Des notions autonomes du droit de la Convention européenne des droits de l’homme à la transsystémie

Pour une approche transsystémique du droit européen des droits de l’homme

DOI : 10.52497/revue-cmh.309

Index

Mots-clés

Convention européenne des droits de l’homme, transsystémie

Plan

Texte intégral

Introduction

Parmi les juristes français, nombreux sont ceux qui admirent les méthodes d’enseignement transsytémiques du droit1 et envient leurs collègues canadiens, dont certains ont pu apprendre le droit grâce à une telle méthode. Se pose alors la question de savoir si ce type de formation pourrait être transposé en France ou s’il n’existerait pas des biais permettant de s’en inspirer.

La proposition que nous souhaiterions faire dans cet article est la suivante : le droit de la Convention européenne des droits de l’Homme pourrait constituer le point de départ d’un enseignement transsytémique du droit. Il se rapproche en effet du droit canadien dans la mesure où, à l’instar de ce dernier, il utilise deux langues officielles, à savoir l’anglais et le français, et où, comme lui, il s’inspire des diverses traditions juridiques des États membres du Conseil de l’Europe, c’est-à-dire la Common Law et la tradition civiliste. On perçoit immédiatement que ce bilinguisme et ce bijuridisme se prêtent indéniablement à une approche transsystémique2. Nous aimerions plus précisément démontrer que les notions autonomes auxquelles recourt le droit européen des droits de l’Homme sont, en quelque sorte, de nouveaux topoï qui redessinent une cartographie juridique européenne, contribuent à synthétiser les cultures juridiques et, ce faisant, assurent une sorte de médiation linguistique entre les différentes traditions.

La Convention européenne des droits de l’Homme est un texte plutôt court même si ses protocoles additionnels lui ont donné de l’ampleur. Compte tenu de sa taille réduite, son effectivité dépend de ce que l’on fait dire ou non à ces dispositions, c’est-à-dire de son interprétation. Or, parmi les techniques permettant d’assurer cette dernière, celle dite des notions autonomes ou de l’autonomie des termes de la Convention3 retient l’attention. La doctrine considère cette méthode comme « progressiste »4 et la classe parmi les moyens permettant de réaliser l’objectif principal que la Cour européenne des droits de l’Homme s’est assigné dans l’arrêt Airey contre Irlande du 9 novembre 1979, à savoir « protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs »5.

En droit européen des droits de l’Homme, les termes et notions autonomes proviennent donc pour la plupart du texte conventionnel. Autonomes, ils bénéficient en droit européen d’une signification indépendante de celle qui leur est attribuée en droit interne par les États membres du Conseil de l’Europe. Il s’agit donc de se détacher des qualifications juridiques nationales pour permettre aux termes conventionnels de correspondre à l’acception la plus utile, c’est-à-dire la plus efficace quant à la protection des droits garantis par la Convention. Cependant, l’autonomie des termes de la Convention se construit précisément à partir de leur signification nationale. Le droit interne serait donc le point de départ permettant à la Cour d’attribuer à certains mots et expressions un sens spécifique6.

Nous verrons que ces notions autonomes, dont la signification européenne transcende les traditions nationales (I), sont potentiellement transsystémiques (II).

I. Une signification européenne transcendant les traditions nationales

Les notions autonomes n’ont pas réellement de définition européenne. Dans une visée pragmatique, la jurisprudence européenne leur offre certes une signification européenne indépendante de leurs définitions en droit national, mais elle se garde bien de les doter d’une véritable définition. De prime abord, on pourrait penser qu’il s’agit là d’un manque de rigueur de la part du juge européen qui utiliserait avec opportunisme l’imprécision notionnelle à laquelle aboutit la confrontation des diverses définitions nationales. Mais, à bien y regarder, on peut penser qu’il s’agit plutôt d’une forme de transsystémie en action qui révèle le caractère métalinguistique7 des notions concernées. Les notions autonomes existent par-delà la définition que leur a donnée tel ou tel droit national. Dès lors, si leur signification réelle et profonde n’est rendue qu’imparfaitement par les diverses définitions nationales dont elles sont dotées, elle est cependant exprimée de façon plus nette grâce à la reconfiguration européenne dont elles font l’objet. Les notions autonomes incarnent ainsi tout à la fois une forme de dialogisme juridique (A) et un exemple de flexibilité juridique (B).

A. Les notions autonomes, forme de plurijuridisme dialogique

La genèse des notions autonomes révèle la manière dont elles fonctionnent. Le premier arrêt ayant évoqué le caractère autonome des termes de la Convention date de la fin des années soixante : c’est l’arrêt Neumeister contre Autriche du 27 juin 19688. Il fait référence à l’autonomie de la notion d’accusation contenue dans l’article 6 § 1 de la Convention en précisant qu’elle doit se comprendre « au sens de la Convention ». Puis au milieu des années soixante-dix, les arrêts Engel contre Pays-Bas9 et König contre Allemagne10 viennent asseoir cette méthode d’interprétation en offrant, à propos du droit à un procès équitable, deux des exemples les plus connus de notions autonomes.

