorisé. Le professeur James Mouangue Kobila à propos parle de « reflux du constitutionnalisme »147. Dans tous les cas, les chefs d’État, chefs de l’Exécutif, dans un État de droit, doivent toujours agir conformément à la règle de droit pour se donner « une respectabilité qui leur permet de demeurer au sein du concert des nations dans le club des chefs d’État fréquentables »148.

Conclusion

Dans l’ensemble, on comprend que l’avènement du premier cycle du nouveau constitutionnalisme dans les États de l’Afrique noire francophone s’est efforcé à standardiser l’Exécutif en ramenant ses pouvoirs à des proportions justes et raisonnables telles que le recommandent les canons de la démocratie et de l’État de droit. En dehors du Bénin où ce premier cycle du nouveau constitutionnalisme perdure à la faveur de la stabilité constitutionnelle, la majorité des États d’Afrique noire francophone comme le Cameroun, le Tchad et le Gabon ont modifié leur Constitution pour entraîner un second cycle du nouveau constitutionnalisme. Dans ce second cycle, on a assisté à la résurgence d’un Exécutif omnipotent, mettant en berne la rationalisation recherchée.

Dans tous les cas, le constitutionnalisme africain a besoin du temps pour germer et se perpétuer, encore faut-il qu’il soit dans son temps : il doit être souhaité, vécu et culturellement assimilé149. Autrement dit, il doit être dans l’air du temps et prendre en compte les réalités sociales de l’Afrique noire francophone. C’est à ce prix qu’il fournira toutes ses vertus au profit de la normalisation de l’Exécutif. Cette rationalisation passe, entre autres, par le changement des mentalités des détenteurs du pouvoir exécutif dans la perspective de la limitation de mandats présidentiels150, la réduction et la canalisation des pouvoirs de l’Exécutif au regard des débordements constatés, la soumission régulière de ce pouvoir à la règle de droit, le renforcement des mécanismes de contrôle à travers l’existence de véritables contre‑pouvoirs capables de limiter la toute-puissance de l’Exécutif151 et la sanction en cas de défaillance. En bref, il s’agit de créer des conditions de construction d’un nouvel édifice institutionnel garant de la consolidation de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs ainsi que de l’instauration d’un véritable État de droit. Dans cette entreprise juridique, la Constitution, norme fondamentale de l’État, doit être le fondement du pouvoir et le socle sur lequel repose l’autorité152. La construction de ce constitutionnalisme contemporain dans la perspective de la rationalisation de l’Exécutif doit prendre en compte les réalités africaines comme l’ethnie, la question tribale, la langue, la religion, le degré de développement, les mentalités et surtout la dimension culturelle, car, « au-delà du juridique et du politique, c’est la culture qui est la meilleure garantie de la bonne application des valeurs et des principes »153. Le respect de cette exigence réduit les prérogatives monarchiques et absolues que détient l’Exécutif dans les pays d’Afrique noire francophones et le contraint à agir dans sa sphère de compétence constitutionnelle. En le faisant, les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit se trouvent raffermis.

1 Voir titre II de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 modifiée le 14 avril 2008, titre III de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018

2 Ch. Debbasch et Y. Daudet, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2e éd., 1978, p. 113.

3 Voir à ce sujet, M. Hauriou, Précis de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 2e éd., 1929, pp. 388 et ss.

4 Ibid, p. 388.

5 Notons qu’aujourd’hui, on assiste dans beaucoup d’États à un déclin progressif du pouvoir législatif et du parlement qui l’incarne. Par contre, on

6 Cf. articles 41 et 54 de la Constitution.

7 Cf. article 84 de la Constitution.

8 Cf. articles 5 (1) et 12 (1) de la Constitution.

9 Articles 8 et 29 de la Constitution.

10 L. Favoreu et autres, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2017, p. 59.

11 J-J. Rousseau, Contrat social ou principes du droit politique, Genève, Marc-Michel Bousquet, 1762, pp. 10 et ss.

12 Voir F. Delpere, « Ce que je crois ou le constitutionnalisme », in Présence du droit et des droits de l’homme, Mélanges offerts à Jacques Velu

13 Ibidem.

14 R. Cabrillac (dir.), Dictionnaire du vocabulaire juridique, Paris, Lexis Nexis, 8e éd., 2016, p. 144.

15 O. Beaud, « La Constitution et le droit constitutionnel », in D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF

16 P. Raynaud, « constitutionnalisme », in D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 266.

17 J. L. Seurin et autres, Le constitutionnalisme d’aujourd’hui, Paris, Economica, 1984, pp. 35 et ss.

18 Th. Holo, « Émergence de la justice constitutionnelle », Pouvoirs, 2009, n° 129, pp. 101-114.

19 Lire sur la question G. Conac, « Le présidentialisme en Afrique noire, unité et diversité, essai de typologie », in CEAN, L’évolution récente du

20 La dogmatique permet d’analyser, d’interpréter et de commenter les textes juridiques relatifs à la question traitée.

21 La casuistique, quant à elle, s’analyse en l’étude et commentaire des décisions de justice encore appelées jurisprudence dont l’appréciation

22 Le professeur Roland Drago attirait déjà l’attention du chercheur en droit sur l’importance du recours au droit comparé : « tout juriste est un

23 Selon Madeleine Grawitz, « toute recherche ou application de caractère scientifique en science sociale, comme dans les sciences en général, doit

24 La technique documentaire « consiste en une fouille systématique de tout ce qui est écrit ayant une liaison avec le domaine de recherche » (M. 

25 S’agissant de la technique par enquête, elle permet de recueillir auprès des citoyens et autorités habilitées à mettre le droit en application les

26 A.D. Olinga, « Le pouvoir exécutif dans la Constitution révisée », Lex Lata, février-mars 1996, n° 23-24, pp. 29 et ss.

27 F. Hourquebie, Sur l’émergence du contre-pouvoir juridictionnel sous la Ve République, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 64.

28 C. Montesquieu, De l’esprit des lois, t. I, Paris, Éditions Garnier, 1956, pp. 161 sq.

29 Sur la question, lire F. Hourquebie, « La Constitution du Bénin et la théorie des contre-pouvoirs », in La Constitution béninoise du 11 décembre 

30 La notion de contre-pouvoir se traduit par des interactions réciproques à l’intérieur d’un système concurrentiel au bénéfice de l’équilibre des

31 O. Duhamel, Y. Meny, Dictionnaire de droit constitutionnel, Paris, PUF, mars 1992, p. 677.

32 Cf. articles 35 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 113 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990

33 Le contrôle sans mise en jeu de la responsabilité est consacré dans la Constitution et se réalise au moyen des questions au gouvernement. Par 

34 Le contrôle avec mise en jeu de la responsabilité est la seconde modalité de contrôle qui peut conduire à la sanction à l’encontre du gouvernement

35 B. Chantebout, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 29e éd., 2012, p. 566.

36 Déclenchée par les parlementaires du parti de l’opposition SDF, qui avaient d’ailleurs sollicité la mise en place d’une commission d’enquête

37 P. Jan, « Les oppositions », Pouvoirs, 2004, n° 108, p. 29.

38 G. Schmitz, « L’opposition dans un régime parlementaire », Publication GC, décembre 1988, p. 2. En ligne < www.publication.gc.ca/collection-R/LoP

39 Voir préambule de la Constitution du Sénégal du 22 janvier 2001 révisée le 5 avril 2016.

40 Mbodj El Hadj, « Les garanties et éventuels statuts de l’opposition en Afrique », Symposium international de Bamako, avril 2000, p. 346.

