Tout conspire

Entretien entre Pierre Senges et Chloé Chaudet

DOI : 10.52497/sociopoetiques.2208

Plan

Texte

Pierre Senges est né en France dans la seconde moitié du xxe siècle, époque « propice aux déchiffrements de toutes sortes1 » selon le narrateur des Fragments de Lichtenberg (2008). Dans cette fiction, « des inspirés », « de jeunes poètes ébranlés par Nietzsche » et même « sept espions réunis par le hasard » se réunissent dans des « cercles clandestins »2 pour tenter de reconstituer l’Œuvre romanesque masquée derrière les milliers d’aphorismes écrits par l’écrivain, philosophe et physicien allemand Georg Christoph Lichtenberg (1742-1799). Ne serait-ce pas là une invitation à peine voilée à reconstituer la Conspiration qui se cacherait derrière l’œuvre d’un écrivain ayant accepté, de manière fort suspecte, de m’accorder un entretien centré sur la notion de complot et sa puissance suggestive ?

Un autre indice, certes bien dissimulé, paraît encore plus troublant. À la fin de sa traduction intégrale du roman graphique Le Plus Mauvais Groupe du monde de José Carlos Fernandes, Dominique Nédellec indique, à la lettre « S » de l’index français : « Senges, Pierre (conspirateur) : f83 ». La planche en question, où apparaissent quatre personnages assez similaires, ne nous en apprend pas beaucoup plus. Mais lorsque Pierre Senges m’a lui-même envoyé une photographie de cette étrange entrée d’index, mes soupçons n’ont fait que se confirmer : d’œuvre en œuvre, ne chercherait-il pas à faire comprendre à ses lecteurs qu’il fomente quelque chose ? Une remarque de Laurent Demanze – qui, comme par hasard, connaît bien Pierre Senges – semble ainsi devoir être légèrement corrigée : plutôt que de considérer que dans les fictions encyclopédiques élaborées par notre auteur, « [l]’écrivain s’avance souvent sous couvert d’imposteur4 », on devrait sans doute davantage envisager les activités de conspirateur auxquelles se livrent Pierre Senges et certains de ses comparses. Car qui sait ce qu’ils nous réservent ?

De fait, l’enquête que j’ai débutée il y a quelque temps m’a bien mise sur la voie de quelque chose. L’intérêt de Pierre Senges pour l’imaginaire du complot est a priori le plus évident dans La Réfutation majeure (2004), qui met en scène la figure historique du chroniqueur espagnol Antonio de Guevara en lui faisant nier l’existence des Amériques et en attribuer l’invention à un « réseau d’hommes secrets5 » au service des Rois Catholiques6. Mais de nombreux signes convergents sont disséminés dans d’autres œuvres de Pierre Senges. Le narrateur au centre de son premier roman (Veuves au maquillage, 2000) ne confie-t-il pas avoir « un certain penchant pour la manipulation7 » ? Et le roman suivant (Ruines-de-Rome, 2002) ne nous expose-t-il pas les manœuvres conspiratoires d’un jardinier amateur qui, en semant « un peu partout graines de plantes et mauvaises herbes », prépare secrètement une « apocalypse végétale »8 ? Cet étrange horticulteur n’est en effet pas si solitaire qu’il y paraît, son « acharnement tenant lieu d’ubiquité et la population entière, par l’assentiment qu’elle exprime muettement, de baron9 ».

Un peu plus tard, Pierre Senges tentera certes de nous égarer, en observant dans l’un de ses essais qu’« [i]diotie et secret se nourrissent l’un l’autre10 ». Mais les allusions troublantes se réitéreront dans ses œuvres suivantes. En écho aux références au secret plus ou moins évidentes qui les ponctuent, son dernier roman, Un long silence interrompu par le cri d’un griffon (2023), ne fait que confirmer les précédents indices. Si le mot « complot » ne figure pas dans l’« encyclopédie du silence » attribuée au personnage de Pavel Pletika, on note que celui-ci « aurait pu [aussi bien] composer, sur d’autres pages roulées chaque soir et cachées dans un tuyau de poêle, une longue Histoire de la dissimulation […]11 ». On apprend en outre que l’écrivain russe au cœur du roman aurait « fréquent[é] des cénacles de révolutionnaires12 », ou encore que selon certaines nécrologies, il aurait été enterré à Moscou « à gauche de Thomas Dorset, espion britannique, et à droite de Simon C. Coburn, autre espion britannique13 ». Pierre Senges invente-t-il ici vraiment un curieux personnage, ou nous propose-t-il en creux un portrait de lui-même en écrivain conspirateur ?