Le premier arrêt de ces arrêts porte sur l’autonomie de la notion de « matière pénale ». Le droit à un procès équitable concerne notamment les accusations en matière pénale. Or, d’après l’arrêt Engel, la notion de matière pénale revêt en droit européen des droits de l’Homme une signification autonome. En l’occurrence, cette autonomie permet à la Cour de s’affranchir de la qualification donnée par le droit interne à des poursuites disciplinaires militaires et de les considérer comme relevant de la matière pénale au sens européen. Dans cette affaire, la démarche de la Cour consiste plus précisément à vérifier si une accusation à laquelle les Pays-Bas attribuent un caractère disciplinaire ne relèverait pas plutôt de la matière pénale au sens de l’article 611. Pour mettre en œuvre cette analyse, la Cour s’appuie sur trois critères. Tout d’abord, elle tient compte de la qualification par le droit interne de l’infraction concernée. Selon l’arrêt, « il importe d’abord de savoir si le ou les textes définissant l’infraction incriminée appartiennent, d’après la technique juridique de l’État défendeur, au droit pénal, au droit disciplinaire ou aux deux à la fois »12. D’après l’arrêt, cette indication constitue seulement un point de départ et n’a qu’une valeur formelle et relative. La Cour s’appuie ensuite sur la nature de l’infraction. Enfin, elle prend en compte la nature et la gravité de la peine encourue. L’arrêt Engel précise ainsi que « ressortissent à la “matière pénale” les privations de liberté susceptibles d’être infligées à titre répressif, hormis celles qui par leur nature, leur durée ou leurs modalités d’exécution ne sauraient causer un préjudice important »13.

Cet arrêt met en lumière le modus operandi des notions autonomes. Tout en s’appuyant sur la terminologie nationale, elles peuvent s’en détacher complètement. Dans ce cas, l’autonomie de la notion européenne, par une sorte d’effet ricochet, se répercute sur la qualification par la Cour d’une pratique nationale. Ainsi, dans l’affaire Engel, l’autonomie de la matière pénale permet de requalifier certaines poursuites disciplinaires militaires en poursuites pénales devant bénéficier des garanties du procès équitable. Frédéric Sudre estime que l’arrêt Engel a initié « un mouvement de “pénalisation” »14 consistant à faire tomber dans le champ de la matière pénale au sens de l’article 6 § 1 toutes sortes de sanctions nationales. Il en va ainsi de certaines sanctions disciplinaires pénitentiaires,15 mais également de sanctions administratives16. On constate donc que l’autonomie des notions permet d’instaurer une sorte de plurijuridisme dialogique. Après avoir pris en compte les définitions internes d’un terme, la Cour, dans une sorte de dialogue avec les droits nationaux, offre une signification autonome et renouvelée à la notion concernée. L’autonomie des termes de la Convention permet donc de tenir compte des diverses définitions nationales tout en le combinant et en s’en détachant afin de choisir une signification transversale susceptible d’être comprise par tous les justiciables des États membres du Conseil de l’Europe. Voici pourquoi, s’inspirant de Daniel Jutras qui évoque à propos de l’exemple canadien la possibilité d’un bijuridisme dialogique17, l’on peut parler à propos de la Cour européenne des droits de l’Homme d’un plurijuridisme dialogique.

Le second arrêt, König contre Allemagne, conforte le modus operandi dialogique de ce mode d’interprétation qu’est l’autonomie des notions. Il concerne plus spécifiquement l’autonomie de la notion de contestations sur des droits et obligations de caractère civil. Le droit à un procès équitable ne concerne pas seulement la matière pénale : il s’applique également aux contestations sur des droits et obligations de caractère civil. Or, dans son arrêt König, la Cour de Strasbourg dote cette notion d’une portée autonome18 : en réalité, elle désignerait « toute procédure dont l’issue est déterminante pour des droits et obligations de caractère privé »19. Auparavant, l’autonomie de cette notion avait été implicitement évoquée par l’affaire Ringeisen contre Autriche20. D’après ces affaires, il n’est donc pas nécessaire que les deux parties aux litiges soient des personnes privées, il importe seulement que la procédure soit décisive concernant un droit à caractère patrimonial21. Sont ainsi concernés le contentieux disciplinaire22, le contentieux social23 et même certains contentieux publics24. Ici encore, la Cour raisonne à partir du droit interne sans se sentir liée par lui.

B. Les notions autonomes, exemple de flexibilité juridique

Les notions autonomes témoignent assurément d’une grande habileté de la part de la Cour européenne qui arrive à concilier les différentes traditions juridiques des États membres du Conseil de l’Europe. Cette habileté se traduit par une forme spécifique de droit flou, grâce auquel la Cour déjoue à la fois les pièges d’une définition trop précise, mais aussi ceux de la traduction25. Mais, en général, c’est la texture normative du droit qui le rend souple. Or, en l’occurrence, c’est sa densité sémantique qui est flexible. La Cour joue sur la relative incertitude qui entoure les notions autonomes. Malléables, ces notions ne sont pas figées et peuvent s’adapter à toutes sortes de situations, permettant à la Cour d’exercer son appréciation in concreto. Elles offrent par conséquent un parfait exemple de flexibilité juridique.

L’autonomie de la notion de bien illustre parfaitement cette plasticité sémantique. L’article 1 du premier protocole additionnel à la Convention protège le droit au respect des biens. Sont avant tout visés les biens au sens le plus traditionnel du terme. Les biens corporels tels les immeubles sont donc des biens au sens de cette disposition. À titre d’exemple, les parcelles de terrain26 et les maisons d’habitation27 constituent des biens fonciers. Cela étant, dans le but d’étendre le champ d’application de cet article, la Cour de Strasbourg prône une vision extensive du terme de bien. Dans cet ordre d’idées, l’arrêt Gasus Dosier contre Pays-Bas du 23 février 1995 a souligné que « la notion de “biens” (…) a une portée autonome qui ne se limite certainement pas à la propriété de biens corporels : certains autres droits et intérêts constituant des actifs peuvent aussi passer pour des “droits de propriété” et donc pour des “biens” aux fins de cette disposition »28. Dès lors, la Cour admet que des créances, seraient-elles simplement fondées sur une espérance légitime, sont des biens au sens de l’article 1 du Protocole 129. Pour être le support d’un bien, une telle espérance légitime nécessite tout de même l’existence d’une « base suffisante en droit interne »30, laquelle peut être une jurisprudence bien établie31. En l’absence d’une telle base en droit national, la créance ne pourra pas être tenue pour une valeur patrimoniale, c’est-à-dire pour un bien au sens de l’article 1 du Protocole 1.