41 Union interparlementaire, « Statut type de l’opposition au parlement », Séminaire parlementaire sur les relations entre partis majoritaires et

42 Lire B.D. Coulibaley, « Le juge administratif, rempart de protection des citoyens contre l’administration en Afrique noire francophone ? »

43 Voir à titre illustratif la Cour constitutionnelle du Bénin, DCC 33-94 du 24 novembre 1994 portant annulation d’un décret du président de la

44 M. Froment, La justice constitutionnelle dans le monde, Paris, Dalloz, 1996, p. 2.

45 F. Hourquebie, « Pouvoir constituant et contre-pouvoir », ATDC, Le pouvoir constituant aujourd’hui, Tunis, 16-17 novembre 2006, p. 4.

46 A. Ondoua, « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? », Rapport de synthèse des travaux, Mélanges en l’honneur

47 Voir articles 114 à 124 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

48 Voir A. Ondoua, « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? », Rapport de synthèse des travaux, Mélanges en l’

49 Voir titre VI de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990 suscitée.

50 En novembre 2018, la Cour constitutionnelle gabonaise a complété certaines dispositions de la Constitution en lieu et place du constituant. Le 

51 La définition d’acte de gouvernement donnée par le Conseil d’État français dans l’affaire Prince Napoléon exclut désormais le mobile politique. Il

52 C’est le cas, par exemple, au Cameroun des actes portant désignation des chefs traditionnels, des actes pris pour le règlement des litiges portant

53 Voir dans la présente étude le 2 du B du II consacré à la prolifération des actes injusticiables.

54 Voir dans la présente étude le 1 du B du II consacré à l’hypertrophie des pouvoirs du président de la République.

55 Sur la notion, voir aussi D. Rousseau, « L’ouverture du droit constitutionnel aux tiers pouvoirs », in C.M. Herrera et S. Pinon (dir.), La

56 F. Borella, Éléments de droit constitutionnel, Paris, Presses de sciences politiques, Références, 2008, p. 310.

57 J-L. La Ville, R. Sainsaulieu, L’Association, Pluriel, 2013, p. 22.

58 B. Nabli, « État de droit et contre-pouvoirs », en ligne : < http://ojiv.org/les-autres-rencontres-de-lojiv/debat-sur-les-libertes-publiques/eta

59 Cf. F. Ly-Fall, « Le nouveau contre-pouvoir au Sénégal : quand le Hip Hop transforme le regard sur la participation citoyenne », in De la

60 F. Borella, « Souveraineté nationale et pluraliste des citoyennetés », Mélanges en l’honneur de Jean Waline, Paris, Dalloz, 2001, p. 16.

61 Ibid. p. 90.

62 B. Pascal définit la tyrannie comme le fait de « (…) vouloir avoir par une voie ce qu’on ne peut avoir que par une autre », in Pensées et

63 G. Mbra Guerandi, « Repenser un modèle de démocratie participative au Cameroun », CJDHR, vol. 2, juin 2008, p. 4.

64 Idem.

65 P. Pactet et F. Melin-Soucramanien, Droit constitutionnel, Paris, Sirey, 28e éd., 2009, p. 14.

66 P. Pierre, « Les contre-pouvoirs institutionnels », Projet, 1980, n° 150, p. 1190.

67 G. Moyen, « L’Exécutif dans le nouveau constitutionnalisme africain : Les cas du Congo, du Bénin et du Togo », Annales de l’Université Marien

68 Voir article 6 alinéa 2 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, version révisée le 14 avril 2008.

69 Cf. article 42 (1) de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

70 Cf. article 66 de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

71 Cf. article 9 alinéa premier (nouveau) de la loi n° 001/2018 du 12 janvier 2018 portant révision de la Constitution gabonaise.

72 C’est le cas des Comores, du Ghana, du Nigéria…

73 C’est le cas du Bénin, du Burkina Faso, de l’Afrique du Sud, de l’Algérie, de la Gambie, de la Guinée, de l’île Maurice, du Mali, de la Mauritanie

74 C’est le cas du Djibouti, de l’Éthiopie, du Libéria, du Tchad…

75 C’est le cas du Congo, du Cameroun, du Gabon, de la Guinée équatoriale, du Rwanda…

76 Article 47 de la Constitution nigérienne du 25 novembre 2011.

77 Voir O. Duhamel, Le quinquennat, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 2000, p. 100.

78 Voir Cicéron, cité par M.P. Petracca, « Rotation in office: the history of an idea », in H. Edward (dir.), The politics and law of term limits

79 Sur la prorogation du mandat présidentiel, la majorité des États d’Afrique noire francophone a préféré garder le silence, occasionnant par là un

80 En effet, à l’approche de la fin de son mandat prévue pour décembre 2009, le président Mamadou Tandja a décidé de prolonger son mandat de deux

81 La Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018 dispose en son article 11 (3) que le président de la République « ne peut écourter son mandat

82 À titre d’exemple, la Constitution nigérienne du 25 novembre 2010 l’a prévu déjà à l’article 74 (2).

83 Voir à ce sujet l’article 29 de la Constitution française de 1946.

84 Voir à ce sujet l’article 6 de la Constitution française de 1958.

85 Il convient de rappeler qu’au Sénégal, la limitation ne résulte pas de la transition démocratique de 1990. Elle a été introduite pour la première

86 Voir K. Ahadzi-Nonou, « Constitution, démocratie et pouvoir en Afrique », Leçon inaugurale, in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un

87 Lire à ce sujet, A. Loada, « La limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique francophone », Afrilex, 2003, n° 3, pp. 144 et ss.