Notre homme semble un peu trop irrévérencieux pour accepter de livrer une réponse ferme. Pour tenter de le piéger (ou du moins d’y voir plus clair), j’ai donc dû user de moyens détournés. Afin de gagner sa confiance en l’invitant à pratiquer l’écriture fragmentaire qui lui est chère, je lui ai demandé de réagir à sa guise à un ensemble de considérations (associations d’idées, connotations, jugements…) communément reliées au terme de complot et à ses manifestations imaginaires. Autrement dit, je l’ai confronté à diverses représentations sociales du complot afin d’observer ses réactions – et ses créations.

Le complot implique un secret

Oui et non (comploteurs et conspirationnistes se placent sous l’égide du « oui et non », façon de restaurer le vieux sic et non d’Abélard en le détournant de son usage, et recycler l’ancien principe de la coïncidence des contraires, si propice à la conspiration). Le secret est bel et bien présent, y compris là où il ne se trouve pas, ne semble pas se tenir, et ne laisse aucune trace ; le soupçon d’un secret vaut en toute circonstance, c’est là sa force, et voilà pourquoi il est si difficile de réfuter un conspirationniste. Il ne nous est pas permis de prouver l’inexistence d’un secret si le secret prospère depuis toujours sur l’axiome : Absence de preuve n’est pas preuve d’absence – ainsi, le secret se glisse partout, comme Dieu selon l’Église chrétienne, comme les esprits vitaux selon Paracelse et comme les neutrinos de la physique moderne. Les meilleurs auteurs ont compris l’importance de dénigrer le secret (ou la culture, le culte, l’idolâtrie du secret) comme un ressort de feuilleton trop facile et vulgaire, ou comme une pensée pauvre : Edgar Poe nous a légué la Lettre volée, devenue un modèle de dissimulation par l’exposition ; un peu plus tard, les conspirateurs de L’Homme qui était Jeudi de Gilbert Keith Chesterton se sont rangés à l’avis de leur chef selon qui il faut « se cacher en ne se cachant pas » (ils renoncent aux vieilles caves pour tenir réunion dans un grand restaurant de Londres). Notons en passant que pour Johannes Huizinga, toute apparence est sujette à caution : le problème n’est pas l’absence ou l’ombre, ou le vide, mais l’entièreté du visible ; toute apparence est une ruse du diable, et de cette apparence, il convient de se méfier.

Le malheur des mortels, c’est ce cercle vicieux de la révélation : chaque secret caché derrière l’apparence, une fois révélé, devient une apparence trompeuse, derrière quoi se cache un autre secret, à dévoiler de toute urgence.

Le secret coïncide avec le rien, il s’y superpose et finit par lui ressembler : des siècles de mimétisme ont permis au secret de prendre l’allure du rien, transparent et insipide comme un verre d’eau sans eau ; ça rend le secret fascinant, un peu vexant aussi dans sa force fascinante (c’est le charme contrariant du secret), et le secret a toujours l’air de s’écouler par le goulot d’un sablier, sans nous donner le temps de le rattraper. Réciproquement, jumeler le secret au rien fait du rien une chose émoustillante – jusqu’alors, le rien n’était rien, l’aboulie de l’après-midi dans une chambre vide où la poussière est déjà retombée depuis longtemps et s’en tient là, à son immobilité fruste ; en l’absence de secret (en l’absence de suspicion), le rien se contient et s’avale lui-même, il n’a rien à dire, inutile de le presser, c’est un rien sans jus, sans promesse, sans malice, et sans non plus l’abyssal quant-à-soi du zéro. Il faut rendre hommage aux conspirationnistes : grâce à eux, le rien semble pouvoir s’émanciper, en tout cas il frémit et promet (c’est la « promesse du rien frémissant »), il en vient à se forger une petite fierté de vide quantique traversé de fluctuations contradictoires et carnavalesques, il se sent capable de concurrencer le rien des pays d’Orient, si riche depuis longtemps d’un tout assez abscons mais bel et bien palpable. Là où il y a le rien, il y a la manigance, il y a les intentions, il y a le devenir et la trace, les indices et les voies de transit ; le rien devient un pédigrée, un tableau de chasse, une pièce à conviction, un piège sournois et complexe impliquant la terre entière, un lieu de bataille, un point de rendez-vous, la cachette surpeuplée, un contenant ou compendium, et sinon une page vierge mais remplie jusqu’à ses marges d’affirmations et de dénégations cinglantes, d’ultimatums et de professions de foi, le tout écrit à l’encre sympathique dans l’attente de sa révélation.

