Les invalides dans la littérature juridique, autour des représentations de la dette patriotique

The invalids in the legal literature, around the representations of patriotic debt

DOI : 10.52497/sociopoetiques.1307

Résumés

Résumé : La fonction de la poésie est d’exprimer ce qui ne peut pas être appréhendé sans l’épaisseur du vécu, pour révéler, dénoncer ou célébrer. Elle humanise ainsi les taxinomies ou les classifications trop bureaucratiques de la médecine légale et des normes. La poésie du droit permet une humanité langagière où le handicap ou la dépendance sont l’autre de nous-mêmes. L’idée de la reconnaissance de la fragilité et de l’altérité, de la compensation ne fut aucunement de l’ordre des évidences pour les blessés et les invalides de guerre. L’asile des invalides fut un lieu de discipline toute militaire avant que de devenir un lieu d’accueil et de soins. La pension fut une récompense sans valeur autre que militaire avant que d’avoir une valeur économique. En effet, la poésie du droit a opposé le parti de la dette du sang et de la dette patriotique à celle de la dette de la nation et de la dette sacrée de protection pour les gardiens de la Cité. C’est de cette dette sacrée dont la nation est débitrice qu’il s’agit dans cet article. De cette dette qu’il est impossible de liquider sans un supplément de soin et d’humanité, car elle est irrémédiablement plus qu’une créance.

Abstract: The function of poetry is to express what cannot be apprehended without the thickness of the lived, to reveal, denounce or celebrate. It thus humanizes the overly bureaucratic taxonomies or classifications of forensic medicine and standards. The poetry of law allows a linguistic humanity where disability or dependence is the other of ourselves. The idea of the recognition of fragility and otherness; of the right to compensation was in no way the order of evidence for the wounded and disabled of war. The asylum for the disabled was a place of military discipline before becoming a place of reception and care. The pension was a reward of no value other than military before it had any economic value. Indeed, the poetry of law has pitted the party of the debt of blood and patriotic debt against that of the debt of the nation and the sacred debt of protection for the guardians of the City. It is this sacred debt that the nation owes that has to be put into perspective in this article. Of this debt which it is impossible to liquidate without extra care and humanity because it is irretrievably more than a debt.

Index

Mots-clés

Don, dette, créance, compensation, asile, aptitude, droit, récompense, reconnaissance

Keywords

Gift, debt, claim, compensation, asylum, ability, right, reward, recognition

Plan

Texte

« Jamais, à son sujet, un roi n’est redevable ».
Corneille, Le Cid, acte II, 1637.

La poésie et le droit ne se pensent que trop rarement ensemble2. Tout ordre disciplinaire est trop souvent un ordre clos sur lui-même. Ses représentations, ses interprétations invitent toutefois à ce que soient appréhendées les situations vécues qu’il qualifie et dont il se fait juge. Le droit a pour projet de rendre à chacun le sien par la parole. Il met en présence une mosaïque de voix, celle du tribun, celle de l’avocat, celle du magistrat, celle du citoyen et celle du justiciable. On le veut pouvoir être un facteur de justice et de paix sociale sans que les intérêts individuels ou les esprits de parti gagnent dans les débats politiques par leurs excès. On le veut pouvoir être un vecteur de justice et de paix pour les parties au procès dans un au-delà de leurs conflits. La mise en scène fait de tout tribunal un théâtre où chacun a son rôle. Lors des débats politiques avant que les législateurs ne votent ; lors des débats contentieux avant que les juges ne tranchent dans leurs décisions ; tous sont sensibles à l’art de l’éloquence ou à celui de la plaidoirie maîtrisée.

Les juristes peuvent être poétiques et certains se rêvent poètes. Le Code civil fut mis en vers pour mieux expliquer les notions de l’incapable ou de l’impuissant. Tout impétrant connaît la règle de « l’admirable » texte, qui a pu être apprise en récitant :

De l’administration du tuteur.

Le tuteur, au mineur, prodigue tous ses soins,
Protège sa faiblesse et veille à ses besoins ;
Dans les actes civils, lui seul le représente.
En père de famille en personne prudente,
Il doit régir ses biens ; et si sa gestion
est, avec son devoir, en contradiction,
Des dommages causés, il devient responsable.
Des biens de son mineur, la loi rend incapable
Le tuteur de pouvoir faire acquisition ;
Il ne peut accepter aucune cession3.

Le mari qui se dit par nature impuissant
Ne peut pour ce motif, désavouer l’enfant.
Le désaveu ne peut se faire
Même pour cause d’adultère,
À moins qu’on n’ait su lui cacher
Du susdit enfant la naissance ;
Et dans une telle occurrence,
On doit l’admettre à proposer
Tous les faits qu’il croit, dans l’affaire,
Capable de justifier
Qu’il n’en est pas le véritable père4.

La poésie du droit peut n’être parfois que rhétorique. Celle-ci veut et peut convaincre par le seul langage. Le rhéteur, bien qu’il soit un maître dans l’art d’écrire ou une personne qui parle bien, n’est parfois que sophiste ou dogmatique. Or, l’argumentation judiciaire moderne loin du mensonge, des effets de manches, de la disqualification de l’adversaire, répond à une déontologie fondée sur les principes et les valeurs des droits de l’homme et de la raison5.

Le droit peut être poétique. L’engagement poétique est alors éthique :

Le progrès a servi à dégager la science du juste. Mais un progrès nouveau pourra rendre au droit sa vraie place dans la vie. Au lieu d’être isolé des autres éléments sociaux, il devra être remis en étroite connexité avec eux. Vous entendez de quels éléments je parle : les éléments concrets d’abord, puis ceux qui se définissent d’un mot, le sentiment de droiture, sentiment de solidarité ou de fraternité entre les hommes, sentiment de douceur et de support mutuel, sentiment du beau sous toutes ses formes6.

Le droit n’est rien sans que les sentiments de justice et de justesse ne l’animent au profit de l’humanité handicapée. L’exigence du droit toujours présente a une fonction symbolique. Elle rappelle inlassablement quelque chose d’absent ou d’impossible à toujours percevoir : la nécessité d’une fraternité agissante.

Victor Hugo l’universel exprime cette conviction dans toute son œuvre en mettant en évidence la tension du Droit contre la loi, Pro Jure contra legem. C’est dans le recueil d’Actes et paroles qu’il en synthétise les enjeux :

Le droit et la loi, telles sont les deux forces ; de leur accord naît l’ordre, de leur antagonisme naissent les catastrophes. Le droit parle et commande du sommet des vérités, la loi réplique du fond des réalités ; le droit se meut dans le juste, la loi se meut dans l’impossible ; le droit est divin, la loi est terrestre. Ainsi, la liberté, c’est le droit, la société, c’est la loi. De là deux tribunes ; l’une où sont les hommes de l’idée, l’autre où sont les hommes du fait ; l’une qui est l’absolu, l’autre qui est le relatif. De ces deux tribunes, la première est nécessaire, la seconde est utile. De l’une à l’autre, il y a la fluctuation des consciences7.

L’office de l’administration hospitalière ou de la bienfaisance publique, l’office du juge au regard des invalides et/ou des infirmes ; l’office de tout médecin légiste qu’il soit civil ou militaire, soulignent la tension que le poète révèle aux consciences aveugles :

Il est effrayant de penser que cette chose qu’on a en soi, le jugement, n’est pas la justice. Le jugement c’est le relatif. La justice, c’est l’absolu. Réfléchissez à la différence entre un juge et un juste8.

Avec lui il faut croire en l’horizon du Droit pour éclairer les chemins du législateur, de l’administrateur, du médecin légiste et du juge :

Le droit est au-dessus de tous ; nul vent contraire
Ne le renverse ; et tous ne peuvent rien distraire
Ni rien aliéner de l’avenir commun
Dans les chutes du droit rien n’est désespéré9.

La tension entre le Droit et la Loi est une question non d’interprétation, mais de sublimation. Entre la sémiotique et la sémantique, la compréhension et l’explication ne vont pas sans observation, appréhension et sollicitude. La sémantique juridique (le mot, la locution ou la phrase) intéresse la signification et l’expression d’un mot ou d’une structure linguistique. Au cœur de la sémantique juridique est la démarche de qualification puis du rattachement d’une notion à un régime juridique. Elle dit un passage entre le monde sensible et le monde du droit. La sémiotique juridique (le signe, le signifiant, le signifié) s’attache aux études des pratiques, des comportements et des phénomènes culturels conçus comme des systèmes signifiants. La représentation sociale dialogue alors avec l’épaisseur de son humanité et de l’humaine condition. La poésie relie l’usager de la langue instituée qui se veut conceptualisée avec la vitalité symbolique du langage au-delà du traduisible.

Le droit n’est pas le droit seulement d’ici-bas ;
Les morts sont des vivants mêlés dans nos combats10.

C’est dans l’histoire de la littérature juridique qu’il nous sera possible de dessiner à grands traits les maux des invalides constitués par la dette et la distinction avant que les grands invalides ne soient reconnus comme tels. En effet, la poésie du droit s’exprime en la notion de dette patriotique. Celle-ci donne à lire plusieurs représentations sociales autour de ses deux acceptions principales qui irriguent de multiples expressions. La première est celle de dette du sang, des sujets obligés à des devoirs militaires (sous l’Ancien Régime) à une obligation de tout citoyen dans une armée de conscription, pro patria mori (dans la République). Le sacrifice « d’une partie de soi » est considéré comme étant moindre que le « sacrifice ultime » et comme répondant à une « exigence » « morale » et « civique ». Le créancier en est la monarchie et/ou la République, les débiteurs, les sujets ou les citoyens. Il s’agit de la dette « sacrée » que chacun doit à la patrie. La seconde est symbolique ou économique. C’est aussi une dette « sacrée », mais celle-ci est contractée tout entière par la nation envers les hommes morts pour la France, les pupilles et leurs familles11. Pour ceux qui ont contracté des infirmités pendant les guerres, cette dette fut symbolique et distinctive comme étant le témoignage d’une reconnaissance ou d’une gratification militaire. Elle s’est métamorphosée en une exigence de juste protection et de réparation intégrale. Aux maux de l’institution, des invalides (I) répondent ceux de la reconnaissance des invalides (II) et de la condamnation de certains d’entre eux (III).