88 Sur la question, voir Mandela Institute for Development Studies, L’efficacité des limites du nombre de mandats présidentiels en Afrique, Dialogue

89 Sur ce point, on peut se référer aux cas ghanéens en 2000 avec Jerry Rawlings et 2008 avec John Kufuor, malien en 2002 avec Alpha Omar Konare

90 Lire A. Tchoupie, « La suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels au Cameroun : analyse de la bifurcation de la trajectoire d

91 Voir article 61 de la Constitution tchadienne du 14 avril 1996.

92 Voir article 9 (1) de la Constitution gabonaise du 26 mars 1991.

93 Voir article 42 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

94 B. Chantebout, Droit constitutionnel et science politique, Paris, Armand Colin, 1988, p. 617.

95 A.D. Olinga, « Le pouvoir exécutif dans la Constitution révisée », op. cit., pp. 29 et ss.

96 On peut citer, à titre illustratif, la révision de 2008 au Cameroun, celles de 2003, 2011 et 2018 au Gabon, celle de 2005 ainsi que la mise en

97 H. Roussillon, Les nouvelles transitions africaines : la transition démocratique, Toulouse, Presses de l’Institut d’Études politiques de Toulouse

98 M. Kamto, Pouvoir et droit en Afrique noire : essai sur les fondements du constitutionnalisme dans les États d’Afrique noire francophone, Paris

99 Cette pluralité culturelle met en exergue la langue, la race, l’appartenance ethnique, la communauté de départ ou d’origine, la religion, les 

100 K. Ahadzi-Nonou, « Réflexions sur un tabou du constitutionnalisme négro-africain : le tribalisme », in Les voyages du droit, Mélanges en l’

101 Ibid.

102 Voir sur cette question, P. Moudoudou, « L’État africain : entre constitutionnalisme libéral et constitutionnalisme identitaire », Revue CAMES/

103 D. Rousseau, « La notion de patrimoine constitutionnel européen », in Droit et politique à la croisée des cultures, Mélanges en l’honneur de

104 K. Ahadzi-Nonou, « Réflexions sur un tabou du constitutionnalisme négro-africain : le tribalisme », op. cit., pp. 21-23.

105 P.F. Gonidec, « Démocratie et développement en Afrique : perspectives internationales et nationales », Afrique 2000, Revue africaine de Politique

106 G. Rossatanga-Rignault, « À propos d’un transfert de technologie juridico-politique : réalités et risques de la démocratie électorale en Afrique 

107 A. Kpodar, « Bilan d’un demi-siècle de constitutionnalisme en Afrique noire », Revue électronique Afrilex, 2013, p. 28.

108 P. Moudoudou, « L’État africain : entre constitutionnalisme libéral et constitutionnalisme identitaire », op. cit., p. 120.

109 Voir, à titre illustratif, articles 5 (2) de la Constitution du Cameroun du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 41 (1) de la Constitution

110 Lire sur la question, Y.S. Lath, « La pérennisation du présidentialisme dans les États d’Afrique : les repères d’un modèle africain de régime

111 Voir C. Milhat, « L’État constitutionnel en Afrique francophone : entre État de droit et “état de droit” », RJPIC, Paris, 1998, n° 1, p. 3.

112 J. Gicquel, J-E. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Montchrestien, 21e éd., 2007, p. 653.

113 Dans l’ordre interne, le président de la République représente l’État dans tous les actes de la vie publique (cf. article 8 de la Constitution

114 Dans l’ordre international, le président de la République incarne la souveraineté de l’État et apparaît comme l’organe principal de la

115 L’article 29 de la Constitution malienne révisée le 26 mars 2012 l’a clairement affirmé. Le professeur C. Momo le qualifie de gardien subjectif.

116 Articles 9 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 47 (premier paragraphe) et 58 de la Constitution

117 Lire A. Bourgi, « Le président de la République dans la Constitution béninoise », in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle

118 Voir, par exemple, articles 118 alinéa 1er de la Constitution du Congo du 20 janvier 2002 modifiée le 6 novembre 2015, 83 de la Constitution du

119 Voir, à titre indicatif, l’article 96 de la Constitution de la République du Congo suscitée.

120 Voir, à titre indicatif, l’article 97 alinéa 1er de la Constitution de la République du Niger du 25 novembre 2010 révisée le 8 juin 2017.

121 Voir, à titre indicatif, articles 75 (bis) de la Constitution sénégalaise suscitée, 50 de la Constitution burkinabè suscitée, 59 de la

122 Th. Holo, « Démocratie revitalisée ou démocratie émasculée ? Les Constitutions du renouveau démocratique dans les États de l’espace francophone :

123 L’article 3 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance consacre « le renforcement du pluralisme politique

124 Les élections sont quasi systématiquement contestées dans la partie francophone du continent noir. C’est le cas, par exemple, au Congo‑

125 Sur ce dernier aspect, voir article 5 alinéa 2 de la loi camerounaise n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement

126 A-D. Olinga, La Constitution de la République du Cameroun, Yaoundé, Presses de l’UCAC, éd. Terre africaine, 2006, p. 65.

127 P.F. Gonidec, Les systèmes politiques africains, t. II, Paris, LGDJ, 1974, p. 80.

128 L. Dubouis, « Le régime présidentiel dans les nouvelles Constitutions des États d’expression française », Pénant, 1962, pp. 218 et ss.

129 Voir, à titre illustratif, CS/CA, jugement n° 40/CS/CA/79 - 80 du 29 mai 1980, Monkam Tientcheu David contre État du Cameroun ; CS/CA, jugement n

130 Selon cet article, aucune juridiction ne peut connaître des actes de gouvernement.

131 Voir CS/CA, ordonnance n° 01/OSE/CCA/CS/2009 du 23 janvier 2009. Sur le commentaire de cette décision, lire C. Keutcha Tchapnga, « Le sursis à

132 Articles 192 de la Constitution congolaise suscitée, 138 de la Constitution burkinabè du 2 juin 1991 modifiée entre autres en 2015, 118 de la

133 Aux termes de l’article 136 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, « la Haute Cour de justice est compétente pour juger le président

134 Article 96 de la Constitution congolaise suscitée.

135 Article 78, dernier paragraphe, de la Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018.

136 Cf. article 83 de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

137 Article 53 (3) de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008.

138 Article 87 de la Constitution sénégalaise suscitée.

139 La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 a repris ces dispositions, mais est allée au-delà pour ajouter d’autres infractions. Aux termes de

140 Article 142 de la Constitution nigérienne suscitée.

141 Article 124 de la Constitution centrafricaine du 30 mars 2016.

142 M. Kamto, « Actes de gouvernement et droits de l’Homme au Cameroun », Lex lata, mai 1996, n° 26, pp. 9 et ss ; S. Bilong, « Le déclin de l’État

143 M. Kamto, « Actes de gouvernement et droits de l’Homme au Cameroun », op. cit., pp. 9 et ss ; Bilong (S), « Le déclin de l’État de droit au

144 Lire J. Owona, Le contentieux administratif de la République du Cameroun, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 73.