Pour comploter, il faut être plusieurs 

« Je m’appelle légion, car nous sommes plusieurs », c’est la réponse donnée à Jésus-Christ venu en voisin exorciser un pauvre bougre agité de tics : le diable est plusieurs diables, la malfaisance est nombreuse, du moins dans ces cas-là, quand l’intention est mystérieuse et les instances infernales ; dans le corps du malheureux, les démons se bousculent, à l’étroit, comme les colocataires d’une cabine de transatlantique dans un film des Marx Brothers. La malveillance s’incarne parfois dans l’unique : c’est l’unique docteur Mabuse ou le solitaire tyran reclus dans son labyrinthe – mais même Mabuse possède mille yeux dans la version de 1960, il diligente une bonne dizaine d’hommes de main plus ou moins fidèles et plus ou moins habiles. Le comploteur comme plus tard le complotiste venu lire les sillons du comploteur (imaginez l’aiguille d’un gramophone) redoute la solitude, il s’y résigne si elle est irréfutable et si elle circonscrit entièrement le complot, mais il préfère cultiver le fantasme d’une communauté réunie autour d’une bonne cause. Alors, comploteur et complotiste, depuis l’épicentre de leur solitude, convoquent – et s’ils ne parviennent pas à s’entourer de complices, parce que tout le monde n’a pas le charisme de Mabuse, ni sa fortune, ils s’en vont sonner à la porte de quelque club de gentlemen (parfois ce club est un bar à danseuses).

Complot et complotisme se présentent comme l’antidote à une solitude maladive, c’est l’espoir d’une communauté ouverte au célibataire pour y diluer ses tourments ; on ne tarde pas à postuler l’existence d’un cénacle autour d’un seul malfaiteur, puis autour de ce cénacle un second cercle d’initiés, puis un troisième cercle de sociétaires, un quatrième d’agents, et ainsi de suite jusqu’à englober la population dans son ensemble, au risque d’éparpiller le complot dans le monde (l’éparpiller et l’abolir) – c’est le syndrome du Congrès de Jorge Luis Borges : incluant toute chose, il finit par crever d’épanouissement.

Il existe sans doute au moins un complot d’un seul homme, doué de talents multiples, un homme-orchestre autonome capable de déduire, de fomenter, de bricoler et de faire son propre pain dans les situations les plus périlleuses ; il serait le navigateur en solitaire du complot, et le complot disparaîtra à l’heure même de sa mort. (Souvenez-vous de Ladislav Klima : il prétendait être l’unique Dieu et inventer le monde à chaque instant – bien entendu, il avait tort : la preuve, il est mort et nous n’avons pas cessé d’exister ; seulement, d’un certain point de vue, c’est-à-dire le sien, il avait raison : rien ni personne n’est parvenu à démentir Klima de son vivant.)

Complot et projet néfaste vont de pair 

Le complot est assurément néfaste pour le complotiste, il est presque toujours bienfaisant aux yeux du comploteur : les complots par la hache, par le piège à ours, par le poison, par le kompromat, par l’infiltration, par la médisance, par le tunnel, par le parapluie bulgare ou la valise qui fait tic tac s’accomplissent toujours pour le bien de l’humanité : son salut immédiat ou, à défaut, dans une quinzaine de jours ouvrés. Seul, à ma connaissance, le O’Brien de Mil neuf cent quatre-vingt-quatre a parfaitement conscience d’assembler les tenons et les mortaises d’un Enfer pour tous – mais il s’agit moins d’un complot que d’une gouvernance. Pour le complotiste, c’est autre chose, bien sûr, complot égale projet néfaste, il faut admettre cette égalité, elle est chancelante, mais elle convient au complotiste : le complotiste, comme le kabbaliste, comme l’amateur de littérature hermétique, procède par égalités approximatives, il évolue dans un monde de quasi-synonymes, comme on nage au milieu des algues. Charles Albert Cingria a raison de rappeler que toute pensée ésotérique s’élabore « par analogies successives : Vénus = grain de musc = vendredi = myrrhe = colombe » (Umberto Eco, en suivant les mêmes chemins, le même escalier en colimaçon, s’amusait dans Le Pendule de Foucault à passer de saucisse à Platon en cinq étapes : cochon, soie, pinceau, maniérisme, Idées).

