Introduction

Plan

Texte

L’étape, en tant que halte au cours d’un périple, constitue une expérience paradoxale puisqu’il s’agit pour le voyageur d’investir, volontairement ou non et pour un temps variable, un lieu qui n’est pas son domicile. Ce paradoxe peut se résumer en une formule oxymorique : habiter ailleurs, et qui plus est, habiter temporairement ailleurs. Faire étape, c’est, après avoir quitté son chez-soi, devoir interrompre une trajectoire pour tenter de reconstruire brièvement un environnement propice au réconfort, au repos et, parfois, à la survie, en territoire étranger.

Qu’elle soit individuelle ou collective, l’étape s’inscrit dans une réalité sociale complexe. Elle est tributaire des conditions de la mobilité, qui varient en fonction des époques, des territoires et du statut du voyageur. Elle renvoie aux modalités de l’hébergement – bivouac, camp, logis autochtone, auberge, lazaret, hôtel, refuge, etc. Mais l’habiter, on le sait, ne se limite pas à l’habitat, il engage un rapport complexe aux usages sociaux et, plus encore, aux représentations de ces usages : attentes suscitées par les codes de l’hospitalité, intérêt pour les mœurs différentes (ou prévention à leur encontre), curiosité (ou hostilité) à l’égard des autres voyageurs, besoin de s’entendre et de cohabiter en dépit des barrières linguistiques et culturelles…

La diversité des modalités de l’étape se laisse appréhender à travers des sources multiples. Les archéologues s’intéressent aux vestiges des stations et des auberges installées au bord des voies antiques et aux services qu’elles pouvaient fournir aux voyageurs (hébergement, restauration, réparation des harnachements et changement des fers des chevaux)1. Les historiens interrogent les cartes routières et les règlements qui favorisent le développement du réseau routier et des relais de poste2, cherchent dans les archives des traces des hébergements précaires du passé3 et recherchent dans les récits de voyage et les fictions qui leur sont contemporaines des témoignages sur les hôtelleries et les usages viatiques4. Anthropologues, sociologues et architectes mettent en évidence la standardisation des lieux d’étapes hyperconnectés de nos sociétés mondialisées que caractérisent la généralisation et l’accélération des mobilités5.

Dès l’Antiquité, la littérature et les arts se sont emparés de l’étape, exploitant et détournant les représentations qu’elle suscite avec une constance et une inventivité remarquables. C’est ce qui en fait un sujet privilégié pour une analyse sociopoétique, dont l’objet est précisément l’étude de l’écriture des représentations sociales. En 2020-2022, le séminaire de sociopoétique du Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique (CELIS) a été l’occasion d’examiner la façon dont la littérature et les arts fabriquent et renouvellent les représentations sociales de l’étape. Cette recherche collective, dont ce dossier est l’aboutissement, a mis en lumière la diversité de l’écriture de l’étape et de ses enjeux, qui renvoient toujours à un contexte singulier. Néanmoins, au fil de nos échanges, sont apparus, dans les déclinaisons littéraires et artistiques de la halte, des invariants qui tous renvoient à l’intensité de l’expérience sociale que l’étape, dans sa paradoxale spécificité, rend possible. La première ligne de force de ces représentations concerne la capacité de l’étape à mettre à l’épreuve le lien social. La deuxième souligne sa propension à engendrer du récit à partir des rencontres qu’elle ménage. La troisième, enfin, valorise l’impact de cette expérience en faisant de l’étape un espace-temps privilégié de la révélation.

Le microcosme social

En arrachant l’individu à son cadre familier, le voyage le rend vulnérable et dépendant des habitants des pays traversés. Dans de nombreuses sociétés, cette fragilité du voyageur est contrebalancée par une tradition d’hospitalité soutenue par la religion. Au Moyen Âge, c’est un devoir sacré d’accueillir le pèlerin qui se rend à Saint-Jacques de Compostelle et de le recevoir comme s’il était le Christ, conformément aux préceptes de l’évangile de Mathieu6.

Dès l’Antiquité, le nombre et la diversité des voyageurs suscitent, en marge de cette hospitalité traditionnelle, des structures d’hébergement payant. En Grèce, explique Marie-Claire Grassi7, on a recours à une auberge quand on ne connaît personne susceptible de vous accueillir. Dans l’Empire romain, il existe deux « circuits hôteliers », l’un public, destiné aux riches particuliers dotés d’une autorisation, l’autre privé, destiné au tout venant des voyageurs. Et encore au Moyen Âge, l’auberge se distingue de l’hostel, demeure plus prestigieuse qui accueille des voyageurs de marque ou de l’hospice destiné aux pèlerins au sein d’une abbaye. L’auberge se situe donc tout en bas de la hiérarchie des hébergements, ce qui explique sa désastreuse réputation dans la littérature antique et médiévale. Pourtant, même au sein de ces établissements douteux et souvent malfamés, la question de l’accueil du voyageur reste présente : l’humanité d’une hôtesse compense volontiers, dans les récits du Moyen Âge, la médiocrité du gîte, du couvert et de la compagnie8 et c’est encore la sociabilité des aubergistes italiens que Stendhal met en balance dans ses Mémoires d’un touriste avec le confort anglais comme critère d’évaluation des auberges et des hôtels.