145 Ibid, p. 73.

146 L. Favoreu, Du déni de justice en droit public français, Paris, LGDJ, 1962, p. 153.

147 J. Mouangue Kobila, « Peut-on parler d’un reflux du constitutionnalisme au Cameroun ? », Revue africaine des Sciences juridiques, Université de

148 A.S. Mescheriakoff, « Le multipartisme en Afrique francophone : illusion ou solution », in L’Afrique en transition vers le pluralisme politique

149 B. Boumakani, « L’État de droit en Afrique centrale », in D. Maugenest et J. D. Boukongou (dir.), Vers une société de droit en Afrique centrale (

150 En effet, tout détenteur du pouvoir politique doit savoir qu’à la fin de son mandat, il doit libérer le poste pour permettre l’alternance.

151 L’existence des contre-pouvoirs dans un État de droit est importante, car, pour C. Montesquieu, « tout homme qui dispose du pouvoir est tenté d’

152 Lire à ce sujet, Y-A. Faure, Les Constitutions et l’exercice du pouvoir en Afrique noire : pour une lecture différente des textes, Paris

153 La culture comme système de valeurs bien assimilées induit les attitudes et les comportements conformes aux exigences des règles juridiques et

Notes

1 Voir titre II de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 modifiée le 14 avril 2008, titre III de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018, titre II de la Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018, titre III de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, titre IV de la Constitution congolaise du 6 novembre 2015 adoptée par referendum du 25 octobre 2015, titre III de la Constitution sénégalaise révisée le 5 avril 2016, titre III de la Constitution ivoirienne du 8 novembre 2016 adoptée par referendum du 30 octobre 2016, titre III de la Constitution de la RCA du 30 mars 2016 adoptée par référendum du 14 décembre 2015.

2 Ch. Debbasch et Y. Daudet, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2e éd., 1978, p. 113.

3 Voir à ce sujet, M. Hauriou, Précis de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 2e éd., 1929, pp. 388 et ss.

4 Ibid, p. 388.

5 Notons qu’aujourd’hui, on assiste dans beaucoup d’États à un déclin progressif du pouvoir législatif et du parlement qui l’incarne. Par contre, on voit une montée en puissance du pouvoir exécutif et des autorités gouvernementales. Ainsi, dans les États de l’Afrique noire francophone, on note une conception majestueuse de ce pouvoir. Cette conception désormais consacrée induit un renforcement généralisé de ce pouvoir qui devient un effet de mode en Afrique.

6 Cf. articles 41 et 54 de la Constitution.

7 Cf. article 84 de la Constitution.

8 Cf. articles 5 (1) et 12 (1) de la Constitution.

9 Articles 8 et 29 de la Constitution.

10 L. Favoreu et autres, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2017, p. 59.

11 J-J. Rousseau, Contrat social ou principes du droit politique, Genève, Marc-Michel Bousquet, 1762, pp. 10 et ss.

12 Voir F. Delpere, « Ce que je crois ou le constitutionnalisme », in Présence du droit et des droits de l’homme, Mélanges offerts à Jacques Velu, Bruxelles, Bruylant, 1992, pp. 211-221.

13 Ibidem.

14 R. Cabrillac (dir.), Dictionnaire du vocabulaire juridique, Paris, Lexis Nexis, 8e éd., 2016, p. 144.

15 O. Beaud, « La Constitution et le droit constitutionnel », in D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, Quadrige‑Lamy, 2010, p. 261.

16 P. Raynaud, « constitutionnalisme », in D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 266.

17 J. L. Seurin et autres, Le constitutionnalisme d’aujourd’hui, Paris, Economica, 1984, pp. 35 et ss.

18 Th. Holo, « Émergence de la justice constitutionnelle », Pouvoirs, 2009, n° 129, pp. 101-114.

19 Lire sur la question G. Conac, « Le présidentialisme en Afrique noire, unité et diversité, essai de typologie », in CEAN, L’évolution récente du pouvoir en Afrique noire, Bordeaux, 1977, pp. 2 et ss ; J. Gicquel, « Le présidentialisme négro-africain, l’exemple camerounais », in Le pouvoir, Mélanges offerts à Georges Burdeau, Paris, LGDJ, 1977, pp. 702 et ss ; Y.S. Lath, « La pérennisation du présidentialisme dans les États d’Afrique : les repères d’un modèle africain de régime politique », Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, Études cordonnées par F.J. Aivo, Paris, L’Harmattan, 2014, pp. 285 et ss.

20 La dogmatique permet d’analyser, d’interpréter et de commenter les textes juridiques relatifs à la question traitée.

21 La casuistique, quant à elle, s’analyse en l’étude et commentaire des décisions de justice encore appelées jurisprudence dont l’appréciation critique donne une idée de l’application et du respect du droit en vigueur.

22 Le professeur Roland Drago attirait déjà l’attention du chercheur en droit sur l’importance du recours au droit comparé : « tout juriste est un comparatiste, car, il gagne une faculté d’approfondissement des notions fondamentales et une certaine modestie à l’égard de son droit national » (cf. R. Drago, « Droit comparé », in D. Alland, S. Rials [dir.], Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 456).

23 Selon Madeleine Grawitz, « toute recherche ou application de caractère scientifique en science sociale, comme dans les sciences en général, doit comporter l’utilisation des procédés opératoires rigoureux, bien définis, transmissibles, susceptibles d’être appliqués à nouveau dans les mêmes conditions, adaptés au genre de problème en cause. Ce sont là des techniques. Le choix de ces techniques dépend de l’objet poursuivi, lequel est lié lui-même à la méthode de travail » (M. Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 2001, p. 333). Pour le professeur Roland Drago, « la technique de recherche consiste en une collecte des faits et informations, un outil mis à la disposition de la recherche, des moyens matériels prédestinés à la collecte et au traitement des données » (R. Drago, « Droit comparé », in D. Alland, S. Rials [dir.], Dictionnaire de la culture juridique, op. cit., p. 456).

24 La technique documentaire « consiste en une fouille systématique de tout ce qui est écrit ayant une liaison avec le domaine de recherche » (M. Grawitz, op. cit., p. 571).

25 S’agissant de la technique par enquête, elle permet de recueillir auprès des citoyens et autorités habilitées à mettre le droit en application les éléments au sujet de cette mise en œuvre. Cette technique se sert des interviews ou questionnaires et permet de voir les difficultés d’application de la règle de droit. C’est d’ailleurs au regard de ces difficultés qu’on peut envisager, avec justesse, de nouvelles perspectives sur le sujet examiné.

26 A.D. Olinga, « Le pouvoir exécutif dans la Constitution révisée », Lex Lata, février-mars 1996, n° 23-24, pp. 29 et ss.

27 F. Hourquebie, Sur l’émergence du contre-pouvoir juridictionnel sous la Ve République, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 64.