À l’origine d’un complot, le souci de bien faire, vite converti en devoir de bien agir : c’est-à-dire étaler le bienfait sur le genre humain avec le tranchant d’un couteau à beurre aiguisé comme un sabre. À l’origine de la théorie du complot, le désir de se lamenter, le catalogue des motifs de se plaindre, la jérémiade bientôt convertie en théorie : il s’agit de faire du malheur privé le résultat d’une vaste et longue machination, une grande roue de la fortune raccordée par ses engrenages à une machine théâtrale baroque façon Torelli, à une guillotine et aux formulaires de l’administration.

L’imaginaire du complot repose sur des récits

Nous vivons des temps troublés, et ce depuis quatre ou cinq millénaires ; parvenus au chapitre moderne ou post-moderne de nos déboires, nous nous demandons si la fiction nous aide ou nous trompe, nous accompagne ou nous berne joliment, nous instruit ou se contente de nous rendre un peu plus niais chaque jour. Dans l’incertitude, on se demande si le salut, au moins provisoire, ne passe pas par une répartition bien nette des tâches : le récit aux conteurs, à tous les autres les faits, les statistiques et les diagnostics de la Salpêtrière. Seulement voilà, distinguer nettement, garder la tête froide, c’est le plus difficile, c’est parfois même impossible : les ministres à la retraite écrivent des romans d’amour, un acteur d’Hollywood devient président des États-Unis, Winston Churchill reçoit le prix Nobel de littérature, Napoléon prend des leçons auprès d’un comédien, Louis xiv danse des ballets et Néron fait le pitre sur scène.

« Qui lit est bien loin de forger de vilaines intrigues » – c’est ce qu’affirme Robert Walser dans l’une de ses petites proses : il s’agissait pour lui de souligner le pacifisme spontané des bibliothèques, celui des bibliophiles ; cependant on est obligé de le contredire, tout aussi pacifiquement : il y a dans la lecture un désir de forger des intrigues, plus ou moins vilaines, ou de les constater, et de les mettre à jour, de les suivre jusqu’à leur terme (on manigance gratuitement, sans conséquence et donc sans culpabilité). Ah, l’intrigue, bonne ou méchante, faste ou néfaste : sans elle on se serait endormi depuis longtemps, elle nous tient en éveil, elle stimule on ne sait comment notre désir d’après, notre désir de suite ; les trames, même minimales, excitent quelque part une glande qui est la glande du désir d’un futur immédiat, celui de la page suivante – pas tout à fait le futur millénariste ni celui des lendemains révolutionnaires, même si millénarisme et lendemains reposent eux aussi sur une extension du récit. Alors, oui, dans ces circonstances, le complot et le complotisme sont structurés comme un récit – et parfois, comme ils sont pressés, comme ils manquent de temps, d’imagination et de talent, comploteurs et complotistes se contentent d’imiter des trames vieilles comme le monde (c’est le sujet du Thème du traître et du héros : une vérité officielle livrée aux journalistes, aux historiens, forgée de toute pièce, à la hâte, en plagiant le Jules César de William Shakespeare). Les récits comploteurs ou complotistes bercent, en raccommodant le passé au futur, la cause à la conséquence, ils offrent des enchaînements rassurants, et la causalité, par des voies étranges, est presque toujours consolatrice – seulement voilà, on assiste aussi à la désagrégation du récit dans le conte, ou la désagrégation du récit dans le fantasme, un peu comme la dilution d’une cuillérée de crème fraîche dans le bouillon du bortsch : à force de se prolonger, le récit du complot s’effiloche, il perd de sa consistance, les contes devenus des racontars diluent l’intrigue dans la parole, ils altèrent la fermeté de l’intrigue, ils la ramollissent dans l’épisodique : au bout d’un moment, le lecteur de fiction constate, mais trop tard, que le récit a cédé la place au mantra.