L’hôtesse de l’auberge du Grand Cerf dans Jacques Le Fataliste et son maître de Diderot apparaît comme un avatar de ces hôteliers sur lesquels repose la réputation de leur établissement. Parfaitement éduquée (à Saint-Cyr), encore belle et incroyablement bavarde, elle conquiert les plus récalcitrants. On la découvre se démultipliant pour accueillir les voyageurs, répondre à leurs besoins et satisfaire leur curiosité à la faveur de soirées arrosées au champagne :

Au milieu de ces lamentations on sonnait d’un côté, et l’on criait : « Notre hôtesse ! du vin… » Elle répondait : on y va. » On sonnait d’un autre côté, et l’on criait : « Notre hôtesse ! du linge… » Elle répondait : « On y va. – Les côtelettes et le canard. – On y va. – Un pot à boire, un pot de chambre. – On y va, on y va9… »

Au rôle central dévolu à l’hôtesse, dans le roman de Diderot, répond l’importance reconnue à la figure de celui ou de celle qui accueille, que ce soit le gardien du refuge dans les récits de haute montagne10 ou les bénévoles dans la littérature du refuge11. Garants d’une tradition d’hospitalité et de la mémoire du lieu, ces figures ont seules le pouvoir de transformer en communauté un agrégat d’étrangers. Leur bienveillance, leur disponibilité, leur capacité à rappeler les règles de la vie commune et le souvenir des précédents occupants rendent le refuge, l’auberge, l’hôtel ou le camp habitable. Car habiter l’étape, ce n’est pas seulement trouver un hébergement, c’est pouvoir, nous l’avons vu, investir le lieu, s’approprier une mémoire et un imaginaire, adhérer aux possibles que cette halte suscite et pouvoir ainsi façonner son propre monde au sein d’un monde commun12. L’hôte, le gardien ou le bénévole facilitent cette appropriation en recréant de la continuité et du lien social entre des individus ou des groupes isolés.

Comme le souligne Daniel Roche, deux types de sociabilité apparaissent liés à l’auberge dans les récits de voyage : « la première est celle de la criminalité, de la violence, de la marginalité. L’auberge est, comme le cabaret dont elle est souvent proche, le lieu favorable aux transactions et aux exactions. Partout les historiens y ont retrouvé prostitution, grivèlerie, vol, fraude et escroqueries des hôtes, bagarres avec le voisinage, insultes, voire plus rarement meurtre. » La seconde repose « sur le pittoresque et la richesse de la rencontre13 », le plaisir de la rencontre et de la conversation. Cette ambivalence, très caractéristique des imaginaires de l’étape, révèle clairement l’enjeu de cette expérience qui met à l’épreuve la capacité des voyageurs à faire société en dehors des règles qui régissent leur vie sédentaire. En tant que telle, l’étape apparaît comme un laboratoire, un microcosme où peut se réinventer une cohabitation inédite avec des compagnons dont rien ne laissait présumer la fréquentation.

Ce questionnement apparaît prégnant dans la tradition littéraire, où l’étape reste le lieu d’une expérience contrastée et souvent ambivalente : du Don Quichotte de Cervantès au Malentendu de Camus, les rencontres d’auberges font naître des rêves mais aussi des désillusions, car les attentes des voyageurs s’avèrent en décalage comique ou tragique avec la réalité du microcosme hôtelier. Les rêves héroïques de Don Quichotte se heurtent à la trivialité de l’auberge, qui apparaît comme un double parodique du château14, et ceux de Jan, l’enfant prodigue, se fracassent contre l’insensibilité de sa mère et de sa sœur, qui croient pouvoir échapper à leur condition en volant les voyageurs assassinés durant leur sommeil.