28 C. Montesquieu, De l’esprit des lois, t. I, Paris, Éditions Garnier, 1956, pp. 161 sq.

29 Sur la question, lire F. Hourquebie, « La Constitution du Bénin et la théorie des contre-pouvoirs », in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, Études cordonnées par F.J. Aivo, Paris, L’Harmattan, 2014, pp. 367-379.

30 La notion de contre-pouvoir se traduit par des interactions réciproques à l’intérieur d’un système concurrentiel au bénéfice de l’équilibre des pouvoirs. Cet équilibre nécessite un Exécutif normalisé et modéré.

31 O. Duhamel, Y. Meny, Dictionnaire de droit constitutionnel, Paris, PUF, mars 1992, p. 677.

32 Cf. articles 35 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 113 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, 61 de la Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018, 145 de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

33 Le contrôle sans mise en jeu de la responsabilité est consacré dans la Constitution et se réalise au moyen des questions au gouvernement. Par cette technique, le parlement entend s’informer sur le travail du gouvernement.

34 Le contrôle avec mise en jeu de la responsabilité est la seconde modalité de contrôle qui peut conduire à la sanction à l’encontre du gouvernement. L’initiative peut provenir des parlementaires à travers la motion de censure ou du gouvernement à travers la question de confiance.

35 B. Chantebout, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 29e éd., 2012, p. 566.

36 Déclenchée par les parlementaires du parti de l’opposition SDF, qui avaient d’ailleurs sollicité la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire pour le contrôle de la gestion de l’ex-ministre Mounchipou Seidou, l’affaire a abouti à sa condamnation à vingt ans d’emprisonnement ferme. Il lui était reproché les faits de détournement des fonds publics à travers le fractionnement des marchés et les marchés fictifs.

37 P. Jan, « Les oppositions », Pouvoirs, 2004, n° 108, p. 29.

38 G. Schmitz, « L’opposition dans un régime parlementaire », Publication GC, décembre 1988, p. 2. En ligne < www.publication.gc.ca/collection-R/LoPBdP/BP/bp47-htm >, consulté le 27 mars 2019.

39 Voir préambule de la Constitution du Sénégal du 22 janvier 2001 révisée le 5 avril 2016.

40 Mbodj El Hadj, « Les garanties et éventuels statuts de l’opposition en Afrique », Symposium international de Bamako, avril 2000, p. 346.

41 Union interparlementaire, « Statut type de l’opposition au parlement », Séminaire parlementaire sur les relations entre partis majoritaires et minoritaires dans les parlements africains, Libreville, 17-19 mai 1999, p. 3.

42 Lire B.D. Coulibaley, « Le juge administratif, rempart de protection des citoyens contre l’administration en Afrique noire francophone ? », Afrilex, janvier 2013, pp. 1-35, disponible sur http://afrilex.u-bordeaux.fr/le-juge-administratif-rempart-de-protection-des-citoyens-contre-ladministration-en-afrique-noire-francophone/, consulté le 17 mai 2019.

43 Voir à titre illustratif la Cour constitutionnelle du Bénin, DCC 33-94 du 24 novembre 1994 portant annulation d’un décret du président de la République interdisant Madame ou Messieurs les conseillers à la Cour l’appartenance ou l’adhésion à un parti politique ; Décision DCC 18-094 du 3 juin 1994 portant annulation des arrêtés interministériels portant discriminations injustifiées ; CS/CA du Cameroun, jugement n° 42/96 697 du 5 décembre 1996, Établissements Gortzounian contre État du Cameroun ; CS/CA, jugement n° 60/96-97 du 27 mars 1997, Diocèse de Sangmélima contre État du Cameroun, etc.

44 M. Froment, La justice constitutionnelle dans le monde, Paris, Dalloz, 1996, p. 2.

45 F. Hourquebie, « Pouvoir constituant et contre-pouvoir », ATDC, Le pouvoir constituant aujourd’hui, Tunis, 16-17 novembre 2006, p. 4.

46 A. Ondoua, « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? », Rapport de synthèse des travaux, Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, op. cit., p. 797.

47 Voir articles 114 à 124 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

48 Voir A. Ondoua, « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? », Rapport de synthèse des travaux, Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, op. cit., p. 797.

49 Voir titre VI de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990 suscitée.

50 En novembre 2018, la Cour constitutionnelle gabonaise a complété certaines dispositions de la Constitution en lieu et place du constituant. Le nouvel alinéa ajouté à l’article 13 de la Constitution gabonaise dispose qu’« en cas d’indisponibilité temporaire du président (…) certaines fonctions (…) peuvent être exercées, selon le cas, soit par le Premier ministre, sur autorisation spéciale de la Cour constitutionnelle ». C’est en application des dispositions de l’alinéa ajouté à l’article 13 de la Constitution que la Cour constitutionnelle, en sa qualité d’organe régulateur du fonctionnement des institutions, a autorisé le vice-président de la République à convoquer et à présider un Conseil des ministres qui portera exclusivement sur l’ordre du jour joint à la requête du Premier ministre.

51 La définition d’acte de gouvernement donnée par le Conseil d’État français dans l’affaire Prince Napoléon exclut désormais le mobile politique. Il s’agit des actes concernant les rapports de l’Exécutif avec le Parlement ainsi que ceux mettant en cause les rapports du gouvernement avec un État étranger ou un organisme international (CE, 19 février 1875, Prince Napoléon).

52 C’est le cas, par exemple, au Cameroun des actes portant désignation des chefs traditionnels, des actes pris pour le règlement des litiges portant sur la limite des circonscriptions administratives, des actes portant désignation des membres d’Élections Cameroon (ELECAM), les actes du président de la République pris sur la base des articles 5, 8, 9 et 10 de la Constitution du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008.

53 Voir dans la présente étude le 2 du B du II consacré à la prolifération des actes injusticiables.

54 Voir dans la présente étude le 1 du B du II consacré à l’hypertrophie des pouvoirs du président de la République.

55 Sur la notion, voir aussi D. Rousseau, « L’ouverture du droit constitutionnel aux tiers pouvoirs », in C.M. Herrera et S. Pinon (dir.), La démocratie entre multiplication des droits et contre-pouvoirs sociaux, Paris, éd. Kimé, 2012, pp. 159-164.

56 F. Borella, Éléments de droit constitutionnel, Paris, Presses de sciences politiques, Références, 2008, p. 310.

57 J-L. La Ville, R. Sainsaulieu, L’Association, Pluriel, 2013, p. 22.

58 B. Nabli, « État de droit et contre-pouvoirs », en ligne : < http://ojiv.org/les-autres-rencontres-de-lojiv/debat-sur-les-libertes-publiques/etat-de-droit-et-contre-pouvoirs >, consulté le 21 mars 2019.