Les maux de l’institution des Invalides : la tension entre la dette et les pensionnaires

Les Invalides, c’est une royale institution qui devint républicaine. Son objet social selon les intentions de son fondateur est « de tirer de la misère et de la mendicité les pauvres officiers et soldats de nos troupes, qui ayant vieilli dans le service, ou qui dans les guerres passées ayant été estropiés, étaient non seulement hors d’état de continuer à nous en rendre, mais aussi de ne rien faire pour pouvoir vivre et subsister ; et qu’il était bien raisonnable que ceux qui ont exposé librement leur vie, et prodigué leur sang pour la défense et le soutien de cette monarchie […] jouissent du repos qu’ils ont assuré à nos autres sujets et passent le reste de leurs jours en tranquillité12 ». Un des plus beaux et terribles témoignages de l’utilité des Invalides est celui de Montesquieu :

C’est le lieu le plus respectable de la terre. Quel spectacle de voir rassemblées dans un même lieu toutes ces victimes de la patrie, qui ne respirent que pour la défendre, et qui, se sentant le même cœur et non pas la même force, ne se plaignent que de l’impuissance où elles sont de se sacrifier encore pour elle ! Quoi de plus admirable que de voir ces guerriers débiles, dans cette retraite, observer une discipline aussi exacte que s’ils y étaient contraints par la présence de l’ennemi, chercher leur dernière satisfaction dans cette image de la guerre, et partager leur cœur et leur esprit entre les devoirs de la religion et ceux de l’art militaire13.

Une lecture plus attentive des monuments politiques et juridiques laisse à penser que l’établissement des Invalides et ses compagnies détachées de l’Ancien Régime ont trois autres fonctions sociales.

La première est que ces hommes sachant manipuler des armes ne deviennent ni des mendiants ni des vagabonds pour des raisons d’ordre public afin qu’ils ne forment pas des associations de malfaiteurs. Rappelons la considération sociale des corps de mercenaires (ancien régime), de partisans (1815) et de francs-tireurs (1870). Ils servent l’autorité publique autant qu’elle les craint. Sur le champ de bataille, ils furent même des exilés des coutumes de la guerre et, blessés ou estropiés, ils étaient abandonnés s’ils venaient à tomber dans les mains des ennemis comme gens sans aveu, c’est-à-dire sans droit et sans protection. Après la guerre, l’autorité militaire et les pouvoirs publics prirent des mesures d’une rigueur extrême, contre les coupeurs de bourses, les tireurs de lame, les militaires sans paie et les passe-volants. Pour les militaires de profession, elle rappelle partout que ces invalides ou ces caducs, eux, doivent être dignes de leurs uniformes et de leur état militaire. Ainsi, il est fait strictement défense d’être saoul, de rencontrer des « filles de joie » ou de mendier.

Tout invalide ou soldat pensionné, qui pourrait oublier son état au point d’être surpris en mendiant et sans certificat, sera arrêté par la maréchaussée & constitué dans les prisons du lieu, où il sera nourri du pain de Sa Majesté14.

De même :

Il ne saura point souffert aux environs de l’hôtel aucuns pauvres demandant l’aumône, soit, hommes, soit, femmes ou enfants, à cause des conséquences, du mauvais commerce, et des désordres qui en peuvent arriver ; c’est pourquoi il est expressément ordonné au Prévôt de cet Hôtel, de tenir la main à ce que ses archers les fassent retirer au-delà de la barrière en dedans de la ville, de manière qu’il n’en soit plus vu demander l’aumône devant ni aux environs de cet hôtel15.

L’on sait que déjà, les mendiants, les vagabonds16, sont censés troubler la paix publique et qu’ils sont « un danger » pour l’ordre public. L’on sait que le régime juridique des mendiants distingue les valides des invalides, les occasionnels des professionnels, le bon pauvre, du mauvais pauvre17. Mais, là encore, n’est pas invalide qui veut et celui qui l’allègue doit l’être. Les mendiants qui feindront des plaies ou des infirmités risquent au titre de l’article 276 du Code pénal un emprisonnement de six mois à deux ans18. La doctrine la plus autorisée est ici catégorique :

Les soldats estropiés et caducs, comme on disait, couraient les grands chemins en mendiant, détroussaient les voyageurs, terrorisaient les bourgs et les villages ; dans les villes, la nuit, au coin des rues assassinaient les bourgeois, on pense à leur donner de quoi vivre pour se débarrasser d’eux19.

La deuxième, l’institution des Invalides dans sa magnificence, a aussi pour objet de retirer de la vue du peuple ceux qui ont souffert de la guerre dans un cadre qui demeure militaire et dans une demeure toute militaire. L’invalide ou le caduc ne cessent d’appartenir à l’armée. La discipline militaire à l’intérieur de l’Hôtel est conforme à celle du service des Places. Les peines furent parfois d’une extrême rigueur et arbitraires sous couvert de discipline et d’ordre. L’enfermement dans les loges de l’Hôtel fut en usage avant que d’être supprimé au profit des arrêts et de la prison en un texte qui aurait pu – d’ailleurs – inspirer les législations civiles de Bicêtre20. Les pensionnaires ne peuvent découcher sans autorisation21. Ils ne purent initialement se marier qu’avec la permission et l’autorisation du gouverneur et du curé, qui étaient seuls juges des empêchements de l’invalide et qui s’informaient de la personnalité de sa « partenaire » à ce sujet22. Il leur fut ensuite fait absolument défense de se marier au risque d’être chassés de l’établissement et de ne plus pouvoir y rentrer avant que le régime juridique de tolérance ne soit rétabli23. Il faut sur cette question lire le rapport au Roi du 11 février 1818 qui fut annexé à l’arrêté de Napoléon du 27 prairial an VIII qui subordonne le mariage des militaires invalides à l’autorisation du ministre de la Guerre, sous peine de renvoi de l’Hôtel, mais, cette fois, avec le maintien de la « pension accordée par la loi aux défenseurs de la patrie24 » :

En 1793, les invalides profitant des troubles civils se marièrent sans autorisation. Par un juste retour à l’ordre et pour empêcher des mariages scandaleux […] on exige de la part des femmes que les invalides se proposent d’épouser, un certificat de bonne conduite, qu’elles doivent se procurer auprès du commissaire de police du lieu de leur domicile, et un du maire constatant que, par leur position ou leur fortune, elles pourront vivre sans être à la charge de leur mari. Comme ce dernier certificat a presque toujours été délivré sur des déclarations de témoins, données par complaisance, il est arrivé que les femmes d’invalides se sont trouvées n’avoir d’autre ressource que le produit d’un travail peu lucratif, souvent incertain, et par conséquent insuffisant à leur subsistance et à celle des enfants provenant de leur union : ce qui les expose à la misère. Un autre inconvénient plus grave, parce qu’il intéresse l’ordre public, est ce grand nombre de femmes d’invalides qu’on voit chaque jour à l’hôtel, et dont les communications avec les militaires de cet établissement sont préjudiciables à la discipline et aux bonnes mœurs25.

La troisième a pour vocation d’assurer que tout engagement militaire admet une protection qui favorise le recrutement, l’émulation pour le métier des armes et le maintien du moral des troupes.

[La France] s’est établie la servante empressée du soldat qui, par l’âge ou par les accidents de la guerre, a perdu, à son service, ses moyens d’existence. Elle ne lui a pas jeté, à ce soldat, l’aumône de Bélisaire. Elle l’a mis sous son aile à l’abri de sa gloire ; elle ne lui a pas élevé un hospice, un refuge, où l’on entre par nécessité et par rougeur au front ; elle lui a consacré, dans le plus bel emplacement de sa capitale, une vaste retraite, toute pleine de glorieux souvenirs, tranquille, paisible, où l’on est fier d’être admis, où toutes les infirmités sont surveillées et soignées, par devoir, par dévouement26.

L’ordonnance de Louis XIV est sur ce point des plus claires et des plus intelligibles :

Considérant aussi que rien n’est plus capable de détourner ceux qui auraient la volonté de porter les armes, d’embrasser cette profession, que de voir la méchante condition où se trouveraient réduits la plupart de ceux qui s’y étant engagés, et n’ayant pas de bien, y auraient vieilli ou été estropiés, si l’on avait soin de leur subsistance et entretènement […] nous avons la résolution d’y pourvoir27.

L’hôtel des Invalides est ici le complément de La santé de mars28, s’articulant autour des hôpitaux militaires, de la création du service de santé des armées et du Val-de-Grâce. Toutefois, les plus invalides même verront leurs droits contestés en un contingentement budgétaire, comptable et gestionnaire : ils « coûtent trop cher ». Seuls les princes de l’hôtel lui demeureront attachés. Il s’agit des manicros et des Moines lays.

[Ce] sont des hommes qui, ayant eu le malheur de perdre l’usage de leurs membres ont besoin d’être aidés et servis, et il faut payer ceux qui sont en état de les aider ; la gratification des Manicros est fondée sur ce motif intéressant. La table des Soldats appelés Moines-lays, a été établie pour ceux qui, par des coups de feu qui leur ont brisé les mâchoires, ou qui n’ont plus de dents dans la bouche, ne peuvent broyer des aliments ordinaires ; leur cuisine est faite par les Sœurs de la Charité, et ils sont servis par elles […] ces Tables sont les plus dispendieuses à l’Hôtel29.

Il en est de même pour les infirmes civils. Aux hôpitaux et aux hospices, « les grands infirmes et les vieillards hors d’état de se servir eux-mêmes30 ».

Les paralytiques incurables et absolument hors d’état de se servir eux-mêmes sont déposés à l’hôpital de la pitié dans une salle qui leur est destinée31.