Ces illusions de la halte, Pierrette Fleutiaux les analyse avec acuité dans son récit Destiny, lorsqu’Anne vient rendre visite à Destiny, une jeune Nigériane avec qui elle s’est liée en dépit des difficultés de compréhension et des aléas de la précarité. Après son accouchement, Destiny a trouvé un hébergement dans une résidence d’urgence à Noisy où, après bien des errances, Anne parvient jusqu’à la porte – fermée – de la jeune femme :

Elle essaie en vain d’ouvrir, d’interroger une femme qui passe par là, traînant les pieds, éteinte, et de toute façon ne parlant aucune langue qu’elle puisse reconnaître. Une autre, plus vive, ne sait rien non plus.
Soudain elle comprend.
Comme un château de cartes, tous les rêves qu’elle a échafaudés sur ce nouveau lieu de résidence s’effondrent d’un seul coup.
De voisinage il n’y a pas.
De véritables voisins ou voisines – des gens qui parlent de la pluie et du beau temps, peuvent vous prêter un œuf, garder votre clé ou juste vous saluer, montrer qu’ils vous reconnaissent, à défaut de vous connaître – de ces voisins-là, il n’y a pas. Derrière chaque porte, des locataires éphémères, des êtres de passage, sans langue commune, ou juste quelques bribes, celles de la survie. De la solidarité, il n’y a pas non plus. Chacun pour soi, méfiance pour tous. Pas d’enfants jouant ensemble dans les couloirs ou sur la dalle, pas de groupes de femmes discutant devant une fenêtre ou un ascenseur, du silence, quelques portes qui claquent brutalement ici ou là, terriblement bruyantes dans le silence, mais ce fracas n’est pas le fait de gens pressés, de gens pleins de vie et d’activités, c’est juste le fait de ces portes et de ces murs, fabriqués ainsi, ne pouvant que faire du bruit, encore une qui claque, dans un couloir lointain, dans les profondeurs du bâtiment, son cœur fait un bond, elle a la main sur la poignée, de nouveau ce petit miaulement infime à l’intérieur, elle tourne encore la poignée. Fermé.
Prendre une décision. Il n’y a qu’elle ici. Personne au monde pour s’enquérir d’une jeune femme noire nommée Destiny et de son bébé Glory15.

Ainsi, parce qu’elle oblige le voyageur ou le migrant à refaire société, de gré ou de force, quelques heures ou plusieurs années, loin de ses repères familiers, l’étape apparaît comme une expérience privilégiée pour interroger les usages et les représentations sociales. Fictif ou non, le récit joue des surprises – bonnes ou mauvaises – que ménage cette situation et des décalages multiples qu’elle favorise. À ce titre, l’étape apparaît comme un épisode privilégié du récit qui révèle une vérité profonde sur les personnages et la société dans laquelle ils évoluent.

La matrice narrative

Observatoire de la vie sociale mettant à l’épreuve les valeurs des protagonistes, l’étape fonctionne également – et souvent simultanément – comme un aiguillage narratif qui donne au récit une impulsion et une orientation décisives.

Le microcosme de l’étape est en effet lieu de rencontres dont l’impact peut s’avérer majeur sur la trajectoire des protagonistes : c’est devant une hôtellerie d’Amiens que le chevalier des Grieux découvre Manon Lescaut à sa descente du coche d’Arras et c’est à l’auberge que Casanova rencontre quelques-uns de ses plus grands amours : Bellino-Thérèse à Ancône et Henriette à Césène. Dans les deux cas, le Vénitien n’est pas dupe du travestissement masculin des jeunes femmes avec qui il poursuit sa route, d’auberge en hôtel, et noue une liaison passionnée. Et c’est en repassant à Genève, en 1760, qu’il découvre, bouleversé, la trace d’Henriette à laquelle il avait dû renoncer dans la même auberge :

M’approchant de la fenêtre, je regarde par hasard les vitres, et je vois écrit avec la pointe d’un diamant Tu oublieras aussi Henriette. Me rappelant dans l’instant le moment dans lequel elle m’avait écrit ces paroles, il y avait déjà treize ans, mes cheveux se dressèrent. Nous avions logé dans cette même chambre quand elle se sépara de moi pour retourner en France16

L’auberge, dans l’Histoire de ma vie, est le passage obligé et récurrent d’une vie d’aventurier prompt à saisir ses bonnes fortunes mais aussi soumis aux vicissitudes du destin. Elle cristallise bien ces deux facettes : l’opportunité et l’euphorie toujours renouvelées de la rencontre mais aussi l’instabilité, une forme de précarité sociale et affective que le passage du temps ne fera qu’accentuer.

De façon générale, l’étape à l’auberge est dans le récit de l’époque médiévale et moderne un moment critique, espace-temps de l’inattendu où se cristallisent les craintes et les désirs des protagonistes. C’est dans cette perspective qu’on peut analyser la fonction de l’auberge et de l’hôtellerie dans les nouvelles du Décaméron de Boccace17, Le Roland furieux de l’Arioste18, et les romans comiques de Sorel, Scarron ou Furetière19. L’étape joue dans ces œuvres le rôle d’un nœud narratif où la trajectoire des protagonistes peut rebondir, bifurquer ou basculer.