Selon la doctrine, l’autonomie de la notion de bien passe également par sa « socialisation »32. La prise en compte de problématiques sociales par le biais de la notion de bien découle entre autres des arrêts Gaygusuz contre Autriche du 16 septembre 199633 et Önerdyildiz contre Turquie du 30 novembre 200434. Dans la première de ces affaires, la Cour européenne a admis que le droit à l’allocation d’urgence constitue un droit patrimonial, i. e. un bien au sens de l’article 135. Dans la seconde, la Cour a étendu de façon considérable le champ d’application de cette disposition. En l’espèce, le requérant vivait dans un bidonville construit sur un dépôt d’ordures. Or, une explosion due à l’accumulation de méthane dans cette décharge entraîna la mort de neuf des proches du requérant. La Cour estime que, même s’il avait construit son habitation en toute illégalité sur un terrain dont il n’était pas propriétaire, le requérant bénéficiait malgré tout d’un intérêt patrimonial assez important pour constituer un intérêt substantiel, c’est-à-dire un bien au sens de l’article 1 du Protocole 1. Ces quelques exemples soulignent que l’autonomie du terme de bien rend cette notion extrêmement malléable et adaptable.

L’analyse du traitement par la Cour européenne de la notion de privation de liberté témoigne elle aussi de flexibilité que permet l’interprétation autonome. L’article 5 de la Convention européenne énonce le principe selon lequel « nul ne peut être privé de sa liberté » avant d’envisager une série d’exceptions. Partant, l’un des éléments essentiels à l’interprétation de cet article consiste à déterminer ce que recouvre une privation de liberté. Il n’est donc pas étonnant que la jurisprudence se soit penchée sur cette délicate question. D’après l’arrêt Storck contre Allemagne du 16 juin 2005, la privation de liberté repose sur un élément objectif, à savoir l’internement de la personne dans un espace restreint, pendant une période non négligeable, et sur un élément subjectif, c’est-à-dire l’absence de consentement de la personne concernée36. En outre, d’après l’arrêt H.L. contre Royaume-Uni du 5 octobre 2004, « pour savoir si l’on se trouve devant une privation de liberté, il faut partir de la situation concrète de l’intéressé et prendre en compte un ensemble de facteurs comme le genre, la durée, les effets et les modalités d’exécution de la mesure considérée »37. La Cour se livre à une analyse de ce type dans l’arrêt Stanev contre Bulgarie du 17 janvier 2012 s’agissant du placement forcé d’un homme dans un foyer psychiatrique38. Elle observe que le requérant pouvait certes quitter le foyer, mais seulement pour une durée limitée. Elle retient également que le foyer se trouvait dans une zone isolée et montagneuse, c’est‑à-dire difficile d’accès, et que l’administration retenait les papiers d’identité de M. Stanev. Elle en conclut que, même s’il a pu effectuer quelques déplacements, le requérant se trouvait en réalité soumis à un contrôle constant. La Cour prend également en compte « l’implication des autorités dans l’imposition et la mise en œuvre du placement du requérant »39, la durée du placement qui s’est prolongé pendant plus de huit ans et le fait que M. Stanev n’a pas été invité à exprimer son avis au sujet du placement et n’a jamais explicitement donné son accord à ce propos. L’arrêt Guzzardi du 6 novembre 1980 révèle que la distinction entre privation et restriction de liberté n’est que de degré ou d’intensité, non de nature ou d’essence40 et qu’elle doit s’opérer grâce à la situation concrète de l’intéressé, grâce à des critères comme le genre, la durée, les effets et les modalités d’exécution de la mesure considérée. Pareille appréciation in concreto engendre des solutions relativement contrastées et laisse à la Cour une marge de manœuvre importante. Ainsi, dans l’arrêt Witold Litwa contre Pologne41, la Cour a considéré que passer six heures et demie dans une unité de dégrisement est une privation de liberté. En revanche, dans l’arrêt Nielsen contre Danemark42, elle a estimé que le placement d’un enfant – ne souffrant pas de maladie mentale – dans un pavillon de psychiatrie infantile ne constituait pas une détention au sens de l’article 5 et que son hospitalisation devait être abordée comme tout autre cas de soins reçus par un enfant dans un hôpital à la demande de ses parents.

La Convention est prodigue en mots se prêtant à une interprétation autonome. Chacun d’entre eux se prêterait certainement à une analyse détaillée. À titre d’exemple, la Cour européenne admet l’autonomie de la notion de peine, raisonnement qui lui a notamment permis de soumettre la rétention de sûreté allemande au principe de légalité prévu à l’article 7 § 1 de la Convention43. Dans le même ordre d’idées, son analyse de la notion d’aliénation mentale qui figure à l’article 5 § 1 e) de la Convention est également autonome. Ainsi l’arrêt Winterwerp contre Pays-Bas énonce-t-il que le terme d’aliéné « ne se prête pas à une interprétation définitive » avant de préciser que « son sens ne cesse d’évoluer avec les progrès de la recherche psychiatrique, la souplesse croissante du traitement et les changements d’attitude de la communauté envers les maladies mentales, notamment dans la mesure où se répand une plus grande compréhension des problèmes des patients »44. Autre exemple, la notion de victime a également un sens spécifique dans la mesure où la victime peut être simplement potentielle, voire indirecte. Enfin, les termes de tribunal, d’arrestation, d’expulsion, d’association ou encore de contestation se prêtent aisément à une interprétation autonome.