59 Cf. F. Ly-Fall, « Le nouveau contre-pouvoir au Sénégal : quand le Hip Hop transforme le regard sur la participation citoyenne », in De la démocratie participative au Sénégal, novembre 2013, 18 p.

60 F. Borella, « Souveraineté nationale et pluraliste des citoyennetés », Mélanges en l’honneur de Jean Waline, Paris, Dalloz, 2001, p. 16.

61 Ibid. p. 90.

62 B. Pascal définit la tyrannie comme le fait de « (…) vouloir avoir par une voie ce qu’on ne peut avoir que par une autre », in Pensées et opuscules, Paris, Hachette, 1946, pp. 483-484. Cette position est reprise par M. Walzer qui assimile la tyrannie à la prédominance d’un bien hors de sa sphère. Pour le philosophe américain, il existe différentes sphères dans la société et les sphères doivent coexister dans une « égalité complexe » c’est-à-dire un arrangement institutionnel où chaque sphère est soumise à des règles particulières et a des rapports d’égalité avec les autres. In Sphère de justice. Une défense du pluralisme et de l’égalité, Paris, Seuil, 1997, pp. 45 et ss.

63 G. Mbra Guerandi, « Repenser un modèle de démocratie participative au Cameroun », CJDHR, vol. 2, juin 2008, p. 4.

64 Idem.

65 P. Pactet et F. Melin-Soucramanien, Droit constitutionnel, Paris, Sirey, 28e éd., 2009, p. 14.

66 P. Pierre, « Les contre-pouvoirs institutionnels », Projet, 1980, n° 150, p. 1190.

67 G. Moyen, « L’Exécutif dans le nouveau constitutionnalisme africain : Les cas du Congo, du Bénin et du Togo », Annales de l’Université Marien Ngouabi, 2009, 10 (3), p. 48.

68 Voir article 6 alinéa 2 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, version révisée le 14 avril 2008.

69 Cf. article 42 (1) de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

70 Cf. article 66 de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

71 Cf. article 9 alinéa premier (nouveau) de la loi n° 001/2018 du 12 janvier 2018 portant révision de la Constitution gabonaise.

72 C’est le cas des Comores, du Ghana, du Nigéria…

73 C’est le cas du Bénin, du Burkina Faso, de l’Afrique du Sud, de l’Algérie, de la Gambie, de la Guinée, de l’île Maurice, du Mali, de la Mauritanie, du Niger, de la RCA, de la RDC, du Sénégal, du Togo, de la Tunisie, de la Zambie…

74 C’est le cas du Djibouti, de l’Éthiopie, du Libéria, du Tchad…

75 C’est le cas du Congo, du Cameroun, du Gabon, de la Guinée équatoriale, du Rwanda…

76 Article 47 de la Constitution nigérienne du 25 novembre 2011.

77 Voir O. Duhamel, Le quinquennat, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 2000, p. 100.

78 Voir Cicéron, cité par M.P. Petracca, « Rotation in office: the history of an idea », in H. Edward (dir.), The politics and law of term limits, Crane and Roger Pilon, Washington DC, CATO Institute, 1994, p. 21.

79 Sur la prorogation du mandat présidentiel, la majorité des États d’Afrique noire francophone a préféré garder le silence, occasionnant par là un vide juridique. Ce vide juridique permet au détenteur du pouvoir en temps utile de faire valoir à son profit la maxime « tout ce qui n’est pas interdit est autorisé ». Le Niger en a fait l’exception en proscrivant formellement la prorogation du mandat présidentiel. L’article 47 de la Constitution du 25 novembre 2010 révisée le 8 juin 2017 dispose : « en aucun cas, nul ne peut… proroger le mandat pour quelque motif que ce soit ».

80 En effet, à l’approche de la fin de son mandat prévue pour décembre 2009, le président Mamadou Tandja a décidé de prolonger son mandat de deux années supplémentaires afin, dit-il, de terminer certains chantiers qu’il a entrepris. Son engagement de se maintenir au pouvoir à la fin de son mandat l’a poussé à dissoudre la Cour constitutionnelle qui s’opposait à son projet et à nommer de nouveaux membres et président qui ont accompagné le processus de révision constitutionnelle à son terme. Seulement, le 18 février 2010, un coup d’État est venu mettre un terme à cette ambition.

81 La Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018 dispose en son article 11 (3) que le président de la République « ne peut écourter son mandat de quelque manière que ce soit pour en solliciter un autre ».

82 À titre d’exemple, la Constitution nigérienne du 25 novembre 2010 l’a prévu déjà à l’article 74 (2).

83 Voir à ce sujet l’article 29 de la Constitution française de 1946.

84 Voir à ce sujet l’article 6 de la Constitution française de 1958.

85 Il convient de rappeler qu’au Sénégal, la limitation ne résulte pas de la transition démocratique de 1990. Elle a été introduite pour la première fois par la loi n° 70-15 du 6 février 1970. Mais elle sera remise en cause par la loi n° 76-27 du 6 avril 1976. Elle sera réintroduite par la loi n° 91 ‑46 du 6 octobre 1991 portant révision de la Constitution. La limitation de mandats à deux sera supprimée à nouveau avec la révision du 10 octobre 1998 avant d’être restaurée par la Constitution du 22 janvier 2001.

86 Voir K. Ahadzi-Nonou, « Constitution, démocratie et pouvoir en Afrique », Leçon inaugurale, in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, op. cit., pp. 71.

87 Lire à ce sujet, A. Loada, « La limitation du nombre de mandats présidentiels en Afrique francophone », Afrilex, 2003, n° 3, pp. 144 et ss.

88 Sur la question, voir Mandela Institute for Development Studies, L’efficacité des limites du nombre de mandats présidentiels en Afrique, Dialogue annuel des jeunes Africains à MINDS, Édition 2016, pp. 11-15 ; Commission européenne pour la démocratie par le droit, Rapport sur les limitations de mandats, adopté par la Commission de Venise lors de sa 114e session plénière, Venise, 16 et 17 mars 2018, pp. 22.

89 Sur ce point, on peut se référer aux cas ghanéens en 2000 avec Jerry Rawlings et 2008 avec John Kufuor, malien en 2002 avec Alpha Omar Konare, béninois en 2005 avec Mathieu Kerekou et en 2016 avec Thomas Yayi Boni, etc.

90 Lire A. Tchoupie, « La suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels au Cameroun : analyse de la bifurcation de la trajectoire d’une politique institutionnelle », Revue africaine des relations internationales, vol. 12, 2009, n° 1 et 2, pp. 5-37.