Le comploteur ou complotiste ne se donne plus la peine de construire un récit bien charpenté, ni vraisemblable, maintenu par une cohérence interne ; il ne se donne plus la peine de respecter les lois de la dramaturgie, inutile selon lui de respecter la règle tchékhovienne selon laquelle si un fusil apparaît à l’acte I, il faudra en faire usage à l’acte III ; il ne se donne plus la peine de refermer les fausses pistes, de boucler les boucles ou de résoudre des énigmes tout juste ébauchées. Le récit à la longue n’a plus la beauté ferme des récits bien forgés, il se rétracte ou s’éternise : au lieu d’une intrigue, le complotiste se satisfait de la répétition de quelques axiomes sans lien les uns avec les autres (ou de quelques mots isolés dépourvus de valeur euristique mais pleins d’une charge magicienne). Notre amour des histoires en feuilletons fabriqués à la chaine par les studios de cinéma et consommés en continu repose sur ce même mécanisme – ou parcourt les chemins d’un même métabolisme : un désir de récit, mais satisfait avec une telle prodigalité et une telle hâte, l’offre dégrade l’intrigue au rang de bavardage, et notre désir, en retour, à force de s’étirer, apprend à se contenter de peu.

Les complots avérés sont souvent banals

C’est bien connu, les complots non avérés sont d’une complexité supérieure, contribuant à leur beauté ; la dissimulation est l’ombre à paupières du complot, aurait pu dire, je ne sais pas, Ramón Gómez de la Serna ; l’indétectabilité est le meilleur gage d’une séduction tordue, finaude, louvoyante, toute la complexité non banale de notre monde se tient sous la surface, ou bien derrière un voile : le jour où le docteur Cottard, dans la Recherche du temps perdu, décide de se dissimuler derrière un vague sourire permanent, comme un masque d’oracle joueur de poker, il cesse d’être un imbécile pour devenir un homme profond (on pourrait en dire autant de l’écrivain raté inventé par Roberto Arlt : il n’écrit plus une ligne mais fait courir partout le bruit d’un roman en cours, et comme personne n’en a lu une seule ligne, son œuvre est une merveille labyrinthique, remplie de tout ce qu’on veut y jeter).

Les complots non existants sont les plus touffus, les plus tordus, opératiques et bigarrés, on dirait la complexité d’un reliquaire rococo combinée avec l’appétit du cabinet de curiosité (le complot devient alors corne de narval + faux manuscrit de Paracelse + bézoard + flûte du Bénin + autre flûte du Mexique + astrolabe + pantoufle de Sarah Bernhardt + carnet d’adresses de Mata Hari). Tant qu’il ne se réalise pas et se tient dans les limbes de l’intention, le complot est une œuvre surprenante, il est inédit de fait et profite d’être inédit au sens propre pour être inédit au sens figuré ; la banalité lui est interdite, non seulement à cause de l’originalité de ses fins (les fins du comploteur ne connaissent pas de précédent), mais aussi à cause de notre appétit de nouveauté (appétit illusoire, mais efficace). À l’heure exquise des préliminaires, le comploteur excommunie toute banalité, l’idée de la banalité ne lui vient même pas à l’esprit, et si elle s’approche, il la chasse comme une menace vulgaire destinée à d’autres ; à l’heure exquise des préliminaires, le comploteur se suppose original, il se sait original, il n’y a à ses yeux qu’un avant peuplé de précurseurs ratés et un après remplis d’imitateurs – et entre les deux, lui seul, l’inouï, faisant irruption et trouant le monde d’une idée neuve.