Pour être admis ou être placé dans des hospices d’indigents, « les infirmités devront être assez graves pour mettre le sujet qui en sera affecté dans l’impossibilité absolue de travailler, et il en sera fait mention expresse dans le certificat des officiers de santé du bureau central d’admission32 » de Bicêtre et de la Salpêtrière. Il n’exista qu’une aptitude au secours et à la charité ou bienfaisance publiques pour les infirmes ou les invalides. Les infirmes purent ensuite revendiquer des droits à l’assistance obligatoire dont ils furent qualifiés de titulaires du fait de leur état et de leur indigence. L’indigent n’est pas le nécessiteux, les premiers nécessitent une assistance permanente du fait de leur état ; les seconds ont besoin d’une assistance temporaire ou accidentelle. L’hôpital33 n’est pas l’hospice34, le malade n’est pas l’infirme. Pour que l’octroi de secours puis des droits à l’assistance puissent être ouverts, leur indigence doit être attestée autant que leur état qui ne doit pas être susceptible d’amélioration moyennant des soins appropriés35. C’est la « stricte nécessité » qui va inspirer l’admission ou le placement des « indigents les plus infirmes » à l’hospice « le plus voisin » et de l’invalide « qui n’aurait d’ailleurs aucun moyen de subsister36 » aux Invalides.

Les excès du régime militaire et les abus de ceux qui furent des gestionnaires tout à leur profit ont induit des réformes. Après la révolution, l’option entre l’établissement et la pension se généralise37.

Il ne sera reçu désormais à l’hôtel des Invalides […] que des militaires qui auraient été estropiés, ou qui auraient atteint l’âge de caducité, étant sous les armes au service de terre ou de mer, et qui n’auraient d’ailleurs aucun moyen de subsister. Ceux qui sont actuellement à l’hôtel, seront les maîtres d’y rester ; ceux qui voudront en sortir auront « une » pension de retraite38.

Les maux de la reconnaissance des invalides : la tension entre l’aptitude et le droit à réparation

L’invalide est aussi un militaire et une personne que la médecine légale et l’armée comme institutions sont susceptibles de reconnaître comme tels. C’est toutefois le ministre qui statue sur pièce et qui concède les pensions. La procédure complexe parfois à l’excès, ne va pas sans contestations ni contentieux, qui, devant le tribunal des pensions, qui devant le Conseil d’État. Le chemin est long et fastidieux entre la demande de constatation de blessure ou d’infirmité, la demande de pension, les expertises aux centres spéciaux de réforme, la décision de la commission de réforme qui statue sur l’aptitude au service et l’indemnisation. Celle-ci relève souvent d’une complexité et d’une technicité juridique et médico-légale qui font que les associations de mutilés, d’invalides, de blessés de la face sont d’importance. Elles s’insurgent contre les pratiques de certains médecins des commissions de réformes en matière d’hospitalisations abusives ayant pour seul but d’intimider les infirmes pour qu’ils renoncent à leurs prétentions légitimes. De même, elles protestent contre l’obligation illégale et illicite d’obliger les blessés et malades à subir des traitements et des opérations dont l’inefficacité est démontrée, et de réduire leurs indemnités en cas de refus des intéressés39. L’alliance entre la médecine légale et les juges des commissions de réforme fut trop souvent défavorable au requérant. Le droit à pension ou à indemnisation toujours se conquiert en fonction des dispositions législatives et règlementaires et de l’intelligence des recours contentieux au profit des victimes ou du trésor.

Tout mutilé ou estropié n’est donc pas pour le droit des pensions militaires, un invalide40. Tout blessé ou estropié n’est pas, non plus, pour le droit à l’assistance, un infirme. Insistons sur ce point, dans la législation civile, les « miséreux » étaient répartis en trois catégories bien distinctes, selon qu’ils ne peuvent pas, ne veulent pas, ou ne trouvent pas à travailler :

Ceux qui n’ont pas la force de travailler sont les personnes dont l’état physique ne permet pas, ou surtout, ne permet plus le travail : les enfants, les vieillards, les infirmes, les incurables, ceux qui sont atteints de maladies chroniques ou d’infirmités permanentes41.

Ici il faut dissocier l’infirme du malade. Le premier est une personne qui est affligée d’une ou de plusieurs infirmités le plaçant dans l’impossibilité de gagner sa vie et qui est incurable. Les bureaux de charité puis de bienfaisance qui vont organiser les secours à domicile sont ici encore préférés aux établissements :

Il est bien plus satisfaisant pour le pauvre malade ou infirme d’être assisté chez lui que d’y recevoir les soins de sa femme, de ses enfants ou de ses parents, que de se voir pour ainsi dire isolé, en se trouvant placé dans un hôpital au milieu d’individus qui ne lui tiennent par aucun lien, ni du sang ni de l’amitié. La morale publique ne peut que gagner à ce mode de secours, qui tend à resserrer les liens de famille, et à aider des enfants ou des parents à remplir un devoir que leur prescrit la nature42.

La laïcisation et la sécularisation des secours devenus publics sont politiques :

Ces secours arrivaient aux pauvres par le canal des curés, des sociétés de charité, des associations particulières et des établissements religieux, dont l’institution première avait eu pour but le soulagement des indigents. La révolution ayant tari ou déplacé la plupart des sources qui fournissaient aux besoins des pauvres ; on a établi les secours à domicile […] le Gouvernement, en consacrant des fonds au soulagement des pauvres […] s’acquitte d’un devoir […] et […] les personnes à qui le gouvernement en confie le soin ne sont pas de simples distributeurs, ce sont de véritables administrateurs de fonds publics qui ont une destination spéciale et dont il doit être rendu compte43.

Pour les invalides, point de droits au secours ou à l’assistance, mais le régime juridique des pensions militaires. Il fut celui de retraites par anticipation avant que d’être des pensions invalidité puis une indemnisation des préjudices subis pour des dommages liés à la guerre. Des logiques contradictoires et complémentaires les irriguent : la récompense, la reconnaissance, l’assistance et/ou la réparation.

La reconnaissance et les récompenses furent principalement symboliques. Dans les théories traditionnelles, toute pension ne pouvait être délivrée qu’à titre gracieux. Selon elles, l’État ne peut pas être reconnu responsable du fait de la conjonction du dogme de la souveraineté, de la force majeure, d’acte de gouvernement ou de raison d’État44. Les mots du député Massé résonnent encore :

Qu’il se défende ou qu’il attaque pour prévenir une agression ou pour obtenir raison ou justice, l’État est dans son droit le plus strict et peut exiger de ses sujets l’impôt du sang sans réserve. Dans la rigueur du droit national, il peut être exigé sans contrepartie directe au profit de l’individu45.

Le risque militaire ne relève pas des régimes juridiques des accidents professionnels46 ni de la solidarité nationale, mais constitue une dette de service47. C’est un esprit tour à tour de charité, de justice, d’équité ou d’humanité qui justifie son versement.

Sa Majesté […] veut qu’il soit accordé des pensions de récompenses militaires à ceux de ses vétérans et anciens soldats […] qui par leur âge, leurs infirmités ou leurs blessures, seront absolument hors d’état de continuer leurs services, et déclarés tels après un examen sévèrement constaté en présence des officiers généraux commandant les divisions, et sur les certificats les plus authentiques des médecins et chirurgiens48.

Aux grâces du Roi de l’Ancien Régime vont succéder des affirmations révolutionnaires, le droit à réparation (1792), puis le droit à réparation intégrale (1793). Toutefois, les régimes juridiques institués, s’ils consacrent des droits aux secours, les sacrifient pour des raisons comptables, les idées d’égalité et de solidarité qui devaient les justifier. L’exemple de la loi du 11 avril 1831 souligne l’alliage entre la récompense, l’assistance et la distinction militaire. Elle est conforme aux enjeux qui sont ceux d’une armée de métier. C’est la retraite fonction de l’ancienneté qui était payée par anticipation au militaire infirme. Aux officiers, cette pension au titre de leurs infirmités était concédée quand le maintien ou le retour au service était déclaré impossible ; aux hommes de troupe, à la condition que les infirmités fussent assez graves pour entraîner l’impossibilité de pourvoir à leur subsistance49. Elle ouvre le grand livre de la dette publique qui nécessite pour y être inscrit nombre de conditions en droit qui souvent l’empêchent dans les faits et pour des raisons procédurales. La première est que l’infirmité doit avoir pour origine une activité de service. La deuxième est l’incurabilité. La troisième est que l’infirmité constatée doit atteindre une certaine gravité. L’échelle d’évaluation retenue se conçoit d’une manière essentiellement fonctionnelle en ayant différents degrés qui sont synthétisés dans un tableau comportant six classes. Ce peut être la cécité ou la perte irrémédiable de la vue (1re classe). Ce peut être l’amputation des deux membres (2èmeclasse) ou d’un membre (pied ou main) (3e classe). Ce peut être la perte absolue de l’usage de deux membres (4e classe). Ce peut être la perte absolue de l’usage d’un membre ou des infirmités équivalentes (5e classe). Ce peut être pour la sixième catégorisation, des infimités moins graves (6e classe). Les cinq premiers donnent des « droits » immédiats à pension pour les hommes de troupe. La sixième seulement si les infirmités l’empêchent de pourvoir à sa subsistance, et ce, d’une manière impossible. Le degré de gravité induit que l’on calcule le taux des pensions d’infirmité qui sont liquidées en fonction du grade et de la classe à laquelle appartient celle-ci. Tous les officiers qui sont atteints d’infirmités imputables au service et incurables en ayant un degré de gravité suffisante ont droit immédiatement à pension. Pour la sixième classe, toutefois, ce n’est pas la clause d’impossibilité de pourvoir à sa subsistance qui compte, mais le fait que les infirmes soient d’une part, incapables de rester au service ou incapables d’y rentrer ultérieurement. La lecture des tableaux des pensions pour infirmités des hommes de troupe et des officiers permet de souligner les distinctions importantes non du fait de l’infirmité, mais des grades. Les hommes de troupe qui sont atteints d’infirmités insuffisamment graves pour ouvrir droit à pension peuvent obtenir des gratifications permanentes ou renouvelables en fonction de leur grade et de la gravité de leur infirmité et de leurs origines50.