Les genres populaires littéraires et/ou cinématographiques – aventure, polar, western, science-fiction… – exploitent systématiquement la tension dramatique inhérente à cette incertitude. Aussi nécessaire que dangereuse, l’étape attise les peurs archaïques du lecteur-spectateur, sur lesquelles jouent aussi les contes de l’enfance (Le Petit Poucet, Hansel et Gretel…). L’œuvre d’un Cormac McCarthy tire son efficacité de ce mécanisme éprouvé puisque la destinée errante des personnages y semble sans cesse menacée par une fatalité à laquelle les expose leur extrême vulnérabilité20. Dans L’Obscurité du dehors, Rinthy cherche son enfant sur les routes d’un vieux Sud rance et plein d’insécurité. Encore adolescente, cheminant à pied, sans argent, elle ne peut même pas descendre à l’auberge et demeure tributaire d’une hospitalité dont le lecteur craint toujours qu’elle ne se renverse en piège :

Quand elle aperçut de la lumière à travers les arbres devant elle, elle s’arrêta de nouveau, méfiante, ses mains contre son cœur angoissé.
Elle fut accueillie à la porte de la petite maison par un homme qui tenait en l’air une lanterne au-delà de laquelle se dessinaient dans une frange de mince lumière les visages serrés de plusieurs femmes de tous âges, dont une antique commère qui n’avait point de nez.
Oui, dit l’homme. Qu’est-ce que c’est ?
Les yeux noirs de la vieille se fermèrent et se rouvrirent lentement de chaque côté de ses longues narines de chauve-souris.
Tu t’es égarée ?
Elle serrait très fort son baluchon. Egarée, dit-elle. C’est ça, j’me suis égarée. J’me demandais si vous me laisseriez pas me reposer un petit moment.
L’homme l’observait, une main levée tenant la lanterne, l’autre tripotant un bouton sur sa poitrine.
Oui. Dis-lui que oui.
Merci, dit-elle.
L’homme se tourna vers la femme qui venait de parler. Chut, dit-il. Il se tourna de nouveau vers la vagabonde. D’où est-ce que tu viens à c’t’heure21 ?

La halte, c’est le risque d’une rencontre, de trajectoires qui se croisent, pour le meilleur et pour le pire.

Mais cet enchevêtrement des destinées ne produit pas que du suspens : il produit aussi du discours – des informations qui peuvent aider les protagonistes dans leur quête et aussi des histoires qui favorisent l’insertion de récits dans le récit. Comme le fait remarquer Isabelle Rouane-Soupault à propos du Don Quichotte de Cervantès, il existe une véritable analogie entre le cadre de l’auberge et les récits interpolés qu’elle encourage : dans les deux cas, un décrochement se produit dans la trame du récit principal marqué par l’irruption de nouveaux personnages dans un cadre différent. « L’étape dans l’auberge constitue une pause à la fois dans le voyage et dans le dévidement discursif22 » même si, bien entendu, ces parenthèses ont à voir, de près ou de loin, avec l’action principale.

Diderot, dans Jacques le fataliste et son maître, reprend la formule de Cervantès. En dotant l’hôtesse de l’auberge du Grand Cerf de la « passion de parler », en attirant l’attention de Jacques et de son maître sur leurs voisins de chambre, il introduit insensiblement l’histoire du Marquis des Arcis et de Madame de La Pommeraye (que le domestique des voyageurs a dite à la servante de l’auberge, qui l’a redite à l’hôte, qui l’a répétée à l’hôtesse). Cette célèbre histoire, dont Jacques propose, avec sa fable de la gaine et du coutelet une glose burlesque, possède une unité telle qu’elle est parfois éditée séparément et a fait l’objet de plusieurs adaptations cinématographiques23. Pourtant, la vengeance de cette femme d’exception, qui, déçue par son compagnon, le pousse à épouser une ancienne prostituée, prend tout son sens dans le cadre d’un roman qui ne cesse d’interroger l’idéalisation de l’amour et de mettre en évidence la fragilité de l’humaine prétention à la fidélité. La gratuité de la digression que constitue le récit inséré n’est qu’apparente. Comme la halte à l’auberge, la pause narrative que ménage l’histoire du marquis des Arcis s’avère une sorte de point focal qui vient rassembler et mettre en perspective les motifs dispersés dans le roman, incitant les personnages à s’interroger et les spectateurs à réfléchir au sens de l’œuvre.

Espace-temps privilégié de la rencontre, l’étape permet la confrontation des expériences. Que celle-ci alimente le récit principal ou ménage en son sein une pause réflexive, elle joue un rôle essentiel dans la trajectoire des personnages.

Initiation et métamorphoses

La dimension initiatique de l’étape est étroitement liée à son rôle de nœud fictionnel et de point focal réflexif. Elle passe par la rencontre et la prolifération du discours mais doit beaucoup également à la singularité du lieu et à son caractère transitionnel.