91 Voir article 61 de la Constitution tchadienne du 14 avril 1996.

92 Voir article 9 (1) de la Constitution gabonaise du 26 mars 1991.

93 Voir article 42 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990.

94 B. Chantebout, Droit constitutionnel et science politique, Paris, Armand Colin, 1988, p. 617.

95 A.D. Olinga, « Le pouvoir exécutif dans la Constitution révisée », op. cit., pp. 29 et ss.

96 On peut citer, à titre illustratif, la révision de 2008 au Cameroun, celles de 2003, 2011 et 2018 au Gabon, celle de 2005 ainsi que la mise en place d’une nouvelle Constitution en 2018 au Tchad, celles de 2001 et 2016 au Sénégal, celles de 2002 et 2015 au Congo, celles de 2002, 2005, 2007 et 2019 au Togo, etc.

97 H. Roussillon, Les nouvelles transitions africaines : la transition démocratique, Toulouse, Presses de l’Institut d’Études politiques de Toulouse, 2e éd., 1995, pp. 56 et ss ; J.P. Daloz et P. Quantin (dir.), Transitions démocratiques africaines, Paris, Karthala, 1997, pp. 28 et ss ; B. Kante, « Le constitutionnalisme à l’épreuve de la transition démocratique en Afrique », in C.M. Zoethout (dir.), Constitutionalism in Africa : a quest for autochtonous principles, Sander Institut, Gonda Quint-Deventer, 1996, pp. 17-32.

98 M. Kamto, Pouvoir et droit en Afrique noire : essai sur les fondements du constitutionnalisme dans les États d’Afrique noire francophone, Paris, LGDJ, 1987, p. 491.

99 Cette pluralité culturelle met en exergue la langue, la race, l’appartenance ethnique, la communauté de départ ou d’origine, la religion, les institutions sociales spécifiques, etc.

100 K. Ahadzi-Nonou, « Réflexions sur un tabou du constitutionnalisme négro-africain : le tribalisme », in Les voyages du droit, Mélanges en l’honneur de Dominique Breillat, Poitiers, LGDJ, 2011, pp. 19 et ss.

101 Ibid.

102 Voir sur cette question, P. Moudoudou, « L’État africain : entre constitutionnalisme libéral et constitutionnalisme identitaire », Revue CAMES/SJP, 2015, n° 002, p. 120.

103 D. Rousseau, « La notion de patrimoine constitutionnel européen », in Droit et politique à la croisée des cultures, Mélanges en l’honneur de Philippe Ardant, Paris, LGDJ, 1990, p. 38.

104 K. Ahadzi-Nonou, « Réflexions sur un tabou du constitutionnalisme négro-africain : le tribalisme », op. cit., pp. 21-23.

105 P.F. Gonidec, « Démocratie et développement en Afrique : perspectives internationales et nationales », Afrique 2000, Revue africaine de Politique internationale, juillet-août-septembre 1993, n° 14, p. 59.

106 G. Rossatanga-Rignault, « À propos d’un transfert de technologie juridico-politique : réalités et risques de la démocratie électorale en Afrique », in P. Mabaka (dir.), Constitution et risque, Paris, l’Harmattan, 2010, p. 317.

107 A. Kpodar, « Bilan d’un demi-siècle de constitutionnalisme en Afrique noire », Revue électronique Afrilex, 2013, p. 28.

108 P. Moudoudou, « L’État africain : entre constitutionnalisme libéral et constitutionnalisme identitaire », op. cit., p. 120.

109 Voir, à titre illustratif, articles 5 (2) de la Constitution du Cameroun du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 41 (1) de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, 65 (1) de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

110 Lire sur la question, Y.S. Lath, « La pérennisation du présidentialisme dans les États d’Afrique : les repères d’un modèle africain de régime politique », op. cit., pp. 285 et ss.

111 Voir C. Milhat, « L’État constitutionnel en Afrique francophone : entre État de droit et “état de droit” », RJPIC, Paris, 1998, n° 1, p. 3.

112 J. Gicquel, J-E. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Montchrestien, 21e éd., 2007, p. 653.

113 Dans l’ordre interne, le président de la République représente l’État dans tous les actes de la vie publique (cf. article 8 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 modifiée par la loi n° 2008/001 du 14 avril 2008).

114 Dans l’ordre international, le président de la République incarne la souveraineté de l’État et apparaît comme l’organe principal de la coopération et de l’intégration interétatiques.

115 L’article 29 de la Constitution malienne révisée le 26 mars 2012 l’a clairement affirmé. Le professeur C. Momo le qualifie de gardien subjectif. Voir C. Momo, « Le gardien de la Constitution en Afrique subsaharienne francophone », RRJ, 2017-1, p. 409.

116 Articles 9 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008, 47 (premier paragraphe) et 58 de la Constitution sénégalaise du 22 janvier 2001 révisée le 5 avril 2016, 67 et 68 de la Constitution nigérienne du 25 novembre 2010 révisée le 8 juin 2017, 25 de la Constitution gabonaise du 26 mars 1991 dont la dernière révision remonte au 12 janvier 2018, 93 et 157 de la Constitution congolaise du 20 janvier 2002 modifiée le 6 novembre 2015, 58 de la Constitution burkinabè du 11 juin 1991, amendée une fois de plus le 26 novembre 2015.

117 Lire A. Bourgi, « Le président de la République dans la Constitution béninoise », in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, Études cordonnées par F.J. Aivo, Paris, L’Harmattan, 2014, pp. 321 et ss.

118 Voir, par exemple, articles 118 alinéa 1er de la Constitution du Congo du 20 janvier 2002 modifiée le 6 novembre 2015, 83 de la Constitution du Togo du 14 octobre 1992 révisée le 31 décembre 2002 et le 8 mai 2019.

119 Voir, à titre indicatif, l’article 96 de la Constitution de la République du Congo suscitée.

120 Voir, à titre indicatif, l’article 97 alinéa 1er de la Constitution de la République du Niger du 25 novembre 2010 révisée le 8 juin 2017.

121 Voir, à titre indicatif, articles 75 (bis) de la Constitution sénégalaise suscitée, 50 de la Constitution burkinabè suscitée, 59 de la Constitution nigérienne suscitée, 19 de la Constitution gabonaise suscitée, 8 alinéa 12 de la Constitution camerounaise suscitée.

122 Th. Holo, « Démocratie revitalisée ou démocratie émasculée ? Les Constitutions du renouveau démocratique dans les États de l’espace francophone : régimes juridiques et systèmes politiques », RBSJA, 2006, n° 16, pp. 17-41.

123 L’article 3 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance consacre « le renforcement du pluralisme politique, notamment par la reconnaissance du rôle, des droits et des obligations des partis politiques légalement constitués, y compris les partis politiques d’opposition qui doivent bénéficier d’un statut sous la loi nationale ».