Le droit à une réparation intégrale et à des « soins gratuits51 » aux pensionnés de guerre constitue le droit de l’infirme dont la République est débitrice. L’on dépasse ici le modèle de la retraite par anticipation, équitable pour des soldats de métier, mais n’ayant pas de sens au regard des soldats de l’armée nationale faite de conscrits52. L’iniquité entre les travailleurs depuis la loi de 1898 concernant les accidents du travail et les blessés de guerre emporte de vives discussions parlementaires et la structuration des revendications des associations de mutilés53. La loi du 31 mars 1919 fait de tout invalide et de tout infirme de guerre des créanciers de la nation. La pension liée à un risque social – qu’est la guerre – est plus qu’une récompense du service rendu, et ce pour des raisons d’équité et de solidarité, que la nation contacte au profit de ceux qui se sont sacrifiés pour la collectivité. Il faut ici lire la proposition de loi de Léon Bérard et le député Lémery :

Les mots « impôt du sang » ne correspondent à aucune réalité. Il n’y a pas d’impôt du sang ; il y a un impôt de service, ce qui n’est pas la même chose ; tous doivent le service, sans plus ; ceux qui, de ce fait, subissent en outre un préjudice spécial et supplémentaire, en contractant dans le service une infirmité ne peuvent, sans injustice, être sacrifiés à ceux, plus heureux, qui terminent leur service sans en souffrir de la même façon. C’est là, dans notre droit moderne tout entier basé sur l’idée de réparation par la collectivité des préjudices particuliers causés à certains dans l’intérêt de tous, que se trouve incontestablement le fondement juridique du droit des infirmes de guerre. Quant à « l’impôt du sang », ce n’est là qu’un mot vide de signification ; ce qui est dû à la collectivité, c’est le service ; ce n’est pas le sang, ni la vie, ni même la santé […] là est l’idée essentielle et d’où tout le reste découle : d’une part, elle autorise à présenter le citoyen mobilisé et détérioré au service comme un véritable créancier de la nation ; d’autre part, elle oblige à poser le droit de l’infirme à une réparation intégrale54.

Les pensions ne sauraient plus dès lors, avoir un caractère de bienfaisance ou d’assistance. Elles emportent un caractère de réparation et donc de compensation d’un dommage subi. Les personnes ayant un droit à indemnisation sont beaucoup plus nombreuses et s’étendent au-delà des seuls militaires. Le droit à pension étant la cause d’un dommage dont l’État est rendu responsable du fait du service public intègre beaucoup de personnes ayant participé à l’effort de guerre comme étant les titulaires de ce droit : membres de l’armée d’active ou territoriale ; réservistes et engagés spéciaux ; mais aussi certains civils.

Un débat s’est tenu autour des droits des indigènes des colonies qui furent ou non55 assimilés à des métropolitains pour le droit des pensions militaires d’invalidités. Il fut agité la question du coût moyen de la vie dans les différents territoires visés. Les arguments d’Henry Simon et de Paul Doumer furent préférés à ceux de Dominique Delahaye et de Charles Valentino. Pour les premiers :

Il n’est pas possible que ce soit la couleur de peau qui décide de l’application d’une loi faite pour tous les citoyens. Ce serait contraire à la tradition de la France […] l’assurance a été donnée aux indigènes […] que pour les allocations que l’État français peut être amené à accorder à ceux qui l’ont servi, ils seraient assimilés aux Français. La réalisation de la promesse que je viens de rappeler est un des désirs les plus vifs de l’indigène, étant donné le sentiment qu’il a de sa dignité et des services qu’il rend à la France.

Pour les seconds :

[a]lors que les indigènes des colonies vivent à frais extrêmement minimes il est immoral de rentrer ces indigènes au-delà de leurs besoins. L’égalité devant la loi et la pension fixée à un taux équitable, voilà ce qu’il faut aux noirs […] il est extrêmement choquant, pour qui connaît les conditions de vie coloniale, de voir attribuer une même pension à l’invalide métropolitain qui est obligé de vivre en France à des prix particulièrement onéreux et à l’indigène des colonies dont l’existence est pécuniairement des plus faciles56.

Plus généralement, trois conditions sont établies pour que des infirmités soient indemnisées. Une condition de temps d’abord : seules sont considérées celles qui furent contactées depuis le début de la Première Guerre mondiale et celles qui surviendront à l’avenir. Le degré et la condition de gravité sont beaucoup plus libéraux. Une invalidité d’au moins 10 % suffit. La condition d’origine est élargie. La blessure doit d’une part provenir d’un événement de guerre ou d’un accident éprouvé par le fait ou à l’occasion du service. L’infirmité doit, d’autre part, soit être causée, soit être aggravée par les fatigues, dangers ou accidents éprouvés par le fait ou à l’occasion du service. Il est même établi des présomptions légales d’origine57. L’évaluation du dommage est fonction du degré d’invalidité suivant barème qui n’est qu’un guide qui ne lie pas l’expert – une individualisation est rendue possible. Le calcul de l’infirmité globale se conçoit en deux régimes. Celui où une des infirmités entraîne l’invalidité absolue avec un calcul des invalidités supplémentaires qui sont additionnées. En l’absence d’une infirmité qui entraîne une invalidité absolue, la prise en considération des infirmités multiples est beaucoup plus favorable qu’au régime précédent. Le taux des pensions définitives ou temporaires est fixé par référence au grade, au degré d’invalidité et de l’éventuelle majoration par enfant âgé de moins de 18 ans (s’ils sont légitimes ou des enfants naturels, mais reconnus). Les pensionnés qui ont besoin d’une tierce personne d’une manière constante ont droit à une allocation spéciale, à moins qu’ils ne préfèrent l’hôpital ou les invalides – le droit d’option est ainsi consacré entre l’entrée ou le maintien des invalides aux Invalides – les pensions sont principalement des indemnisations des dommages subis et des préjudicies retenus – une partie de la rente pourra même être convertie en capital en suivant la volonté de Bonnevay.

Les maux de la condamnation à mort d’invalides : la tension entre l’armée et la justice

La reconnaissance de certains estropiés ou mutilés en tant qu’invalides fut en dernière part interdite. Toute mutilation présumée comme étant volontaire fait du militaire que l’on suspecte un réfractaire, un insoumis ou un simulateur58. Les personnes ne peuvent en aucun cas être exemptées ou réformées au titre de l’infirmité dont elles sont ou sont supposées s’être rendues coupables.

Il faut se saisir ici des modes de recrutement de l’armée et de la justice militaire des champs de bataille pour apprécier la rigueur de cette infraction pénale59. La milice royale de l’ancien régime est recrutée par des procédés qui n’étaient pas exempts d’incorporation forcée pour que l’engagé s’engage (in)volontairement de son propre (non)consentement60. Les recruteurs furent connus et décriés pour user de techniques trompeuses et de violences. La peine de mort était en usage contre les passe-volants qui étaient des civils que certains chefs de régiments habillaient en soldats et qui étaient présentés en cette qualité aux revues de contrôle pour que la troupe en soit grossie d’autant61. L’autorité royale va prescrire pour qu’ils puissent être reconnus des mutilations, des marques ou qu’ils subissent l’estrapade. Ce substantif féminin loin de l’art de la gymnastique est un supplice qui consistait à hisser un patient à un mât ou à une potence, les membres liés derrière le dos, et à le laisser retomber plusieurs fois près du sol ou dans la mer. C’est aussi un usage que de les défigurer, en coupant le nez (pour les passe-volants) ou les oreilles et en marquant, en tatouant deux fleurs de lys aux joues (pour les déserteurs)62.

Après la révolution, la conscription va dialoguer avec l’armée de métier et l’appel à des volontaires, le tirage au sort avec le caractère universel de l’obligation militaire. Le remplacement connut nombre de régimes juridiques, et la constitution d’une garde nationale ou d’une réserve fut inlassablement débattue. La littérature autour des simulateurs et des mutilés volontaires va être étendue. Le droit sera soumis à la loi militaire, à ses exigences et à ses nécessités. Un conflit de juridiction sera ouvert, qui du tribunal répressif ou du Conseil de révision aura la préséance – le Conseil d’État lui-même apportera un utile apport à cette double répression, disciplinaire et relevant du droit pénal. Il a été jugé dans l’intérêt de la loi qu’un conseil de révision ne peut inscrire un individu qui a été condamné correctionnellement à l’emprisonnement pour mutilation volontaire de l’index de la main droite, ce qui impliquerait à son profit qu’il soit employé dans des services auxiliaires et dispensé du service dans l’armée active. Tout au contraire, un conscrit condamné pour de tels faits doit, à l’expiration de sa peine, être mis à la disposition du ministre de la Guerre, et peut-être envoyé dans une compagnie de discipline63. Les mutilés volontaires endurèrent (disciplinairement) un service plus rude et des fonctions dégradantes. Des bataillons coloniaux ou des compagnies de pionniers furent créés spécialement avant que seules ne demeurent des compagnies de fusiliers de discipline (section des mutilés et section des simulateurs)64. La réintégration dans un corps de troupe du service général des personnes condamnées du fait de leur bonne conduite et/ou d’actes de courage et de dévouement devant l’ennemi est subordonnée à leur état physique et ne peut être faite que sur décision du ministre de la Guerre et sur proposition de leurs chefs hiérarchiques. Toute personne qui volontairement tente ou se rend impropre au service peut être déférée et condamnée par un tribunal correctionnel. Entre le pauvre et le riche en matière de conscription, l’iniquité fut une des offenses faites à la justice. Ainsi un conscrit condamné comme étant un mutilé volontaire conserve, alors qu’il est mis à disposition du ministre de la Guerre pour faire son temps de service, et, après avoir subi sa peine correctionnelle, le droit de présenter un remplaçant65. La personne qui mutile du consentement du conscrit, en lui coupant une phalange du pouce droit, afin que ce dernier échappe à son devoir militaire relève de sanctions pénales66.