En définitive, l’autonomie des notions traduit un effort dialogique de la Cour de Strasbourg, laquelle, en dotant certaines notions conventionnelles d’une signification européenne, tente de concilier les diverses définitions nationales et de maintenir une certaine flexibilité dans l’interprétation. Ces caractéristiques rapprochent assurément les notions autonomes de notions authentiquement transsystémiques et ouvrent la voie à une communication juridique interculturelle.

II. Les notions autonomes, des notions transsystemiques ?

Dans l’un de ces articles, Daniel Jutras pose la question suivante : le droit existe-t-il entre les traditions ?45 Si c’est le cas, si le droit existe entre les différentes traditions juridiques, s’il se crée dans les interstices de dialogue entre les cultures juridiques, alors il existe une normativité métatraditionnelle. Cet auteur évoque d’ailleurs « la législation et la jurisprudence transnationales » comme l’une des formes de cette normativité métatraditionnelle. Or, il est permis de penser que les notions autonomes utilisées par la Cour européenne des droits de l’Homme appartiennent précisément à cette normativité métatraditionnelle (A) et constituent, ce faisant, les premières bases d’un vocabulaire transsystémique (B).

A. Une normativité métatraditionnelle

La Cour européenne des droits de l’Homme parvient à donner aux notions autonomes un sens clair sans les définir précisément. Ce qui pourrait passer pour une indétermination terminologique est en fait un véritable tour de force. La Cour parvient en effet à composer avec les différentes traditions juridiques des États membres du Conseil de l’Europe pour proposer un sens générique à des notions dont la définition varie suivant les cultures juridiques.

Cette normativité métatraditionnelle peut dérouter. En effet, l’un des principaux objectifs de la Cour en rendant autonomes les termes conventionnels n’est autre que de préserver leur adaptabilité et leur plasticité. Partant, elle ne les enferme pas dans une définition trop précise qui empêcherait toute évolution ultérieure. Plutôt qu’une vraie définition, elle préfère dresser une liste de critères qui favorisent une certaine souplesse. Ainsi, s’agissant de la notion d’accusation, la Cour fait une proposition au conditionnel dans l’affaire Deweer. « L’“accusation”, note-t-elle, pourrait aux fins de l’article 6 § 1 (art. 6 ‑1) se définir comme la notification officielle, émanant de l’autorité compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale »46. Elle admet également qu’il faut prendre en compte à cet égard les répercussions sur la situation de la personne concernée47. De même, la notion de bien ne se prête pas réellement à une définition fermée48. L’impression dominante est celle de l’incontestable adresse et de la grande inventivité de la Cour européenne : elle parvient à trouver ce qu’il y a de transversal dans chaque notion, elle réussit à dégager des critères transnationaux compatibles avec les différentes représentations culturelles.

L’autonomie des termes de la Convention apparaît comme une méthode d’interprétation utilisée par la Cour de Strasbourg pour donner sa pleine mesure au texte conventionnel. Cette démarche conduit à doter les termes concernés d’un sens spécifique qui transcenderait les définitions élaborées par les droits nationaux, lesquels constituent une simple référence dans le raisonnement de la Cour. La Cour n’élabore pas une définition européenne des notions, elle trouve leur substrat sémantique. Celui du mot « loi » est, à titre d’exemple, assez éloigné de la définition française de ce terme et se rapproche de l’idée de norme ou de règle. La Cour l’a clairement expliqué dès l’affaire Sunday Times contre Royaume-Uni.

« La Cour constate que dans “prévue par la loi” le mot “loi” englobe à la fois le droit écrit et le droit non écrit. Elle n’attache donc pas ici d’importance au fait que le contempt of court est une création de la common law et non de la législation. On irait manifestement à l’encontre de l’intention des auteurs de la Convention si l’on disait qu’une restriction imposée en vertu de la common law n’est pas “prévue par la loi” au seul motif qu’elle ne ressort d’aucun texte législatif : on priverait un État de common law, partie à la Convention, de la protection de l’article 10 par. 2 (art. 10-2) et l’on frapperait à la base son système juridique »49.

L’interprétation de ce terme telle qu’elle est expliquée par la Cour reflète la manière dont se crée à l’échelle européenne la normativité métatraditionnelle que nous évoquions précédemment. La Cour tente d’unir autour de conceptions communes et revisitées des États ayant des cultures juridiques profondément différentes. Il s’agit de restructurer un espace juridique divisé par des cultures diverses. En admettant que le terme de loi corresponde à la foi au droit écrit et non écrit, la Cour vient fédérer la tradition civiliste et la tradition de Common Law autour de représentations communes de la norme, laquelle peut, dans ces deux systèmes, être d’origine jurisprudentielle ou législative.

L’autonomie des termes de la Convention révèle l’importance du langage en droit50. En interprétant de façon autonome quelques mots seulement, la Cour de Strasbourg réalise une partie de son œuvre unificatrice. Le droit européen des droits de l’homme se présente ce faisant comme le véhicule d’un vocabulaire transsystémique qui est peut-être le début d’une langue juridique commune et d’une forme d’universalisme juridique.

B. Un vocabulaire transsystémique

Grâce à l’interprétation autonome des termes conventionnels, la Cour de Strasbourg assoit son pouvoir et son indépendance. C’est là le premier avantage de cette méthode qui lui permet d’étendre le champ d’application des dispositions conventionnelles comme le montre, par exemple, le cas de la notion d’arrestation à laquelle se réfère l’article 5 § 2 de la Convention. Rappelons que, selon cette disposition, « toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ». Or, l’affaire Van der Leer51 a précisé que la notion d’arrestation contenue dans l’article 5 § 2 dépasse le cadre des mesures à caractère pénal. En l’espèce, cette interprétation autonome permet à la Cour d’appliquer les garanties offertes par cette disposition à une personne privée de liberté indépendamment d’une arrestation stricto sensu, c’est‑à-dire à une personne internée pour des troubles mentaux. La Cour écarte ainsi l’argument évoqué par le gouvernement défendeur en l’occurrence, argument selon lequel le paragraphe 2 de l’article 5 s’appliquerait seulement aux personnes tombant sous le coup d’une loi pénale. Autrement dit, grâce à l’autonomie des notions, « le juge européen renforce évidemment son indépendance et l’intensité du contrôle qu’il exerce sur les États-parties », note Thomas Acar52.