La réalité est plus morose : les idées véritablement neuves se comptent sur les doigts d’une main, et cette main est celle d’Albert Einstein, peut-être celle de Werner Heisenberg : de fait, nos désirs sont élémentaires, nos volontés aussi, comme nos besoins ; nos indignations sont élémentaires, nos utopies sont élémentaires, nos principes, nos doxas, nos combats, nos convictions profondes et les idéaux de nos révolutions – même nos axiomes sont élémentaires, en plus d’être erronés pour la plupart. Le complot comme projet ou comme théorie n’échappe pas à cette règle de la banalité, il n’aurait aucune raison de le faire, d’ailleurs (au nom de quel privilège ?) ; le complot est un moment de notre intelligence pantouflarde. Selon Vladimir Propp, il existe dans notre univers 31 formes de contes, pas une de plus ; selon Pierre l’Arétin, il existe 16 postures amoureuses (notre seul espoir est d’en trouver 16 autres dans les coffres de l’Inquisition) ; selon les Sutras du Kama composés par Vâtsyâyana, il existe 7 sortes d’unions, 3 sortes de baisers avec une jeune fille, 4 autres baisers de plus, et 4 sortes d’embrassements ; selon Platon il existe 5 polyèdres réguliers, Roger Caillois en déduisait déjà la pauvreté des formes dans le monde animé et inanimé ; et selon Joseph Campbell, il existe une seule forme, une seule, à partir de laquelle tous les mythes se sont construits par de légères variations, parfois dues à l’inadvertance. Dans un univers aussi dépourvu, les hommes ont inventé la loterie : pas pour gagner des sommes folles ni pour se donner l’espoir de les gagner, mais pour multiplier le nombre des combinaisons possibles : elles sont toutes perdantes, ou presque, peu importe, elles promettent l’apparition d’une combinaison inédite, encore jamais advenue, et cela nous console – pour les mêmes raisons, les hommes ont inventé le complot non avéré.

Ceux qu’on nomme complotistes tentent d’expliquer ce qui leur échappe

Au cours d’une de ses Méditations cartésiennes données devant ses étudiants, Mérab Mamardachvili conseille de concentrer ses forces pour parvenir à ne pas comprendre : ne pas comprendre étant la condition d’un raisonnement libre de toute paresse, de toute hâte et peut-être de toute idée reçue. Sous l’égide de Gustave Flaubert, on a appris à associer soif de conclure et bêtise navrante ; on a su voir dans la conclusion, surtout si elle est hâtive, une forme de sottise (parfois inoffensive, parfois assommante, parfois aussi cruelle) ; suivant la leçon de Mamardachvili, on gagnerait à se méfier de la compréhension, ce qui est le contraire d’une pulsion anti-intellectuelle. Oh, ceux qui comprennent, ceux qui ont compris à l’heure où l’on s’étonne encore, ceux qui avaient déjà compris hier, ou l’an dernier, et depuis ne cessent de comprendre en ligne droite au point de se morfondre dans la compréhension (de s’ennuyer d’intelligence) ; ceux qui comprennent aussitôt, et alors s’offusquent aussitôt, ou se réjouissent sur-le-champ, approuvent ou désapprouvent et voient se dessiner sous leurs yeux les lignes claires de la géostratégie – et ces mages, au lendemain d’un événement inopiné, venus nous expliquer combien cet événement était non seulement inévitable mais prévisible. Certes, les complotistes montent à la tribune, à tour de rôle, pour expliquer ; certains d’entre eux, plus casaniers, demeurent chez eux, ils attendent le client dans une posture de prophète pour lui délivrer ses raisonnements, emballés dans du papier aluminium – mais tout autour des complotistes, combien d’individus expliquent ? Tout un chœur d’explicants chante, parfois d’une seule voix, parfois dans une polyphonie injurieuse, et c’est alors l’heure de la polémique ; soit ils sont payés pour, soit ils sont éditorialistes, ou bien ils se montrent à la télévision et ils ne peuvent pas s’y montrer sans rien dire, soit ils convoquent une conférence de presse, soit ils sont critiques d’art et donnent leur avis à ceux qui n’en ont pas.

Le charme des complotistes est ailleurs, ou pour mieux dire, il arrive de surcroît : leur désir d’explication et de maîtrise les conduit presque inévitablement à élaborer des trames de plus en plus complexes – leurs modèles suivent ceux des cosmologies précoperniciennes, et souffrent de ce qu’on pourrait appeler le Syndrome de Ptolémée. Afin de « sauver les apparences » (justifier les mouvements rétrogrades de Mercure, par exemple), les ptoléméens ont dû modifier leur schéma, jusqu’alors symétrique et simple : en plus d’une série de cercles tout autour d’une Terre fixe, tout un attirail d’épicycles, ajoutés ici ou là, au coup par coup : au fil des années, leur système solaire a fini par ressembler à un mécanisme d’horloger conçu par un névropathe. Tôt ou tard, vient le moment où le complotiste cesse d’expliquer ce qui lui échappe pour donner vie à une explication qui lui échappe – elle devient monstrueuse, autonome et ingouvernable, on la compare à la Doomsday machine du docteur Folamour, ou à la tour Eiffel de Sigismund Krzyzanowski, arrachée à son socle et partie se noyer dans un lac d’Italie. Pour justifier sa présence en caleçon dans le lit d’une dame, l’amant des pièces de Feydeau élabore à voix haute une histoire extravagante pleine de merveilles et d’obstacles ; pour justifier un fait d’une grande simplicité, le conspirationniste s’oblige parfois à combiner de force société secrète, arsenal enfoui, espions déguisés, sosies providentiels, poison inodore, fausse barbe, complicités multiples, figurants d’Hollywood, agents infiltrés, double fond, loi du silence et faux documents criants de vérité.