Cette transition, pour le voyageur qui s’aventure dans une contrée lointaine, est d’abord culturelle ; le monde des hôtelleries et des relais apparaît ainsi comme un moyen privilégié de découverte des mœurs locales. À ce titre, il fournit, comme le souligne Daniel Roche, « l’occasion de voir comment fonctionne un espace liminal ni totalement marginal ni totalement intégré24 ». Le lieu d’étape joue ainsi le rôle d’un sas, d’une transition, a fortiori lorsqu’il se situe à la frontière entre deux mondes. Même lorsqu’il se referme sur le voyageur ou le migrant (lazaret, zone ou camp de transit25…), il impose un autre rapport au temps, celui de l’attente indéfinie, de l’ennui, au sein d’une enclave régie par ses propres lois.

L’identité, au sein de cet espace, est remise en jeu parce que, le plus souvent, les voyageurs ne se connaissent pas entre eux et ne sont pas connus de leurs hôtes. Dans Tom Jones de Fielding, comme dans les comédies du xviiie siècle, la confrontation à l’auberge des notables et des marginaux suscite quiproquos et débats sur la valeur des dignités sociales26. Mais la nécessité de renégocier dans un contexte nouveau son statut et son identité favorise également les métamorphoses, soit que le sujet se trouve confronté à une expérience extrême qui le révèle à lui-même27, soit que la liberté nouvelle dont il jouit lui permette d’accéder à sa vérité profonde. Les étapes de la route apparaissent ainsi comme des espaces d’émancipation féminine, que ce soit dans Thelma et Louise de Ridley Scott28 ou dans Carol de Patricia Highsmith. Therese, l’héroïne, accompagne Carol dans un périple à travers les USA qui les mène d’hôtel en hôtel. Loin de leurs attaches respectives – elles ignorent que le mari de Carol les fait suivre par un détective privé qui pose des micros dans leurs chambres – les deux femmes entament une vie commune et Therese, qui n’avait jamais été amoureuse, a la révélation d’une plénitude érotique et d’un bonheur inconnus :

Et elle n’avait pas à demander si c’était « bien comme ça », personne n’avait à le lui dire, parce que le moment n’aurait pu être plus parfait. Elle serra Carol plus fort contre elle et sentit la bouche de Carol contre sa bouche souriante. […]
Therese leva les yeux vers les angles des murs, bien plus brillants à présent, la commode ventrue, aux poignées en forme de bouclier, le miroir biseauté, les rideaux à motifs verts tendus devant le jour, les cimes grises des immeubles qui apparaissaient entre le rebord des fenêtres et le bas des rideaux. Elle se souviendrait à jamais de chaque détail de cette chambre.
« Dans quelle ville sommes-nous ? » demanda-t-elle.
Carol rit. « À Waterloo29. »

Cadre d’une expérience intime bouleversante, qu’elle soit érotique ou spirituelle, politique ou existentielle30, l’étape apparaît comme un lieu initiatique qui peut fournir au sujet la réponse à une quête restée longtemps vaine. C’est dans cette perspective qu’on peut envisager la rencontre de Jean Valjean et de monseigneur Myriel, dans Les Misérables de Victor Hugo, ou la dernière halte de Giovani Drogo dans Le Désert des Tartares de Dino Buzzati31. À l’issue d’une vie marquée par l’illusion et la frustration, l’officier échoue dans une modeste auberge dont seuls sont mentionnés quelques occupants : une femme qui tricote tandis que dort paisiblement à ses pieds, dans son berceau rustique, un petit enfant, des hommes qui chantent des chansons d’amour dans la salle commune. Lui-même va mourir mais se sent soudain capable d’accueillir dignement la mort qu’il a toujours redoutée. Parce que « rien n’est plus difficile que de mourir en un pays étranger et inconnu, sur le lit banal d’une auberge, vieux et enlaidi, sans laisser personne au monde derrière soi32 », ce dernier combat peut seul racheter toute une vie de lâchetés. Et cette certitude remplit Giovani Drogo d’une joie immense. La modestie de cette dernière étape le réconcilie avec sa condition humaine.

L’étape apparaît donc comme un motif d’une grande richesse sociopoétique et d’une exceptionnelle longévité dans la littérature et les arts du spectacle. En recréant un microcosme social, elle interroge la diversité des usages et des mœurs mais elle favorise également les rencontres et les échanges, ce qui en fait une inépuisable matrice discursive. Ainsi, quelles qu’en soient les modalités, le lieu d’étape interroge nos représentations et nos valeurs ; il confronte les personnages et les lecteurs-spectateurs à la fragilité des identités sociales et interroge leurs aspirations profondes.