Mais, par-delà ce premier atout, les notions autonomes sont également un moyen de créer une harmonie entre des droits nationaux pourtant très différents. Sans cette méthode d’interprétation, la Cour serait dépendante des différentes législations internes. Dès lors, l’inévitable conséquence serait la suivante : en fonction de l’acception retenue par l’État défendeur de tel ou tel mot utilisé dans la Convention européenne, la solution de l’arrêt pourrait varier. À cet égard, il semble pertinent de revenir sur l’interprétation du terme de loi, terme qui figure dans de nombreuses dispositions de la Convention. Si ce terme était interprété restrictivement, il ne ferait référence qu’à une petite partie des règles juridiques, à savoir les règles législatives. Or, le rôle de la loi écrite varie suivant les États membres du Conseil de l’Europe qui n’appartiennent pas tous à la tradition civiliste. Dès lors, les précisions apportées par l’affaire Sunday Times précédemment citée étaient extrêmement bienvenues.

En résumé, l’interprétation autonome représente donc pour la Cour de Strasbourg un instrument indispensable qui lui permet tout à la fois d’étendre le champ des dispositions conventionnelles en les rendant plus effectives et de créer une certaine harmonie entre les droits nationaux. Obligée de composer avec des cultures juridiques différentes, il est crucial que la Cour puisse donner aux termes conventionnels une signification susceptible de valoir dans l’ensemble des États membres du Conseil de l’Europe. À cet égard, l’autonomie des termes de la Convention fait figure de compromis. Grâce à cette technique interprétative, la Cour européenne tente de concilier les différentes traditions nationales du Conseil de l’Europe. Il y a là en germe une sorte d’esperanto juridique, un langage juridique équitable dépassant les clivages nationaux, un langage propre aux droits de l’Homme et ayant vocation à s’universaliser. Pour le formuler plus juridiquement, on peut observer que les spécificités du langage de la Cour européenne, dont fait partie l’autonomie des termes conventionnels, participent à l’émergence d’un droit commun des droits de l’Homme. Pour prendre un exemple, l’interprétation autonome des termes de l’article 6 relatif au procès équitable peut très certainement être considérée comme contribuant à l’existence d’un droit processuel unifié ou, pour le dire autrement, d’un droit commun du procès. De ce point de vue, les termes autonomes apparaissent donc comme des termes transsystémiques, comme des termes qui dépassent les clivages entre différents systèmes juridiques. Autonomes, les notions s’universalisent et reflètent une normativité qui s’affranchit du cadre et des limites imposés par les cultures juridiques nationales.

Cette tentative de conciliation entre les diverses cultures juridiques du Conseil de l’Europe se retrouve d’ailleurs dans d’autres procédés utilisés par la Cour européenne. En effet, en dehors de l’interprétation des termes issus de la Convention, la Cour utilise des concepts et des techniques provenant des différents systèmes juridiques qui l’influencent. Ainsi Jean-Paul Costa constate-t-il que la Cour européenne ne se contente pas d’interpréter de manière autonome les termes de la Convention. Plus précisément, il observe que « la Cour, sous l’influence d’une tradition juridique particulière, introduit parmi ses propres critères des concepts qui n’apparaissent pas explicitement dans le texte de la Convention »53. S’agissant des articles 2 et 3 de la Convention qui concernent respectivement le respect du droit à la vie et l’interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants, la Cour utilise ainsi un standard probatoire issu du droit pénal anglo-saxon : celui de la preuve au-delà de tout doute raisonnable. Le juriste français, habitué à l’intime conviction, pourrait être surpris par cette utilisation. On pourrait citer d’autres exemples de techniques issues de droits nationaux comme l’effet horizontal qui provient de la Drittwirkung allemande ou encore l’espérance légitime, « voisine, mais distincte, rappelle J.‑P. Marguénaud, de la confiance légitime, de la croyance légitime ou de la reliance anglo-saxonne »54.

Pour conclure, on soulignera qu’en réalisant une sorte de fusion entre différentes cultures juridiques, l’interprétation autonome ouvre la voie à la transsystémie juridique et pourrait constituer une voie idéale pour l’enseignement transsytémique du droit. Parce qu’elles font le lien entre les différentes traditions juridiques, les notions autonomes pourraient être un outil utilisé par les enseignants pour aborder, à partir de l’œuvre unificatrice du droit européen des droits de l’homme, les différentes cultures juridiques sous‑jacentes. Commencer l’apprentissage du langage juridique55 par le biais de telles notions serait certainement le gage d’une grande ouverture l’esprit pour les apprentis juristes.

1 Sur l’enseignement transsytémique au Canada, voy. notamment : Pascal ANCEL, « Dénationaliser l’enseignement du droit civil ? Réflexions autour d’

2 Sur le bijuridisme et le bilinguisme au Canada, voy. notamment : Mathieu DEVINAT, « Le bijuridisme et le bilinguisme canadiens : des idéaux sous

3 Voy. entre autres :W. J. Ganshof VAN DER MEERSCH, « Le caractère autonome des termes et la “marge d’appréciation” des gouvernements dans l’

4 J.-P. MARGUENAUD, La Cour européenne des droits de l’Homme, 6ème éd., Connaissance du droit, Paris, Dalloz, 2012, p. 48.