124 Les élections sont quasi systématiquement contestées dans la partie francophone du continent noir. C’est le cas, par exemple, au Congo‑Brazzaville en 2002, en Côte d’Ivoire en 2010 ou encore au Cameroun en 2018.

125 Sur ce dernier aspect, voir article 5 alinéa 2 de la loi camerounaise n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs.

126 A-D. Olinga, La Constitution de la République du Cameroun, Yaoundé, Presses de l’UCAC, éd. Terre africaine, 2006, p. 65.

127 P.F. Gonidec, Les systèmes politiques africains, t. II, Paris, LGDJ, 1974, p. 80.

128 L. Dubouis, « Le régime présidentiel dans les nouvelles Constitutions des États d’expression française », Pénant, 1962, pp. 218 et ss.

129 Voir, à titre illustratif, CS/CA, jugement n° 40/CS/CA/79 - 80 du 29 mai 1980, Monkam Tientcheu David contre État du Cameroun ; CS/CA, jugement n° 60/CS/CA/85-86 du 15 mai 1986, Ngoong Mandeng Christophe contre État du Cameroun.

130 Selon cet article, aucune juridiction ne peut connaître des actes de gouvernement.

131 Voir CS/CA, ordonnance n° 01/OSE/CCA/CS/2009 du 23 janvier 2009. Sur le commentaire de cette décision, lire C. Keutcha Tchapnga, « Le sursis à exécution et l’action du président de la République au Cameroun : à propos de l’ordonnance n° 01 du 23 janvier 2009 de la Chambre administrative de la Cour suprême, Social Democratic Front (SDF) contre État du Cameroun », Juridis périodique, avril-mai-juin 2009, n° 78, pp. 21 ‑29.

132 Articles 192 de la Constitution congolaise suscitée, 138 de la Constitution burkinabè du 2 juin 1991 modifiée entre autres en 2015, 118 de la Constitution guinéenne du 7 mai 2010, 53 de la Constitution camerounaise suscitée, 87 de la Constitution sénégalaise suscitée, 142 de la Constitution nigérienne suscitée, 78 de la Constitution gabonaise suscitée. Sur la question, on peut lire aussi F. J. Aivo, « La responsabilité pénale des gouvernants dans les régimes politiques africains d’influence française », Revue juridique et politique, 2010, n° 1, pp. 3 et ss ; M. Nguele Abada, « La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 et la responsabilité pénale des gouvernants », in La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l’Afrique ? Mélanges en l’honneur de Maurice Ahanhanzo-Glele, op. cit., pp. 497 et ss.

133 Aux termes de l’article 136 de la Constitution béninoise du 11 décembre 1990, « la Haute Cour de justice est compétente pour juger le président de la République et les membres du gouvernement à raison des faits qualifiés de haute trahison, d’infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions… Les juridictions de droit commun restent compétentes pour les infractions perpétrées en dehors de l’exercice de leurs fonctions et dont ils sont pénalement responsables ».

134 Article 96 de la Constitution congolaise suscitée.

135 Article 78, dernier paragraphe, de la Constitution gabonaise révisée le 12 janvier 2018.

136 Cf. article 83 de la Constitution tchadienne du 4 mai 2018.

137 Article 53 (3) de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 révisée le 14 avril 2008.

138 Article 87 de la Constitution sénégalaise suscitée.

139 La Constitution béninoise du 11 décembre 1990 a repris ces dispositions, mais est allée au-delà pour ajouter d’autres infractions. Aux termes de l’article 73, « la responsabilité personnelle du président de la République est engagée en cas de haute trahison, d’outrage à l’Assemblée ou d’atteinte à l’honneur et à la probité ».

140 Article 142 de la Constitution nigérienne suscitée.

141 Article 124 de la Constitution centrafricaine du 30 mars 2016.

142 M. Kamto, « Actes de gouvernement et droits de l’Homme au Cameroun », Lex lata, mai 1996, n° 26, pp. 9 et ss ; S. Bilong, « Le déclin de l’État de droit au Cameroun : le développement des immunités juridictionnelles », Juridis périodique, avril-mai-juin 2005, n° 62, pp. 55 et ss.

143 M. Kamto, « Actes de gouvernement et droits de l’Homme au Cameroun », op. cit., pp. 9 et ss ; Bilong (S), « Le déclin de l’État de droit au Cameroun… », op. cit., pp. 55 et ss.

144 Lire J. Owona, Le contentieux administratif de la République du Cameroun, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 73.

145 Ibid, p. 73.

146 L. Favoreu, Du déni de justice en droit public français, Paris, LGDJ, 1962, p. 153.

147 J. Mouangue Kobila, « Peut-on parler d’un reflux du constitutionnalisme au Cameroun ? », Revue africaine des Sciences juridiques, Université de Yaoundé II-Soa, FSJP, vol. 6, 2009, n° 1, pp. 267 et ss.

148 A.S. Mescheriakoff, « Le multipartisme en Afrique francophone : illusion ou solution », in L’Afrique en transition vers le pluralisme politique, Paris, Economica, 1993, p. 72.

149 B. Boumakani, « L’État de droit en Afrique centrale », in D. Maugenest et J. D. Boukongou (dir.), Vers une société de droit en Afrique centrale (1990-2000), Colloque de Yaoundé, 14 -16 novembre 2000, p. 109.

150 En effet, tout détenteur du pouvoir politique doit savoir qu’à la fin de son mandat, il doit libérer le poste pour permettre l’alternance.

151 L’existence des contre-pouvoirs dans un État de droit est importante, car, pour C. Montesquieu, « tout homme qui dispose du pouvoir est tenté d’en abuser. Ainsi, pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir », in De l’esprit des lois, op. cit., pp. 161 et ss.

152 Lire à ce sujet, Y-A. Faure, Les Constitutions et l’exercice du pouvoir en Afrique noire : pour une lecture différente des textes, Paris, Economica, 1984, pp. 34 et ss.

153 La culture comme système de valeurs bien assimilées induit les attitudes et les comportements conformes aux exigences des règles juridiques et politiques (S. Milacic, « La démocratie politique éclipsée par l’État de droit », in I. Illessy (dir.), Constitutional consequences of the EU Memberships, Faculté de droit, Université de Pécs, 2005, p. 241.

Citer cet article

Référence électronique

Jacques BIPELE KEMFOUEDIO, « La rationalisation de l’exécutif dans le nouveau constitutionnalisme des États de l’Afrique noire francophone », La Revue du Centre Michel de L'Hospital [En ligne], 19 | 2019, mis en ligne le 26 octobre 2021, consulté le 24 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/revue-cmh/index.php?id=244

Auteur

Jacques BIPELE KEMFOUEDIO

Chargé de cours, Habilité à diriger des Recherches (HDR) en droit public, Université de Dschang, Cameroun

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