Toute mutilation volontaire postérieure à l’incorporation fut lors de la Grande Guerre apparentée à un refus d’obéissance ou à un abandon de poste. La justice militaire ne peut être juste dans les cours martiales tout comme elle ne le peut être dans les conseils de guerre aux armées. Ce furent souvent des simulacres de justice dont les peines furent prononcées « pour l’exemple ». Ces procès sans procès furent trop souvent expéditifs sans comporter aucune garantie des droits de la défense67. Joseph Barthélémy le rappelle sans détour :

Les conseils de guerre spéciaux n’ont aucune compétence limitée, quoique leur principal objet soit en fait de réprimer la mutilation volontaire et le refus de marcher à l’ennemi ; ils peuvent juger tout ce que le commandant leur défère. Il n’y a aucune garantie de procédure ; ou plutôt, il n’y a pas de procédure : aucune enquête, aucune instruction, aucun délai entre l’ordre de mise en jugement et la réunion du tribunal ; aucun recours ; la peine, qui pourra être la peine capitale, sera exécutée immédiatement. En fait, une infraction a été commise qui réclame une répression immédiate et terrible : trois officiers sont réunis par le commandant de l’unité, et, si l’inculpé est reconnu coupable par deux d’entre eux, il sera immédiatement passé par les armes. Très souvent, la trace officielle de la délibération, du jugement, de l’exécution aura disparu68.

Les procès en révision ou en réhabilitation qui existèrent portent témoignage de certaines décisions de Conseils de guerre hors du Droit. La lettre d’Aristide Briand alors garde des Sceaux dans l’espèce Jules Arrio, permet de soutenir la révision sans renvoi du jugement du conseil de guerre de la 29e division d’infanterie qui l’a condamné à la peine de mort pour mutilation volontaire. Constituent un fait nouveau, des rapports de trois médecins militaires selon lesquels la blessure suspecte a été provoquée par une balle de schrapnell69. Arrio qui n’a pas été passé par les armes, alors qu’au titre des mêmes allégations, Auguste Odde et Joseph Tomasini sont fusillés, sera envoyé à la maison d’arrêt de Verdun. Il fut toutefois condamné à mort sans témoin et sans éléments de preuve autre que la référence à un certificat d’un médecin major :

Plaie bras gauche, région deltoïdienne, orifice unique à bords déchiquetés, capote roussie, décollement sous cutané antéro-postérieur ; plaie produite très vraisemblablement par cartouche dépourvue de balle à très courte distance. Ce militaire doit être considéré comme blessé volontaire, avec assistance probable d’un camarade70.

Il en est de même concernant la révision du jugement d’un conseil de guerre spécial de Châlons-sur-Marne qui condamne à la dégradation militaire et à dix ans de détention Joseph Lucas pour mutilation volontaire et abandon de poste en présence de l’ennemi par suite d’une mutilation volontaire alors qu’il a été atteint d’une balle allemande71. Là encore la condamnation était emportée en absence de tout témoignage permettant d’apprécier la vérité des faits et sur la seule mention d’un certificat médical ainsi conçu :

 Plaie perforante récente à la base du médium gauche par coup de feu ; le tatouage très net des bords de la blessure prouve que le coup a été tiré à bout portant ; la présomption de mutilation volontaire ressort de ce que l’orifice d’entrée du projectile et le tatouage siègent du côté de la paume de la main72.

Constituent un fait nouveau emportant révision de sa condamnation les déclarations de ses camarades qui étaient avec lui sur le champ de bataille, corroborées par celles du capitaine sous les ordres duquel il était placé. Celles-ci établissent toutes que le soldat Lucas « ne s’est pas blessé volontairement et que c’est sur l’invitation de son supérieur qu’il s’est rendu au poste de secours73 ». Les procès en révision évitent la peine et effacent la condamnation, alors que les procès en réhabilitation sont des procès pour l’honneur, mais pas irrémédiablement pour une justice. La réhabilitation de militaires passés par les armes sans jugement, tels Tomasini, Odde et Gauthier permet que leurs mémoires soient déchargées et que leurs faits d’armes soient reconnus […] par la Cour de cassation74. La réhabilitation n’abolit pas le crime et tout crime commis à l’encontre de la justice :

Le crime n’a aucun empire sur la réhabilitation, comme la réhabilitation n’a aucun empire sur le crime75.

L’exécution liée à une peine de mort prononcée pour abandon de poste en présence de l’ennemi ne saurait constituer, pour le Conseil d’État, un accident éprouvé par le fait ou à l’occasion de service76 et les droits à pension pour le militaire et les veuves seront invariablement mis en échec. Au 3e congrès national des mutilés, veuves et anciens combattants, il est en vain réclamé « des sanctions judiciaires contre les médecins-majors, dont les rapports établis avec légèreté ou malveillance, ont entraîné des condamnations de la part des conseils de guerre, condamnations qui, dans de nombreux cas, ont été suivies d’exécutions capitales, ainsi qu’en font foi des arrêts de réhabilitation de la Cour de cassation77 ».

Conclusion

« Les mutilés ont leurs droits de l’homme et ils ont leurs droits du mutilé.
Les uns et les autres sont également sacrés ».
Léon Bérard.

La poésie du droit permet une humanité langagière où le handicap ou le dépendant est l’autre de nous-mêmes. L’alliance du poète et de l’homme du droit, Dunant et Moynier, donne à une lecture technique le supplément d’âme des grandes œuvres auxquelles ils participent :

Dans ce siècle accusé d’égoïsme et de froideur, quel attrait pour les cœurs nobles et compatissants, pour les caractères chevaleresques, que de braver les mêmes dangers que l’homme de guerre, mais pour une mission toute volontaire de paix, de consolation et d’abnégation78.

L’histoire du soin des invalides est celle d’une victoire de la fraternité sur la violence, de l’humanité sur et par elle-même, qu’il s’agisse des soins gratuits aux pensionnés de guerre ou de l’affirmation au droit à une réparation intégrale79.

Tout à l’inverse, en première analyse, des juristes au quotidien en leurs réponses administratives sont infirmes et invalides dans l’art de la co-écriture de biographies partagées avec les administrés, les usagers ou les résidents. Dans l’histoire sociale, les mots des circulaires et des règlements qu’ils contiennent appauvrissent l’appréhension vécue des personnes ayant un handicap et par les personnes en situation de handicap. Ils les classifient et les enferment dans leurs taxinomies. Ils participent au vocable du manque ou de l’insuffisance. Ils font de leur « handicapé » un mutilé social, un disgracié du droit, un estropié de la vie.

En seconde analyse, les juristes du quotidien appréhendent en une éthique de la compensation, les désavantages et l’état physique ou psychique dans lequel les personnes ayant un handicap se trouvent défavorisées. La prosodie des droits de l’homme handicapé forme ainsi une humanité onirique où toute différence et où toute relation est constitutive de richesses d’altérité. L’œuvre de reconnaissance et de sollicitude, qu’est la recherche du juste et de la justesse, est consciente de l’imaginaire social qu’expriment en mots les régimes juridiques. Elle invite à participer à un projet d’existence toujours dynamique et singulier. Le handicap, c’est l’existence en sa valeur de fragilité. La personne ayant un handicap n’est pas seulement d’égale valeur et de dignité, c’est un être dont la valeur approfondit notre humanité.

Victor Hugo nous dit combien deux êtres en leurs imperfections peuvent être beaux et être le témoignage d’un divin amour :

Cette infirme avait ce difforme […] Une ineffable action de grâces se dégageait de ces deux détresses. Elles remerciaient. La difformité, c’est l’expulsion. La cécité, c’est le précipice. L’expulsion était adoptée ; le précipice était habitable. C’était la pénétration de deux détresses dans l’idéal, celle-ci absorbant celle-là. Deux exclusions s’admettaient. Deux lacunes se combinaient pour se compléter. Ils se tenaient par ce qui leur manquait. Par où l’un était pauvre, l’autre était riche. Le malheur de l’un fait le trésor de l’autre. Un prodigieux besoin l’un de l’autre était au fond de leur amour. Rencontre de misère produisant l’adhérence. Ces deux exils aboutissaient à une patrie ; ces deux fatalités incurables, le stigmate de Gwynplaine, la cécité de Dea, opéraient leur jonction dans le contentement. Ils se suffisaient, ils n’imaginaient rien au-delà d’eux-mêmes ; se parler était un délice, s’approcher était une béatitude ; à force d’intuition réciproque, ils en étaient venus à l’unité de rêverie ; ils pensaient à deux la même pensée […] Ils se savaient ensemble à jamais dans la même joie et dans la même extase ; et rien n’était étrange comme cette construction d’un éden par deux condamnés. Ils étaient inexprimablement heureux. Avec leur enfer ils avaient fait un ciel ; telle est votre puissance, amour80.

Il n’y a pas de droit ni de justice sans amour de la fragilité ni sans amour de la fraternité en actes. Voilà l’œuvre poétique à laquelle des juristes sont (notamment) invités à concourir.

1 Avant que le régime juridique des grands invalides de guerre ne soit mis en place : Décret du 5 août 1920, prévoyant l’attribution aux grands

2 Henri Roland et Laurent Boyer, Adages du droit français, Paris, LexiNexis, 4ème Ed., 1999.

3 Benoît-Michel Decomberousse, Code Napoléon mis en vers français, Paris, Aux archives du droit français, 1811, p. 115-116.

4 Joseph-Henri Flancon Rochelle, Code civil des Français, mis en vers avec le texte en regard, Paris, Le Clerc Jeune, 1805, p. 289.

5 L’argumentation judiciaire et l’éloquence relèvent de tout un corpus déontologique – tout argument n’est pas légal, ni légitime, ni licite.

6 Jacques Flach, La poésie et le symbolisme dans l’histoire des institutions humaines, Leçon d’ouverture du cours d’histoire des législations

7 Victor Hugo, Le droit et la loi, Actes et paroles I., avant l’exil, 1841-1851, Œuvres complètes, Paris, Hetzel Quantin, éd. ne varietur, sans date

8 Victor Hugo, L’Homme qui rit, Œuvres complètes, Roman XII., Paris, Hetzel-Quantin, 1869, p. 375.

9 Prologue, Œuvres complètes, L’année terrible, poésie XII, Paris, Hetzel-Quantin, 1872, p. 11.

10 Ibid., mars, p. 213.

11 Il faut ici relire, à titre d’exemple, les revendications contenues dans le rapport d’Henri Gay concernant le fonctionnement de l’Office national

12 Édit du Roi, Pour l’établissement de l’Hôtel royal des Invalides, avril 1674, Recueil des Édits, déclarations, ordonnances, arrêts et règlements

13 Montesquieu, Lettres persanes, in Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1949, coll. « Nrf », n° 84, p. 257-258.