Ceux qui voient des complots partout ont souvent perdu confiance dans les institutions 

Répudier les institutions pour assurer son salut, c’est faire preuve d’une méfiance butée, décidée d’avance, mais c’est aussi compter sur leur puissance – la force sans faille des machines. Au cours d’un phénomène psychologique décortiqué sans doute quelque part dans un livre de Sigmund Freud, celui du Malaise dans la civilisation, ou d’un expert en psychologie des foules, et sinon de Leon Festinger théoricien de la dissonance cognitive, l’amour-confiance dans les institutions (une foi aveugle et infantile combinée à un certain désir de dignité sociale) se retourne en hostilité, comme si l’efficacité des institutions était devenue la preuve de leur malveillance (dans un monde de gangsters bien organisés, la malignité devient le gage de la compétence – l’amour du prochain est un truc d’amateurs).

Il existe une institution dans laquelle le complotiste garde sa confiance, c’est l’institution du complotisme : elle n’a jamais menti, ne mentira jamais, ne trahira jamais, sa fidélité est celle d’un bon chien et d’un moulin à eau centenaire ; l’institution du complotisme rassure, et quand elle ne rassure pas, elle dorlote, elle fait preuve de constance, elle est périodique comme la voute céleste, mais elle sait se plier aux fantasmes du complotiste, en faisant preuve d’une grande souplesse. Quand il le faut, l’institution complotiste exhibe les signes extérieurs de sa souveraineté : si le complotiste se méfie des institutions (égalitaires et peut-être même démocratiques), il voue volontiers un culte à des formes spectrales d’autorité : le chef, comme idée grossière, est son point fixe ; Carlo Emilio Gadda l’a bien montré, une sorte d’amour épique lui est dû, et c’est une libido intarissable. L’usager du complotisme bascule alors vigoureusement au cours de son existence, parfois à plusieurs reprises, d’une posture de méfiance absolue à un état de confiance aveugle : on l’a déjà dit, c’est un sceptique qui ne doute finalement de rien. À y bien regarder, la chair de l’homme sceptique est faite de confiance aveugle, c’est une chair de foi tendre et malléable, et cette foi cherchait depuis longtemps l’objet de son amour – l’usager du complotisme déambule ainsi comme un oxymore vivant : l’incrédule convaincu.

Les fantasmes de complots sont dangereux

Comme le remarque Jean-Luc Nancy, toute conversation (du bistrot à l’amphithéâtre) au sujet du complotisme débute par le rappel de l’existence de complots avérés : cette petite anacrouse est indispensable pour donner l’élan du débat, on s’autorise alors à parler des complotistes sans trop de gêne, un quart de pardon vient de leur être accordé, on leur accorde aussi le dixième d’une pensée raisonnable, et sans aller jusqu’à faire du vrai complot (par exemple, la Conspiration des Poudres) le responsable de tous les complotismes, on prend soin de faire revenir le complotiste dans le giron d’une humanité à peu près raisonnable – quelque chose dans sa folie s’accroche encore à la pensée lucide. On sauve un conspirationniste le jour où son fantasme, par on ne sait quelle combinaison de l’univers, s’avère correspondre trait pour trait à la réalité (c’est le miracle du sonnet de Shakespeare tapé au hasard par un chimpanzé, à qui on donnera une banane, mais aucun droit d’auteur).

Les complotistes sont salutaires (ils pourraient l’être), s’ils fouillent les recoins du monde sans faire de tri et finissent un beau jour par dénicher les ruines ou les vestiges avant-coureurs d’un véritable complot. Voilà pourquoi on les laisse déployer leurs théories, en comptant sur le succès du grand nombre : parmi l’ensemble des fantasmes complotistes, certains tomberont justes, et nous sauveront du désastre – reste alors à écouter les complotistes à travers un rideau de fumée (leur fumée), avec patience, en faisant preuve d’une grande tolérance aux balivernes, en se persuadant de recueillir un jour une pépite de vérité dans un ensemble nébuleux – le Corpus Hermeticum se compose paraît-il de la même façon : l’aiguille du vrai dans la botte de foin de l’élucubration.