5 CEDH, Airey contre Irlande, 9 novembre 1979, req. n° 6289/73, § 24.

6 E. KASTANAS, Unité et diversité : notions autonomes et marge d’appréciation des États dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits

7 Pour l’emploi de ce terme, voy. notamment : Daniel JUSTRAS, « Énoncer l’indicible : le droit entre langues et traditions », Revue internationale de

8 CEDH, Neumeister contre Autriche, 27 juin 1968, req. n° 1936/63, § 14.

9 CEDH, Engel et autres contre Pays-Bas, 8 juin 1976, req. n° 5100/71, 5101/71, 5102/71, 5354/72, 5370/72.

10 CEDH, König contre Allemagne, 28 juin 1978, req. n° 6232/73.

11 CEDH, Engel et autres contre Pays-Bas, préc., § 82.

12 Ibid.

13 Ibid.

14 Voy. Les grands arrêts de la Cour européenne des Droits de l’homme, F. Sudre et al., 7ème éd. mise à jour, Thémis, PUF, Paris, 2015, p. 47.

15 CEDH, Campbell et Fell c. Royaume-Uni, 28 juin 1984, req. n° 13590/88. Sur ce point, voy. notamment : Joëlle Pralus-Dupuy, « L’article 6 de la

16 CEDH, Oztürk contre Allemagne, 21 févr. 1984, req. n° 8544/79.

17 Daniel JUTRAS, loc. cit., pp. 785-786

18 CEDH, König contre Allemagne, préc., § 88 à 95.

19 Ibid., § 90.

20 CEDH, Ringeisen contre Autriche, 16 juillet 1971, req. n° 2614/65.

21 J. P. Marguénaud, op. cit., p. 132.

22 Par exemple, s’agissant des sanctions disciplinaires, comme la suspension et la radiation, décidées par des juridictions ordinales, voy. : CEDH

23 À propos de procédures relatives au licenciement d’un employé par une entreprise privée, voy. CEDH, Buccholz contre Allemagne, 6 mai 1981, req. n°

24 S’agissant par exemple des décisions administratives relatives à l’exercice du droit de propriété, voy. : CEDH, Oerlemans contre Pays-Bas, 27 

25 Sur cette question, voy. notamment : Jean-Claude Gémar, « Aux sources de la “jurilinguistique” : texte juridique, langues et cultures », Revue 

26 CEDH, Allan Jacobson contre Suède, 25 oct. 1989, req. n° 10842/84 ; CEDH, 28 juin 1990, Mats Jacobson contre Suède, req. n° 11309/84.

27 CEDH, James et autres contre Royaume-Uni, 21 février 1986, req. n° 8793/79.

28 CEDH, Gasus Dosier contre Pays-Bas, 23 février 1995, req. n° 15375/89, § 53.

29 CEDH, Pressos Compania Naviera SA contre Belgique, 20 novembre 1995, req. n° 17849/91, § 52.

30 CEDH, Kopecky contre Slovaquie, 28 septembre 2004, req. 44 912/98, § 52 et 53.

31 Ibid., § 52 ; CEDH, Maurice contre France, 6 octobre 2005, req. n° 11810/03, § 63 et 66 ; CEDH, Draon contre France, 6 octobre 2005, req. n° 1513/

32 J.-P. Marguénaud, « La CEDH et le droit de construire ou de démolir », RDI 2014 p.188.

33 CEDH, Gaygusuz contre Autriche, 16 septembre 1996, req. n° 17371/90. Sur cet arrêt, voy. notamment : F. Sudre, « La portée du droit à la non‑

34 CEDH, Öneryildiz contre Turquie, 30 novembre 2004, req. n° 48939/99.

35 CEDH, Gaygusuz contre Autriche, préc., § 41. Voy. également, CEDH, Stec contre Royaume-Uni, 12 avril 2006, req. n° 65731/01 et 65900/01.

36 CEDH, Storck contre Allemagne, 16 juin 2005, req. n° 61603/00, § 74.

37 CEDH, H. L. contre Royaume-Uni, 5 octobre 2004 ; req. n° 45508/99, § 89.

38 CEDH, Stanev contre Bulgarie, 17 janvier 2012, req. n° 36760/06.

39 Ibid., § 132.

40 Cour EDH, Guzzardi contre Italie, 6 novembre 1980, req. n° 7367/76, § 93.

41 CEDH, Witold Litwa contre Pologne, 4 avril 2000, req. n° 26629/95, § 46.

42 CEDH, Nielsen contre Danemark, 28 novembre 1988, req. n° 10929/84.

43 CEDH, M. c/ Allemagne, 17 déc. 2009, req. n° 19359/04, AJ pénal 2010. 129, note J. Leblois-Happe. Voy. également, D. Roets, « De la difficile

44 CEDH, Winterwerp contre Pays-Bas, 24 octobre 1979, req. n° 6301/73, § 37. Voy. également : CEDH, Rakevitch contre Russie, 28 octobre 2003, req. n°

45 Daniel JUTRAS, loc. cit., p. 793.

46 CEDH, Deweer contre Belgique, 27 février 1980, req. n° 6903/75, § 46.

47 Ibid.

48 Sur la définition du mot « bien », voy. notamment : C. QUEZEL-AMBRUNAZ, « L’acception européenne du “bien” en mal de définition », D. 2010, p. 

49 CEDH, 26 avril 1979, Sunday Times c/ Royaume-Uni, req. n° 6538/74 § 47.

50 Sur le langage du droit, voy. notamment : Le langage du droit, APD, t. 19, Sirey, 1974. Pour la position de l’auteur de la présente contribution

51 CEDH, Van der Leer contre Pays-Bas, 21 février 1990, req. n° 11509/85, § 25 à 31.

52 Thomas ACAR, « Appréhender l’imprécision linguistique des droits : approche linguistique », La Revue des droits de l’homme, 7/2015, [http://

53 J.-P. COSTA, « Concepts juridiques dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme : de l’influence de différentes traditions

54 J.-P. MARGUENAUD, op. cit.

55 Sur l’apprentissage du langage juridique, voy. : Jean-Louis SOURIOUX, « Pour l’apprentissage du langage du droit », RTD Civ. 1999, p. 343.