14 « Ordonnance du Roi, concernant les invalides pensionnés, les soldats retirés dans les provinces avec solde et demi-solde et les vétérans, du 17 

15 Règlement pour l’Hôtel royal des Invalides, du 3 janvier 1710, t. 1, p. 187-188.

16 « Les vagabonds ou gens sans aveu sont ceux qui n’ont pas de domicile certain, ni moyens de subsistance, et qui n’exercent habituellement ni

17 Les indigents « véritablement » infirmes ou invalides doivent être placés dans un hôpital ou un hospice. Les mendiants occasionnels relèvent de la

18 L’Ancien Régime en sa déclaration du 18 juillet 1724 était en cela identique : « Les mendiants […] qui seront arrêtés contrefaisant les estropiés

19 Louis Batiffol, « Les mutilés de la guerre sous l’Ancien Régime », La Revue hebdomadaire, 26 mai 1917, p. 456.

20 « On était dans l’usage de mettre au rang des punitions militaires, celle d’envoyer des Officiers et soldats aux loges et de les confondre ainsi

21 Ordonnance du 17 juin 1776, concernant la constitution et l’administration de l’Hôtel royal des invalides, Recueil des Édits, op. cit.,t. 2, p. 

22 Décision sur les mariages des invalides, du 10 septembre 1693, Recueil des Édits, op. cit., p. 106.

23 Décision sur les mariages des invalides, du 18 mai 1703, Recueil des Édits, op. cit., p. 130.

24 La pension symbolique est versée « car leurs projets de mariage » sont censés leur faire trouver « des avantages qui dispenseront l’État de

25 Ibid.

26 « Ainsi, le pays a montré le cas qu’il faisait de ses serviteurs, il a proclamé qu’on ne saurait assez s’occuper d’eux ; il s’est honoré en les

27 Édit du Roi, Pour l’établissement de l’Hôtel royal des Invalides, avril 1674, Recueil des Édits, op. cit., p. 35.

28 Jourdan le Cointre, La santé de mars, ou moyens de conserver la santé des Troupes, en temps de paix, d’en fortifier la vigueur et le courage en

29 Règlement pour les Manicros et les Moines-Lays, du 4 décembre 1766, Recueil des Édits, op. cit., t. 2, p. 176. Éric Martinent, « Regard d’histoire

30 Arrêté du Conseil général des Hospices, 28 juin 1816, Code administratif des hôpitaux civils, hospices et secours à domicile de la ville de Paris

31 Arrêté du Conseil général des Hospices, du 24 mars 1819, ibid.

32 Arrêté du Conseil général des Hospices, du 17 avril 1805, ibid., p. 660.

33 Un hôpital est un établissement dans lequel sont reçus et traités les indigents malades.

34 L’hospice est un établissement dans lequel sont admis et entretenu des vieillards, les infirmes incurables, les orphelins et les enfants

35 Circulaire du ministre de l’Intérieur concernant l’assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables, du 6 mars 1910, Revue de

36 Loi relative aux Invalides, 17 avril 1791.

37 Pour les hospices, les indigents infirmes déjà admis aux places vacantes qui leur sont dédiées dans les hospices bénéficient d’une pension

38 Décret du 28 mars 1791, relatif aux Invalides, collection des décrets de l’Assemblée nationale constituante, De Causse, 1792, t. 3, p. 213-214.

39 Lehmann, Cassin et Bellier, « Rapport de la commission des lois sociales, Congrès national des mutilés, veuves et anciens combattants », Revue

40 Charles Valentino, L’indemnisation des infirmités de guerre, le droit de l’infirme, Paris, Girard et Brière, 1917.

41 Jean Juéry, L’assistance aux vieillards, infirmes et incurables, Paris, Librairie de la Société du Recueil J.B. Sirey & du Journal du Palais, 19

42 Rapport fait au Conseil général des hospices, le 28 août 1816, sur la nouvelle organisation des secours publics à Paris, Code administratif des

43 Rapport du Conseil général des hospices, le 28 août 1816, sur la nouvelle organisation des secours publics à Paris, Code administratif, op. cit. p

44 Pour saisir les éléments de ce débat, entre équité, solidarité nationale ou obligation juridique, il convient invariablement de se rapporter à :

45 Rapport du député Pierre Massé sur le projet de la loi du 31 mars 1919, J.O, chambre des députés, 1916, p. 1942.

46 Notons qu’un employé titulaire d’une pension militaire au titre de ses infirmités fut considéré comme ayant un risque augmenté d’accident du

47 Lucien Bazin, Le risque professionnel dans le service militaire, étude comparée de la législation de 1831 sur les pensions d’invalidité de l’armée

48 Règlement du 25 mars 1776, sur l’administration des corps ; Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, Paris, Belin-Leprieur, 1826

49 Charles Valentino, « Les pensions militaires en France », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant les mutilés de guerre, mars

50 Voir supra.

51 Charles Valentino, Les soins aux mutilés, Paris, Berger-Levrault, 1923, 6e éd.

52 Charles Valentino, « Les grands principes de la loi Lugol sur les pensions militaires », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant

53 « Considérant que la collectivité n’a pas, vis-à-vis des blessés, un simple devoir moral d’assistance et que ceux-ci peuvent prétendre à autre

54 Proposition de loi tendant à modifier la législation des pensions des armées de terre et de mer, JORF, du 4 octobre 1917, n° 3826, p. 3.

55 Les Marocains des troupes auxiliaires (jusqu’en 1923) et les indigènes dont le recrutement ne s’opère pas par voie de conscription.

56 Charles Valentino, Les pensions aux indigènes des colonies et à leur ayant cause, Paris, Berger-Levrault, 1925, p. 3-5.

57 Charles Valentino, Le droit à réparation et la présomption d’origine des bénéficiaires, Paris, Berger-Levrault, 1924.

58 Il convient de lire, concernant les contraintes indirectes liées à un refus de traitement par un infirme pour qu’il puisse être de nouveau

59 Bouniceau-Gesmon, « Les conseils de révision et les tribunaux correctionnels », Revue pratique de droit français, 1874, p. 310.

60 La milice provinciale sera créée par Louvois pour devenir une réserve plus structurée au profit de l’armée d’active.

61 L’officier corrupteur risquait lui, non la mort, mais d’être cassé et pouvait être déclaré incapable d’occuper jamais aucune fonction militaire.

62 On consultera avec profit : Pierre de Briquet, Code militaire ou compilation des ordonnances des rois de France concernant les gens de guerre

63 CE, 17 mai 1878, ministre de la Guerre c. André, n° 52-947, Lebon, 1978, p.452 : Tribunal militaire de cassation permanent de Paris, 1er février

64 L’on peut mentionner à titre d’exemple les trois condamnations des jeunes soldats de la classe de 1876 pour tentatives ou mutilation. Tribunal

65 Cass. Civ. 10 novembre 1845, n° 133 (affaire Paratarrieu et Gude).

66 Cass. Crim. 13 août 1813, n° 178 (affaire Mongenot et Julien).

67 Edmond Boisseau, Des maladies simulées et les moyens de les reconnaître, Paris, J. B. Baillère et Fils, 1870 ; « Considérations sur les maladies

68 Joseph Barthélémy, « Les conseils de guerre », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, t.33, 1916, p. 112. R.

69 Cass. Crim. 18 mars 1915, Gazette des tribunaux, 1916.1.41 (affaire Jules Arrio).

70 Ibid.

71 Cass. Crim. 23 mars 1915, Gazette des tribunaux, 1916.1.42 (affaire Joseph Lucas).

72 Ibid., Cass. Crim. 8 décembre 1916, D.1917. Bull. somm. 12 (affaire Giovannangeli) dans son élan le commentateur de l’arrêt qualifie le condamné

73 Ibid., p. 43.

74 Cass. Crim. 2 août 1917, JORF, 1918, p. 9124-9125 (affaires Tomasini, Odde, Gauthier et Pellet).

75 Cass. Crim. 6 février 1823, Affaire Lièvre, Bull. 1823.55 (concernant une récidive après l’obtention d’une lettre de réhabilitation).

76 CE, 9 avril 1927, Schwendimann, Lebon, 1927, p. 492.

77 Lehmann, Cassin et Bellier, « Rapport de la commission des lois sociales, Congrès national des mutilés, veuves et anciens combattants », Revue

78 Henri Dunant, Un souvenir de Solférino. Ne se vend pas, Genève, imprimerie Jules-Guillaume Fick, 1862, p. 104.

79 André François-Poncet, Henry Dunant, Les prix Nobel de la paix, Monaco, Union européenne d’éditions, 1962, p. 50. Les Comités nationaux permanents

80 Victor Hugo, L’Homme qui rit, op. cit., p. 420-422.

Notes

1 Avant que le régime juridique des grands invalides de guerre ne soit mis en place : Décret du 5 août 1920, prévoyant l’attribution aux grands invalides d’allocations spéciales et de majorations supplémentaires temporaires et, surtout, la loi portant régime des pensions civiles et militaires du 14 avril 1924 (JORF, 15 avril 1924).

2 Henri Roland et Laurent Boyer, Adages du droit français, Paris, LexiNexis, 4ème Ed., 1999.

3 Benoît-Michel Decomberousse, Code Napoléon mis en vers français, Paris, Aux archives du droit français, 1811, p. 115-116.

4 Joseph-Henri Flancon Rochelle, Code civil des Français, mis en vers avec le texte en regard, Paris, Le Clerc Jeune, 1805, p. 289.