Les douze articles qui composent ce dossier permettent d’envisager les variations de ces motifs du Moyen Âge à la période la plus contemporaine, celle des confinements sanitaires et des camps de migrants établis aux frontières d’une Europe barricadée. À la différence du très riche numéro 17 du Cahier d’études romanes, paru en 2007, qui portait déjà sur les « Auberges, hôtels et autres lieux d’étapes », ces articles s’intéressent donc non seulement aux topoï de la halte mais aussi à ce que deviennent ces représentations dans des contextes plus contemporains, lorsque les mutations de l’étape appellent de nouvelles écritures et invitent à réévaluer nos certitudes.

Les quatre premiers articles envisagent l’étape sous des modalités variées mais relativement topiques : Françoise Laurent s’interroge sur la signification du réseau d’étapes qu’institue le Guide du pèlerin de Compostelle, composé au xiie siècle, rappelant le rôle qualifiant de la halte pour le pèlerin médiéval. Je me suis intéressée au jeu des fausses identités dans les comédies d’auberges de la période révolutionnaire en mettant en évidence la pertinence de ce motif dans un contexte de redéfinition des hiérarchies et des valeurs sociales. Arlette Girault-Fruet revient sur les deux voyages que Chateaubriand a effectués en Bohème en 1833 et sur les éblouissements inhérents à quelques brèves rencontres ménagées par ses haltes. Enfin, Jean Ghidina s’est penché sur quatre récits contemporains italiens centrés sur le refuge alpin en s’intéressant à la valeur initiatique de ces lieux d’étape qui offrent une alternative radicale aux valeurs et au fonctionnement de la société de consommation.

Les quatre articles suivants questionnent les mutations de la halte dans un contexte contemporain ou hypercontemporain qui met à l’épreuve les valeurs d’hospitalité de l’étape et la capacité à recréer de la sociabilité dans des non-lieux anonymes et standardisés. Catherine Morgan-Proux et Manon Amandio ont ainsi choisi d’étudier deux lieux d’étapes typiques du modèle états-unien triomphant du xxe siècle : la station-service et le diner. Alain Montandon s’est intéressé à ce que deviennent, dans la comédie cinématographique, les voyageurs bloqués à l’aéroport et Yvan Daniel a collecté les traces médiatiques et littéraires des victimes de la pandémie de COVID 19, contraintes à des étapes indésirées.

Enfin, les quatre derniers articles de ce dossier sont consacrés à un lieu d’étape bien particulier : le camp ou le campement. Sidonia Bauer revient d’abord sur l’importance du campement dans l’art de vivre des Romanis. Philippe Antoine étudie les œuvres originales que suscite la déclinaison touristique contemporaine de ce campement, à partir du témoignage de camping-caristes. Quant à Lila Lamrous, Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia, elles analysent les paradoxes de ces enclaves que sont les camps de migrants contemporains. Lila Lamrous envisage la traversée de la Méditerranée comme un encampement paradoxal dans la soute d’un navire tandis que Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia questionnent le « radeau de baluchons et de valises » (Patrick Chamoiseau) que constitue le camp de migrants et la spécificité de la littérature du refuge qu’il suscite.

Comme le révèlent ces études, la littérature et les arts, en mettant en perspective le sens de l’étape, c’est-à-dire d’une expérience individuelle et collective fondamentale, nous aident à penser le monde contemporain.

1 Voir Michel Passelac, « La voie d’Aquitaine entre Tolosa (Toulouse, Haute-Garonne) et Carcaso (Carcassonne, Aude) : stations et sites de bord de la

2 Voir Anne Bretagnolle et Alain Franc, « Les Routes de la poste à cheval et les petites villes en France », in Routes et petites villes de l’

3 Voir Céline Regnard et Stéphane Mourlane, « L’enclos Peyssonnel, modèle de bidonville marseillais (années 1950-1960) » et Eleonora Canepari, « 

4 Voir Daniel Roche, Humeurs vagabondes. De la circulation des hommes et de l’utilité des voyages, Paris, Fayard, 2003, p. 517-557.