Notes

1 Sur l’enseignement transsytémique au Canada, voy. notamment : Pascal ANCEL, « Dénationaliser l’enseignement du droit civil ? Réflexions autour d’une expérience québécoise », RTD civ. 2011, p. 701 ; Julie BÉDARD, « Transsystemic Teaching of Law at McGill: “Radical Changes, Old and New Hats”», 27 Queen’s Law Journal, 2001, p. 237 ; Arnaud DE MESTRAL, « Bisystemic Law Teaching - The McGill Programme and The Concept of Law in the EU », Common Market Law Review 40, 2003, pp. 799–807; Roderick A. MACDONALD, « The National Law Programme at McGill: Origins, Establishment, Prospects », 13 Dalhousie Law Journal, 1990, p. 211.

2 Sur le bijuridisme et le bilinguisme au Canada, voy. notamment : Mathieu DEVINAT, « Le bijuridisme et le bilinguisme canadiens : des idéaux sous tension », Revue française de linguistique appliquée, vol.  XVI, n° 1, 2011, pp. 33-50.

3 Voy. entre autres : W. J. Ganshof VAN DER MEERSCH, « Le caractère autonome des termes et la “marge d’appréciation” des gouvernements dans l’interprétation de la Convention européenne des droits de l’homme », Protection des droits de l’homme : la dimension européenne, Mélanges en l’honneur de G. J. Wiarda, Carl Heymanns Verlag KG, Köln, Berlin, Bonn, München, 1988, p. 201 ; F. Ost, « Originalité des méthodes d’interprétation de la Cour européenne des droits de l’homme », M. Delmas-Marty (dir.), Raisonner la raison d’État, Paris, Presses universitaires de France, 1989, p. 401 ; F. SUDRE, « Le recours aux “notions autonomes” », F. SUDRE (dir.), L’interprétation de la Convention européenne des droits de l’homme, Bruylant, coll. Droit et justice, Bruxelles, 1998, p. 93.

4 J.-P. MARGUENAUD, La Cour européenne des droits de l’Homme, 6ème éd., Connaissance du droit, Paris, Dalloz, 2012, p. 48.

5 CEDH, Airey contre Irlande, 9 novembre 1979, req. n° 6289/73, § 24.

6 E. KASTANAS, Unité et diversité : notions autonomes et marge d’appréciation des États dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, Bruylant, Bruxelles, 1996, p. 16.

7 Pour l’emploi de ce terme, voy. notamment : Daniel JUSTRAS, « Énoncer l’indicible : le droit entre langues et traditions », Revue internationale de droit comparé, 2000, pp. 781-796. L’auteur explique que, « le bilinguisme juridique peut conduire à la reconnaissance d’une normativité métalinguistique, c’est-à-dire à l’idée que le droit, les idées juridiques, résident hors des textes et sont imparfaitement exprimés par ceux-ci » (p. 793).

8 CEDH, Neumeister contre Autriche, 27 juin 1968, req. n° 1936/63, § 14.

9 CEDH, Engel et autres contre Pays-Bas, 8 juin 1976, req. n° 5100/71, 5101/71, 5102/71, 5354/72, 5370/72.

10 CEDH, König contre Allemagne, 28 juin 1978, req. n° 6232/73.

11 CEDH, Engel et autres contre Pays-Bas, préc., § 82.

12 Ibid.

13 Ibid.

14 Voy. Les grands arrêts de la Cour européenne des Droits de l’homme, F. Sudre et al., 7ème éd. mise à jour, Thémis, PUF, Paris, 2015, p. 47.

15 CEDH, Campbell et Fell c. Royaume-Uni, 28 juin 1984, req. n° 13590/88. Sur ce point, voy. notamment : Joëlle Pralus-Dupuy, « L’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et les contentieux de la répression disciplinaire », RSC 1995, p. 723 ; Joëlle Pralus‑Dupuy, « L’applicabilité de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme aux contentieux disciplinaires : état des lieux », RFDA 2008, p. 317.

16 CEDH, Oztürk contre Allemagne, 21 févr. 1984, req. n° 8544/79.

17 Daniel JUTRAS, loc. cit., pp. 785-786

18 CEDH, König contre Allemagne, préc., § 88 à 95.

19 Ibid., § 90.

20 CEDH, Ringeisen contre Autriche, 16 juillet 1971, req. n° 2614/65.

21 J. P. Marguénaud, op. cit., p. 132.

22 Par exemple, s’agissant des sanctions disciplinaires, comme la suspension et la radiation, décidées par des juridictions ordinales, voy. : CEDH, Le Compte, Van Leuven et de Meyere contre Belgique, 23 juin 1981, req. n° 6878/75, 7238/75 ; CEDH, Albert et Le Compte contre Belgique, 10 février 1983, req. n° 7299/75, 7496/76.

23 À propos de procédures relatives au licenciement d’un employé par une entreprise privée, voy. CEDH, Buccholz contre Allemagne, 6 mai 1981, req. n° 7759/77. À propos de procédures concernant des prestations d’assurance sociale, voy. : CEDH, Feldbrugge contre Pays-Bas, 29 mai 1986, req. n° 8562/79.

24 S’agissant par exemple des décisions administratives relatives à l’exercice du droit de propriété, voy. : CEDH, Oerlemans contre Pays-Bas, 27 novembre 1991, req. n° 12565/86 ; CEDH, Geouffre de la Pradelle contre France, 16 décembre 1992, req. n° 12964/87 ; CEDH, Zander contre Suède, 25 novembre 1993, req. n° 14282/88.