5 L’argumentation judiciaire et l’éloquence relèvent de tout un corpus déontologique – tout argument n’est pas légal, ni légitime, ni licite. François Martineau, Petit traité d’argumentation judiciaire et de plaidoirie, Paris, Dalloz, 2019 ; Laurence Gratiot et al., Art et technique de la plaidoirie, Paris, LexisNexis, 2011.

6 Jacques Flach, La poésie et le symbolisme dans l’histoire des institutions humaines, Leçon d’ouverture du cours d’histoire des législations comparées faite au Collège de France, le 9 septembre 1910, Paris, Éditions de la Revue politique et littéraire (Revue bleue) et de la revue scientifique, tiré à part, p. 39 [En ligne sur Gallica] URL : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6124573v.texteImage. « La loi d’amour est la mère commune de l’harmonie et de la justice ». Ibid., p. 41.

7 Victor Hugo, Le droit et la loi, Actes et paroles I., avant l’exil, 1841-1851, Œuvres complètes, Paris, Hetzel Quantin, éd. ne varietur, sans date, p. 6-7. On consultera avec profit : Pierre Mazeaud et Catherine Puigelier (dir.), Victor Hugo, Homme de lettres, homme de droit, Le Kremlin-Bicêtre, Mare et Martin, 2013 et Victor Hugo et le droit, Revue Droit & littérature, n° 2, 2018.

8 Victor Hugo, L’Homme qui rit, Œuvres complètes, Roman XII., Paris, Hetzel-Quantin, 1869, p. 375.

9 Prologue, Œuvres complètes, L’année terrible, poésie XII, Paris, Hetzel-Quantin, 1872, p. 11.

10 Ibid., mars, p. 213.

11 Il faut ici relire, à titre d’exemple, les revendications contenues dans le rapport d’Henri Gay concernant le fonctionnement de l’Office national des pupilles de la nation, émises par l’association générale des mutilés de guerre. Henry Gay, au nom de l’office national et des offices départementaux des pupilles de la Nation en « considérant que le sacrifice du père a suffisamment payé la dette du sang à la Nation, proteste contre l’envoi des pupilles sur les théâtres des opérations extérieures ». Bulletin de l’association générale des mutilés de guerre, 1926, p. 152. L’attribution de bureaux de tabac aux veuves de guerre devrait être transmise aux pupilles en cas de décès de celles-ci.

12 Édit du Roi, Pour l’établissement de l’Hôtel royal des Invalides, avril 1674, Recueil des Édits, déclarations, ordonnances, arrêts et règlements, concernant l’Hôtel Royal des invalides, t. 1, Paris, Imprimerie Royale, 1781, p. 35.

13 Montesquieu, Lettres persanes, in Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1949, coll. « Nrf », n° 84, p. 257-258.

14 « Ordonnance du Roi, concernant les invalides pensionnés, les soldats retirés dans les provinces avec solde et demi-solde et les vétérans, du 17 avril 1772 », Recueil des Édits, op. cit., t. 2, p. 255-256.

15 Règlement pour l’Hôtel royal des Invalides, du 3 janvier 1710, t. 1, p. 187-188.

16 « Les vagabonds ou gens sans aveu sont ceux qui n’ont pas de domicile certain, ni moyens de subsistance, et qui n’exercent habituellement ni métier ni profession ». Article 270 du Code pénal ancien.

17 Les indigents « véritablement » infirmes ou invalides doivent être placés dans un hôpital ou un hospice. Les mendiants occasionnels relèvent de la charité publique ou privée et de l’assistance par le travail. Les mendiants et vagabonds professionnels qui se trouvent en récidive doivent être réprimés. Ils subirent la prison cellulaire, la maison de travail, la relégation.

18 L’Ancien Régime en sa déclaration du 18 juillet 1724 était en cela identique : « Les mendiants […] qui seront arrêtés contrefaisant les estropiés ou qui feindraient des maladies qu’ils n’auraient pas » seront condamnés – les hommes valides – aux galères au moins pour cinq années, et, à l’égard des femmes et des hommes invalides, au fouet dans l’intérieur de l’hôpital, et à une détention à l’hôpital général à temps ou à perpétuité, suivant l’exigence des cas ».

19 Louis Batiffol, « Les mutilés de la guerre sous l’Ancien Régime », La Revue hebdomadaire, 26 mai 1917, p. 456.

20 « On était dans l’usage de mettre au rang des punitions militaires, celle d’envoyer des Officiers et soldats aux loges et de les confondre ainsi avec les fous et les imbéciles. Cette punition imprimant trop d’humiliation et d’avilissement, et étant capable même d’aliéner l’esprit de ceux à qui on l’inflige ; le Roi ordonne que cette punition n’ait plus lieu ; que le Gouverneur fasse sortir des Loges ceux qui peuvent y être à titre de punition ; et que, dans les cas de fautes plus ou moins graves, il leur soit infligé une autre espèce de correction, telle que la prison, ou la privation de leur traitement en argent ou en vin, suivant que les circonstances paraîtront l’exiger ». Punitions aux officiers et soldats, Monsieur le Duc de Choiseul (qui fut un des bienfaiteurs des invalides – souligné par nous), du 20 septembre 1766, Recueil des Édits, op. cit. t. 2, p. 151-152.

21 Ordonnance du 17 juin 1776, concernant la constitution et l’administration de l’Hôtel royal des invalides, Recueil des Édits, op. cit.,t. 2, p. 292. Pour les civils, « tous les indigents qui ne mangeront point au réfectoire seront censés être trop infirmes pour sortir de la maison, en conséquence ils ne pourront point quitter la maison ». Arrêté du Conseil général des hospices, du 30 juillet 1802.

22 Décision sur les mariages des invalides, du 10 septembre 1693, Recueil des Édits, op. cit., p. 106.

23 Décision sur les mariages des invalides, du 18 mai 1703, Recueil des Édits, op. cit., p. 130.

24 La pension symbolique est versée « car leurs projets de mariage » sont censés leur faire trouver « des avantages qui dispenseront l’État de pourvoir à leur entretien à l’Hôtel ». L’inquiétude concernant le trésor du roi ou de l’empereur justifie aussi cette tolérance : leurs femmes ne peuvent « participer aux secours qu’accorde l’hôtel aux veuves des invalides mariés avec permission ». Louis Durat Lasalle, Droit et législation des armées de terre et de mer, Chez l’Auteur, 1848, t. 8, p. 211-212.

25 Ibid.

26 « Ainsi, le pays a montré le cas qu’il faisait de ses serviteurs, il a proclamé qu’on ne saurait assez s’occuper d’eux ; il s’est honoré en les honorant. La France délicate et polie, reine de la civilisation, a essayé de payer sa dette avec une délicatesse digne de son nom ». Auguste Solard, Histoire de l’Hôtel royal des Invalides depuis sa fondation jusqu’à nos jours, Paris, Librairie militaire, 1845, t. 1, p. 8-9. « L’institution des Invalides a pour but de donner au soldat blessé, mutilé ou vieilli dans la pratique des armées, une retraite honorable et assurée, une existence tranquille et douce, à la fin de sa carrière, une famille, dans laquelle il trouve des soins éclairés, respectueux, constants. C’est une institution que l’État entretient dans la vue de payer la dette de l’État. La considérer comme une création de philanthropie, ce serait oublier complètement la pensée des fondateurs et du pays ; ce serait méconnaître les généreuses prescriptions de l’ordonnance constitutive », Ibid., p. 6.

27 Édit du Roi, Pour l’établissement de l’Hôtel royal des Invalides, avril 1674, Recueil des Édits, op. cit., p. 35.

28 Jourdan le Cointre, La santé de mars, ou moyens de conserver la santé des Troupes, en temps de paix, d’en fortifier la vigueur et le courage en temps de guerre ; d’assurer la salubrité des Hôpitaux Militaires ; & de produire un surcroît de population suffisant pour tenir complets tous les Régimens du Royaume, Paris, Chez Briand, 1790 [En ligne sur Gallica] URL : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9762925q.texteImage.

29 Règlement pour les Manicros et les Moines-Lays, du 4 décembre 1766, Recueil des Édits, op. cit., t. 2, p. 176. Éric Martinent, « Regard d’histoire du droit autour de la (non) protection sociale des blessés de la face comme invalides de guerre », in Les assises du corps transformé. Regards croisés sur le visage, Jacques Mateu, Mathieu Reynier et François Vialla (dir.). Bordeaux, Les Études hospitalières, 2013, p. 33. Les moines-lays furent aussi qualifiés de nez de cuir ou d’argent, de mentons ou de nez d’argent.

30 Arrêté du Conseil général des Hospices, 28 juin 1816, Code administratif des hôpitaux civils, hospices et secours à domicile de la ville de Paris, Paris, Madame Huzard, 1824, p. 372.

31 Arrêté du Conseil général des Hospices, du 24 mars 1819, ibid.

32 Arrêté du Conseil général des Hospices, du 17 avril 1805, ibid., p. 660.

33 Un hôpital est un établissement dans lequel sont reçus et traités les indigents malades.

34 L’hospice est un établissement dans lequel sont admis et entretenu des vieillards, les infirmes incurables, les orphelins et les enfants abandonnés.

35 Circulaire du ministre de l’Intérieur concernant l’assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables, du 6 mars 1910, Revue de Bienfaisance, spec., p. 140.

36 Loi relative aux Invalides, 17 avril 1791.

37 Pour les hospices, les indigents infirmes déjà admis aux places vacantes qui leur sont dédiées dans les hospices bénéficient d’une pension représentative de la place qui leur aura été accordée. Ils devront alors indiquer la famille où ils prétendent se retirer en apportant la preuve de son consentement. Les infirmes conserveront jusqu’à leur décès le droit de rentrer dans l’établissement dans lequel ils auront obtenu leur admission : à cet effet, les lits qui leur sont destinés resteront sans être garnis dans les emplois, et sans que qui que ce soit puisse y coucher ». Toutefois, « dans le cas où les infirmes abuseraient de cette faculté pour se livrer à la mendicité, ils seront privés de cette pension et du droit de rentrer dans l’hospice ». Règlement du 10 octobre 1801, Code administratif des hôpitaux civils, hospices et secours à domicile de la ville de Paris, Paris, Madame Huzard, 1824, t. 1, p. 672.

