Damome Étienne (2014), Radios et religions en Afrique subsaharienne : dynamisme, concurrence, action sociale, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, avril 2014, 319 p. – ISBN 978-2-86781-732-5

Texte

Comment les institutions religieuses utilisent les médias ? Étienne Damome tente de répondre à cette question à partir d’une étude empirique sur la radio subsaharienne depuis les années 1990. Il s’agit d’une étude sur quatre pays de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Ghana et Togo) élargie à d’autres exemples de l’Afrique Centrale et de l’Afrique de l’Est. L’auteur analyse le paysage radiophonique religieux de chaque pays selon cinq points de vue différents : identité, aspects juridiques, ressources, programmation et publics.

En constatant le rôle important de l’Islam dans le développement de la radio confessionnelle ainsi que l’utilisation de la radio comme outil de propagande à l’époque de la montée de la confession musulmane, l’auteur procède à une analyse détaillée du mode de fonctionnement et des stratégies des radios religieuses ainsi que des types d’auditoire. Il contextualise son étude en mettant en lien ces éléments d’analyse avec la situation religieuse et les caractéristiques de la communication confessionnelle en Afrique.

Le rôle multiple des radios confessionnelles constitue un premier constat de cette étude. Loin d’être utilisées comme un simple moyen de prosélytisme, ces radios participent au développement socio-économique et culturel des populations avec des émissions sur l’agriculture, le commerce, l’art et l’éducation scolaire.

Cette multiplicité de missions est en lien avec la grande diversité des profils de l’auditoire, selon l’auteur : en évitant de s’appuyer sur des profils types pour créer des formats uniques, les concepteurs des radios religieuses s’adressent à des publics hétérogènes par rapport à leur condition socio-économique ou matrimoniale, leur emploi ou leur niveau culturel. Pour Étienne Damome, ces radios se veulent « évangélistes » dans le sens de « l’intentionnalité d’une communication » (p. 228) qui cherche l’ouverture à tout public, tout individu social.

En plus, selon l’auteur, l’interaction augmentée par rapport à d’autres stations radiophoniques entre l’émetteur et le public favorise un dialogue qui dépasse la sphère confessionnelle pour faire resurgir des débats sociopolitiques dans des pays où la voix de la société civile se heurte sur la puissance absolue d’un État hégémonique.

Pour l’auteur, les médias comme le religieux créent du lien social. En même temps, les radios confessionnelles en Afrique reflètent la fragmentation sociale, le pluralisme religieux et la multiplicité linguistique. L’utilisation des langues locales, l’improvisation et l’interaction accrue avec le public favorisent la prise de parole publique démocratique.

Cette étude panoptique de la radiophonie religieuse en Afrique suscite plusieurs questionnements, quant au rôle de la radio dans la construction de l’opinion publique ainsi que sur les rapports de ce média avec d’autres types de médias (télévision, Internet…) dans le contexte actuel. Il s’agit d’une analyse macroscopique qui peut donner lieu à des enquêtes de réception de nature qualitative pour examiner quel est l’usage que les populations font de la radio dans leur quotidien et comment cet objet médiatique est traité dans leurs discussions et dans leurs débats.

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Pergia GKOUSKOU-GIANNAKOU, « Damome Étienne (2014), Radios et religions en Afrique subsaharienne : dynamisme, concurrence, action sociale, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, avril 2014, 319 p. – ISBN 978-2-86781-732-5 », K@iros [En ligne], 2 | 2017, mis en ligne le 16 avril 2020, consulté le 19 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/kairos/index.php?id=328

Auteur

Pergia GKOUSKOU-GIANNAKOU

Maître de conférences en Sciences de l'information et de la communication, UBP

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