25 Sur cette question, voy. notamment : Jean-Claude Gémar, « Aux sources de la “jurilinguistique” : texte juridique, langues et cultures », Revue française de linguistique appliquée, 2011/1 (Vol. XVI), pp. 9-16.

26 CEDH, Allan Jacobson contre Suède, 25 oct. 1989, req. n° 10842/84 ; CEDH, 28 juin 1990, Mats Jacobson contre Suède, req. n° 11309/84.

27 CEDH, James et autres contre Royaume-Uni, 21 février 1986, req. n° 8793/79.

28 CEDH, Gasus Dosier contre Pays-Bas, 23 février 1995, req. n° 15375/89, § 53.

29 CEDH, Pressos Compania Naviera SA contre Belgique, 20 novembre 1995, req. n° 17849/91, § 52.

30 CEDH, Kopecky contre Slovaquie, 28 septembre 2004, req. 44 912/98, § 52 et 53.

31 Ibid., § 52 ; CEDH, Maurice contre France, 6 octobre 2005, req. n° 11810/03, § 63 et 66 ; CEDH, Draon contre France, 6 octobre 2005, req. n° 1513/03, § 65 et 68 ; CEDH, Flores Cardoso contre Portugal, 29 mai 2012, req. n° 2489/09, § 52 et 57.

32 J.-P. Marguénaud, « La CEDH et le droit de construire ou de démolir », RDI 2014 p.188.

33 CEDH, Gaygusuz contre Autriche, 16 septembre 1996, req. n° 17371/90. Sur cet arrêt, voy. notamment : F. Sudre, « La portée du droit à la non‑discrimination. De l’avis d’Assemblée du Conseil d’État du 15 avril 1996, Mme Doukouré, à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 16 septembre 1996, Gaygusuz c/ Autriche », RFDA 1997, p. 965.

34 CEDH, Öneryildiz contre Turquie, 30 novembre 2004, req. n° 48939/99.

35 CEDH, Gaygusuz contre Autriche, préc., § 41. Voy. également, CEDH, Stec contre Royaume-Uni, 12 avril 2006, req. n° 65731/01 et 65900/01.

36 CEDH, Storck contre Allemagne, 16 juin 2005, req. n° 61603/00, § 74.

37 CEDH, H. L. contre Royaume-Uni, 5 octobre 2004 ; req. n° 45508/99, § 89.

38 CEDH, Stanev contre Bulgarie, 17 janvier 2012, req. n° 36760/06.

39 Ibid., § 132.

40 Cour EDH, Guzzardi contre Italie, 6 novembre 1980, req. n° 7367/76, § 93.

41 CEDH, Witold Litwa contre Pologne, 4 avril 2000, req. n° 26629/95, § 46.

42 CEDH, Nielsen contre Danemark, 28 novembre 1988, req. n° 10929/84.

43 CEDH, M. c/ Allemagne, 17 déc. 2009, req. n° 19359/04, AJ pénal 2010. 129, note J. Leblois-Happe. Voy. également, D. Roets, « De la difficile articulation entre privation de liberté de sûreté et droit à la liberté et à la… sûreté », RSC 2010, p. 228.

44 CEDH, Winterwerp contre Pays-Bas, 24 octobre 1979, req. n° 6301/73, § 37. Voy. également : CEDH, Rakevitch contre Russie, 28 octobre 2003, req. n° 58973/00, § 26 ; CEDH, Glien contre Allemagne, 28 novembre 2013, req. n° 7345/12, § 72.

45 Daniel JUTRAS, loc. cit., p. 793.

46 CEDH, Deweer contre Belgique, 27 février 1980, req. n° 6903/75, § 46.

47 Ibid.

48 Sur la définition du mot « bien », voy. notamment : C. QUEZEL-AMBRUNAZ, « L’acception européenne du “bien” en mal de définition », D. 2010, p. 2024.

49 CEDH, 26 avril 1979, Sunday Times c/ Royaume-Uni, req. n° 6538/74 § 47.

50 Sur le langage du droit, voy. notamment : Le langage du droit, APD, t. 19, Sirey, 1974. Pour la position de l’auteur de la présente contribution sur le sujet, voy. : A.-B. CAIRE, « La magie du verbe juridique. Réflexions sur la force du langage du droit », RTD civ. 2017, pp. 321 sq.

51 CEDH, Van der Leer contre Pays-Bas, 21 février 1990, req. n° 11509/85, § 25 à 31.

52 Thomas ACAR, « Appréhender l’imprécision linguistique des droits : approche linguistique », La Revue des droits de l’homme, 7/2015, [http://journals.openedition.org/revdh/1341], (2018-01-25).

53 J.-P. COSTA, « Concepts juridiques dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme : de l’influence de différentes traditions nationales », RTDH 2004, p. 101, spéc. p. 103.

54 J.-P. MARGUENAUD, op. cit.

55 Sur l’apprentissage du langage juridique, voy. : Jean-Louis SOURIOUX, « Pour l’apprentissage du langage du droit », RTD Civ. 1999, p. 343.

Citer cet article

Référence électronique

Anne-Blandine CAIRE, « Des notions autonomes du droit de la Convention européenne des droits de l’homme à la transsystémie », La Revue du Centre Michel de L'Hospital [En ligne], 17 | 2019, mis en ligne le 03 novembre 2021, consulté le 19 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/revue-cmh/index.php?id=309

Auteur

Anne-Blandine CAIRE

Professeur de droit privé et de sciences criminelles, Université Clermont Auvergne, Centre Michel de l’Hospital EA 4232, F-63000 Clermont-Ferrand France

Articles du même auteur

Droits d'auteur

Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)