38 Décret du 28 mars 1791, relatif aux Invalides, collection des décrets de l’Assemblée nationale constituante, De Causse, 1792, t. 3, p. 213-214.

39 Lehmann, Cassin et Bellier, « Rapport de la commission des lois sociales, Congrès national des mutilés, veuves et anciens combattants », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant les mutilés de guerre, janvier 1919, p. 272.

40 Charles Valentino, L’indemnisation des infirmités de guerre, le droit de l’infirme, Paris, Girard et Brière, 1917.

41 Jean Juéry, L’assistance aux vieillards, infirmes et incurables, Paris, Librairie de la Société du Recueil J.B. Sirey & du Journal du Palais, 1906, p. 2.

42 Rapport fait au Conseil général des hospices, le 28 août 1816, sur la nouvelle organisation des secours publics à Paris, Code administratif des hôpitaux civils, op. cit., t. 2, p. 401.

43 Rapport du Conseil général des hospices, le 28 août 1816, sur la nouvelle organisation des secours publics à Paris, Code administratif, op. cit. p. 401-402.

44 Pour saisir les éléments de ce débat, entre équité, solidarité nationale ou obligation juridique, il convient invariablement de se rapporter à : Ferdinand Larnaude, et. al., La réparation des dommages de guerre. Conférences faites à l’École des hautes études en sciences sociales, Paris, Alcan, 1917 ; Maurice Souplet, Les incapables et la loi de réparation des dommages de guerre, Laon, Imprimerie De L’aisne A. Bugnicourt, 1918 ; Ferdinand Larnaude, « La réparation des dommages causés par la guerre, principes et applications », Revue politique et parlementaire, tome 83, no287, 10 Juin 1915, p. 6 ; Raymond Carré de Malberg, « Du fondement du droit à la réparation intégrale pour les victimes des dommages de guerre », Publications du Comité national d’action pour la réparation intégrale des dommages causés par la guerre, juin 1915, p. 17.

45 Rapport du député Pierre Massé sur le projet de la loi du 31 mars 1919, J.O, chambre des députés, 1916, p. 1942.

46 Notons qu’un employé titulaire d’une pension militaire au titre de ses infirmités fut considéré comme ayant un risque augmenté d’accident du travail. Ainsi les chefs d’entreprise les employant peuvent bénéficier d’une exonération des restes à charge liés à l’accident du travail étant la cause exclusive de l’accident et/ou qu’elle ait aggravé dans une certaine mesure la réduction (non pas temporaire) permanente de capacité qui en est résultée pour la victime. Adrien Sachet, Traité théorique et pratique de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, Paris, Sirey, 1927, 7e éd., t. 3, n° 2037.

47 Lucien Bazin, Le risque professionnel dans le service militaire, étude comparée de la législation de 1831 sur les pensions d’invalidité de l’armée et du système de 1898 sur les accidents du travail. Nécessité d’une réforme, Paris, Larose et Tenin, 1907 ; Léonce Dousset, Le risque militaire et la solidarité nationale, Fontenay-le-Comte, Charles Pétélot, 1907.

48 Règlement du 25 mars 1776, sur l’administration des corps ; Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, Paris, Belin-Leprieur, 1826, t. 23, p. 481. (Des récompenses militaires Chapitre VIII).

49 Charles Valentino, « Les pensions militaires en France », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant les mutilés de guerre, mars 1919, p. 136.

50 Voir supra.

51 Charles Valentino, Les soins aux mutilés, Paris, Berger-Levrault, 1923, 6e éd.

52 Charles Valentino, « Les grands principes de la loi Lugol sur les pensions militaires », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant les mutilés de guerre, mai 1919, p. 239. L’auteur plaide dès 1917 pour que l’appel sous les drapeaux soit considéré comme une réquisition de service. Leurs conséquences dommageables doivent être indemnisées pour permettre la compensation des pertes effectivement subies. Charles Valentino, Accidents du travail et blessures de guerre, Bordeaux, Cadoret, 1917.

53 « Considérant que la collectivité n’a pas, vis-à-vis des blessés, un simple devoir moral d’assistance et que ceux-ci peuvent prétendre à autre chose qu’à une libéralité dont ils devraient en tout état de cause, se contenter. Déclare : que les blessés de guerre ont un véritable droit à la réparation du dommage résultant pour eux de leur infirmité ». 1er Congrès national des mutilés et des réformés, novembre 1917.

54 Proposition de loi tendant à modifier la législation des pensions des armées de terre et de mer, JORF, du 4 octobre 1917, n° 3826, p. 3.

55 Les Marocains des troupes auxiliaires (jusqu’en 1923) et les indigènes dont le recrutement ne s’opère pas par voie de conscription.

56 Charles Valentino, Les pensions aux indigènes des colonies et à leur ayant cause, Paris, Berger-Levrault, 1925, p. 3-5.

57 Charles Valentino, Le droit à réparation et la présomption d’origine des bénéficiaires, Paris, Berger-Levrault, 1924.

58 Il convient de lire, concernant les contraintes indirectes liées à un refus de traitement par un infirme pour qu’il puisse être de nouveau qualifié comme apte au service, l’ouvrage de Paul Meunier : Le droit des blessés, Paris, Paul Ollendorf, 1916.

59 Bouniceau-Gesmon, « Les conseils de révision et les tribunaux correctionnels », Revue pratique de droit français, 1874, p. 310.

60 La milice provinciale sera créée par Louvois pour devenir une réserve plus structurée au profit de l’armée d’active.

61 L’officier corrupteur risquait lui, non la mort, mais d’être cassé et pouvait être déclaré incapable d’occuper jamais aucune fonction militaire.

62 On consultera avec profit : Pierre de Briquet, Code militaire ou compilation des ordonnances des rois de France concernant les gens de guerre, Paris, Jean-Baptiste Coignard, 1734.

63 CE, 17 mai 1878, ministre de la Guerre c. André, n° 52-947, Lebon, 1978, p.452 : Tribunal militaire de cassation permanent de Paris, 1er février 1940, C. D. 1940.1.67. Il a été jugé que seuls les militaires peuvent être punis au titre d’une mutilation volontaire, les réservistes non incorporés et qui ne sont pas inscrits sur un contrôle de corps, même dans un territoire en état de siège en sont exclus. Et ce bien que la loi du 31 mars 1928 vise tout homme prévenu de s’être rendu impropre au service militaire.

64 L’on peut mentionner à titre d’exemple les trois condamnations des jeunes soldats de la classe de 1876 pour tentatives ou mutilation. Tribunal correctionnel de Pamier, 17 avril 1877, Baptiste Jean Dupuy (un mois de prison pour tentative) ; Tribunal correctionnel de Montargis, 13 juin 1877, Vincent Chaumeron (deux mois pour mutilation) ; Tribunal correctionnel de Caen, 9 juillet 1877, Pierre-Eugène Legouis (deux mois pour mutilation).

65 Cass. Civ. 10 novembre 1845, n° 133 (affaire Paratarrieu et Gude).

66 Cass. Crim. 13 août 1813, n° 178 (affaire Mongenot et Julien).

67 Edmond Boisseau, Des maladies simulées et les moyens de les reconnaître, Paris, J. B. Baillère et Fils, 1870 ; « Considérations sur les maladies simulées en particulier », Annales d’hygiène publique et de médecine légale, 1869, p. 331 ; Docteur Huguet, Recherches sur les maladies simulées et mutilations volontaires observées de 1859 à 1896, Paris, Henri Charles Lavauzelle, 1896.

68 Joseph Barthélémy, « Les conseils de guerre », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, t.33, 1916, p. 112. R. G. Réau, Les crimes des conseils de guerre, Paris, Éditions du « progrès civique », 1925. Cet ouvrage comporte une étude concernant les mutilés de Verdun.

69 Cass. Crim. 18 mars 1915, Gazette des tribunaux, 1916.1.41 (affaire Jules Arrio).

70 Ibid.

71 Cass. Crim. 23 mars 1915, Gazette des tribunaux, 1916.1.42 (affaire Joseph Lucas).

72 Ibid., Cass. Crim. 8 décembre 1916, D.1917. Bull. somm. 12 (affaire Giovannangeli) dans son élan le commentateur de l’arrêt qualifie le condamné comme étant un blessé de guerre.

73 Ibid., p. 43.

74 Cass. Crim. 2 août 1917, JORF, 1918, p. 9124-9125 (affaires Tomasini, Odde, Gauthier et Pellet).

75 Cass. Crim. 6 février 1823, Affaire Lièvre, Bull. 1823.55 (concernant une récidive après l’obtention d’une lettre de réhabilitation).

76 CE, 9 avril 1927, Schwendimann, Lebon, 1927, p. 492.

77 Lehmann, Cassin et Bellier, « Rapport de la commission des lois sociales, Congrès national des mutilés, veuves et anciens combattants », Revue interalliée pour l’étude des questions intéressant les mutilés de guerre, janvier 1919, p. 272.

78 Henri Dunant, Un souvenir de Solférino. Ne se vend pas, Genève, imprimerie Jules-Guillaume Fick, 1862, p. 104.

79 André François-Poncet, Henry Dunant, Les prix Nobel de la paix, Monaco, Union européenne d’éditions, 1962, p. 50. Les Comités nationaux permanents (de la croix rouge) participent à « assurer des moyens d’existence aux blessés lorsqu’ils sont restés invalides ». Henri Dunant, Un souvenir de Solférino, Paris, Hachette, 1870, p. 142.

80 Victor Hugo, L’Homme qui rit, op. cit., p. 420-422.

Citer cet article

Référence électronique

Éric MARTINENT, « Les invalides dans la littérature juridique, autour des représentations de la dette patriotique », Sociopoétiques [En ligne], 6 | 2021, mis en ligne le 19 octobre 2021, consulté le 25 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=1307

Auteur

Éric MARTINENT

Université Jean Moulin Lyon 3 

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