5 Voir Marc Augé, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Éditions du Seuil, 1992, 160 p. et Yasmine Abbas, Le

6 Voir l’article de Françoise Laurent dans le présent dossier. Sur ces traditions d’hospitalité, voir les travaux d’Alain Montandon, notamment Alain 

7 Marie-Claire Grassi, « Hostellerie. De l’auberge à l’hôtel », dans Alain Montandon (dir.), op. cit., p. 726-735.

8 Voir Jean-Louis Picherit, « L’hôtellerie, les hôteliers et hôtelières dans quelques œuvres de la fin du Moyen Âge », Le Moyen Âge, vol. CVIII, no 2

9 Denis Diderot, Jacques Le Fataliste et son maître, in Œuvres philosophiques de Denis Diderot, tome cinquième, Bruxelles, Librairie philosophique

10 Voir à ce sujet l’article de Jean Ghidina dans ce dossier.

11 Voir l’article de Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia dans ce dossier.

12 Voir Thierry Paquot, « “Habitat”, “habitation”, “habiter”, précisions sur trois termes parents », in Habiter, le propre de l’humain. Ville

13 Daniel Roche, op. cit., p. 553.

14 Voir Isabelle Rouane Soupault, « Les fonctions narratives de l’auberge dans Don Quichotte de Miguel de Cervantès », Cahier d’études romanes. Revue

15 Pierrette Fleutiaux, Destiny, Arles, Actes Sud, 2016, p. 62-63.

16 Casanova, Histoire de ma vie, Paris, Robert Laffont, 2015, t. II, p. 479-480.

17 Voir René Stella, « La fonction narrative de l’auberge dans le Décaméron », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007, « Auberges

18 Voir Fanny Eouzan, « L’hôtellerie dans le Roland furieux : repos des guerriers ou coulisses de la narration ? », Cahier d’études romanes. Revue du

19 Daniel Roche, op. cit., p. 520 sq.

20 Voir en particulier, Cormac McCarthy, Outer Dark (1968) et The Road (2006).

21 Cormac McCarthy, L’obscurité du dehors, traduit de l’anglais (États-Unis) par François Hirsch et Patricia Schaeffer, Arles, Actes Sud, Points

22 Isabelle Rouane-Soupault, art. cit., p. 116.

23 Voir par exemple, Diderot, Madame de La Pommeraye, précédé de Madame de La Carlière, édition de Jacques Vassevière, Paris, Le Livre de Poche

24 Daniel Roche, op. cit., p. 518.

25 Voir les articles d’Yvan Daniel, de Lila Lamrous, et de Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia dans ce dossier.

26 Voir Daniel Roche, op. cit., p. 522.

27 Voir les articles de Jean Ghidina et de Lila Ibrahim-Lamrous dans ce dossier.

28 Voir l’article de Catherine Morgan-Proux dans ce dossier.

29 Patricia Highsmith, Carol [1952], traduit de l’anglais (États-Unis) par Emmanuelle de Lesseps, Paris, Calmann-Lévy, 2021, p. 248-249.

30 Voir Philippe Antoine, « Ne pas coucher dans son lit. Comment et où dort-on dans le récit de voyage », Sociopoétiques, n° 1, 2016, § 14 sq.[En

31 Voir Judith Obert, « Il deserto dei Tartari de Dino Buzzati : étapes vers l’auberge étoilée », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007

32 Dino Buzzati, Le Désert des Tartares [1949], traduit de l’italien par Michel Arnaud, Paris, Le Livre de poche, 1988, p. 239.

Notes

1 Voir Michel Passelac, « La voie d’Aquitaine entre Tolosa (Toulouse, Haute-Garonne) et Carcaso (Carcassonne, Aude) : stations et sites de bord de la route », Gallia. Archéologie des Gaules, 73-1, 2016, Stations routières en Gaule romaine, p. 253-273 [En ligne] URL : http://journals.openedition.org/gallia/614 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gallia.614 [consulté le 5 mars 2021].

2 Voir Anne Bretagnolle et Alain Franc, « Les Routes de la poste à cheval et les petites villes en France », in Routes et petites villes de l’Antiquité à l’époque moderne, Céline Perol et Jean-Luc Fray (dir.), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, coll. « Histoires croisées », 2020, p. 19-41.

3 Voir Céline Regnard et Stéphane Mourlane, « L’enclos Peyssonnel, modèle de bidonville marseillais (années 1950-1960) » et Eleonora Canepari, « Habiter la précarité : cabanes, étables, grottes et leurs habitants (xvie-xviie siècles) », in Mobil Hom(m)es. Formes d’habitats et modes d’habiter la mobilité (xvie-xxie siècles), Eleonora Canepari, Béatrice Mésini, Stéphane Mourlane (dir.), La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, coll. « Bibliothèque des territoires », 2016, p. 23-33 et p. 75-82.

4 Voir Daniel Roche, Humeurs vagabondes. De la circulation des hommes et de l’utilité des voyages, Paris, Fayard, 2003, p. 517-557.

5 Voir Marc Augé, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Éditions du Seuil, 1992, 160 p. et Yasmine Abbas, Le néo-nomadisme. Mobilités, partage, transformations identitaires et urbaines, Limoges, Éditions FYP, 2011, 141 p.

6 Voir l’article de Françoise Laurent dans le présent dossier. Sur ces traditions d’hospitalité, voir les travaux d’Alain Montandon, notamment Alain Montandon (dir.), Le livre de l’hospitalité Accueil de l’étranger dans l’histoire et les cultures, Paris, Bayard, 2004, 2035 p.

7 Marie-Claire Grassi, « Hostellerie. De l’auberge à l’hôtel », dans Alain Montandon (dir.), op. cit., p. 726-735.

8 Voir Jean-Louis Picherit, « L’hôtellerie, les hôteliers et hôtelières dans quelques œuvres de la fin du Moyen Âge », Le Moyen Âge, vol. CVIII, no 2,‎ 2002, p. 301-332 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.3917/rma.082.0301.

9 Denis Diderot, Jacques Le Fataliste et son maître, in Œuvres philosophiques de Denis Diderot, tome cinquième, Bruxelles, Librairie philosophique, 1829, p. 138.

10 Voir à ce sujet l’article de Jean Ghidina dans ce dossier.

11 Voir l’article de Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia dans ce dossier.

12 Voir Thierry Paquot, « “Habitat”, “habitation”, “habiter”, précisions sur trois termes parents », in Habiter, le propre de l’humain. Ville, territoires et philosophies, Thierry Paquot, Michel Lussault, Chris Younès (dir.), Paris, La Découverte, 2007, p. 7-16.

13 Daniel Roche, op. cit., p. 553.

14 Voir Isabelle Rouane Soupault, « Les fonctions narratives de l’auberge dans Don Quichotte de Miguel de Cervantès », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007, « Auberges, hôtels et autres lieux d’étapes », p. 105-127 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/etudesromanes.803.

15 Pierrette Fleutiaux, Destiny, Arles, Actes Sud, 2016, p. 62-63.

16 Casanova, Histoire de ma vie, Paris, Robert Laffont, 2015, t. II, p. 479-480.

17 Voir René Stella, « La fonction narrative de l’auberge dans le Décaméron », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007, « Auberges, hôtels et autres lieux d’étapes », p. 21-90 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/etudesromanes.794.

18 Voir Fanny Eouzan, « L’hôtellerie dans le Roland furieux : repos des guerriers ou coulisses de la narration ? », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007, « Auberges, hôtels et autres lieux d’étapes », p. 185-195 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/etudesromanes.837.

19 Daniel Roche, op. cit., p. 520 sq.

20 Voir en particulier, Cormac McCarthy, Outer Dark (1968) et The Road (2006).

21 Cormac McCarthy, L’obscurité du dehors, traduit de l’anglais (États-Unis) par François Hirsch et Patricia Schaeffer, Arles, Actes Sud, Points, 1991, p. 55.

22 Isabelle Rouane-Soupault, art. cit., p. 116.

23 Voir par exemple, Diderot, Madame de La Pommeraye, précédé de Madame de La Carlière, édition de Jacques Vassevière, Paris, Le Livre de Poche, Libretti, 2012. Ce récit a été adapté par Robert Bresson (Les Dames du Bois de Boulogne [1945]) et Emmanuel Mouret (Mademoiselle de Joncquières [2018]).

24 Daniel Roche, op. cit., p. 518.

25 Voir les articles d’Yvan Daniel, de Lila Lamrous, et de Catherine Milkovitch-Rioux et Nathalie Vincent-Munnia dans ce dossier.

26 Voir Daniel Roche, op. cit., p. 522.

27 Voir les articles de Jean Ghidina et de Lila Ibrahim-Lamrous dans ce dossier.

28 Voir l’article de Catherine Morgan-Proux dans ce dossier.

29 Patricia Highsmith, Carol [1952], traduit de l’anglais (États-Unis) par Emmanuelle de Lesseps, Paris, Calmann-Lévy, 2021, p. 248-249.

30 Voir Philippe Antoine, « Ne pas coucher dans son lit. Comment et où dort-on dans le récit de voyage », Sociopoétiques, n° 1, 2016, § 14 sq.[En ligne] DOI : https://dx.doi.org/10.52497/sociopoetiques.644.

31 Voir Judith Obert, « Il deserto dei Tartari de Dino Buzzati : étapes vers l’auberge étoilée », Cahier d’études romanes. Revue du CAER, n° 17, 2007, « Auberges, hôtels et autres lieux d’étapes », p. 197-217 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/etudesromanes.842.

32 Dino Buzzati, Le Désert des Tartares [1949], traduit de l’italien par Michel Arnaud, Paris, Le Livre de poche, 1988, p. 239.

Citer cet article

Référence électronique

Françoise LE BORGNE, « Introduction », Sociopoétiques [En ligne], 7 | 2022, mis en ligne le 31 janvier 2023, consulté le 19 avril 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=1484

Auteur

Françoise LE BORGNE

CELIS, Université Clermont Auvergne

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