Considérer les complotistes comme les chiens truffiers du vrai complot, d’accord – le seul hic, comme disait Hamlet, est ce syndrome du complotiste : mu par un don singulier, un talent tordu, le conspirationniste voit des complots partout où il n’y en a pas et les ignore quand ils se trament, et même quand ils adviennent. On ne sait trop comment expliquer ce phénomène : l’esprit de contrepied, un refus incarné de l’évidence ou, on l’a dit, une attirance particulière pour le rien, le rien riche d’un tas de choses, vaste désert de cachoteries.

Pour créer une bonne fiction, rien de tel qu’un bon complot 

Un complot ou plusieurs, dirait Thomas Pynchon, auteur des romans-fleuves conçus comme des bout à bout de complots, aux couleurs criardes. Vladimir Nabokov aimait rapporter l’histoire de l’enfant qui criait au loup : selon lui, la littérature débute à ce moment-là, quand résonne l’alarme en l’absence de loup ; si le loup survient, c’est autre chose, et nous voilà dans le fait divers. Admettons : la littérature comme mensonge a quelques liens de familiarité avec l’invention du complot, et avec le complotisme sans preuve – cependant, la fiction, la bonne fiction, c’est autre chose, non ?

Le complot se dissimule et se veut imperceptible, la fiction s’exhibe, elle porte un masque, mais ses masques sont exposés, c’est le changement à vue de la fiction, l’exhibition candide de ses costumes ; le complot implique une petite poignée d’élus, la fiction se livre à tous, son offrande est œcuménique, c’est celle des trottoirs, des marchés, des buffets à volonté et des conteurs de rue, même quand le cercle de ses lecteurs se rétrécit autour d’une intrigue complexe ; la fiction ne veut pas rassembler une élite mais, au cas où, une confraternité éparse et d’ailleurs inconsciente, la connivence ne faisant pas partie de ses goûts ; les agents du complot sont décidés, les lecteurs de fiction sont indécis, leur indécision les rend poreux à la lecture ; le complot suit une ligne tracée d’avance, la fiction dessine son plan après coup, ou bien au moment même, d’une minute à l’autre, à coup de gomme à effacer et de mine de plomb ; dans le meilleur des cas, la fiction poursuit une ligne dessinée après coup, le temps de se retourner, elle trébuche en faisant mine de danser, sa ligne de conduite demeure intermittente ; le complot affronte des injustices, la fiction s’en moque, ou en fait le portrait, ou glose au sujet des injustes en jouant des castagnettes ; le complot se préoccupe du pouvoir et du bonheur du genre humain, la bonne fiction doit éviter le pouvoir comme le choléra, elle n’est pas compatible avec la puissance, ni avec la carrière, elle est naïve mais pas au point de vouloir sauver ; elle ne corrige pas les injustices, elle les met en scène, elle ne répare pas non plus, son sens du bricolage se tient en deçà ou au-delà du talent réparateur, c’est soit un pré-bricolage d’inventeur du dimanche, soit l’imposture de l’automate joueur d’échecs, un mannequin dans lequel s’est glissé un compère ; le complot subordonne les moyens à sa fin, la fiction fait le contraire, elle subordonne la fin aux moyens : une histoire est pour elle un prétexte à l’écriture (un prétexte joueur, savant, lâche ou précis, hypocrite ou sincère, mensonger mais avec la complicité du lecteur berné) ; pour le comploteur, la fin justifie les moyens, pour l’auteur de fiction, les moyens justifient la fin, puis ils s’émancipent au point de se justifier eux-mêmes ; le complot vise le succès et redoute l’échec, la fiction confond l’un et l’autre, parfois avec coquetterie ; elle a appris depuis longtemps à retrousser le succès pour en montrer le revers désastreux, et l’échec est pour elle l’occasion d’entreprendre une saga du faux triomphe ; la fiction n’est pas machiavélienne mais adore agiter sur la scène des personnages machiavéliens, certains doués, d’autres plus malhabiles, et d’autres franchement pignoufs (moitié Machiavel, moitié Pantalon) ; le complot repose sur des principes fermes, la fiction repose sur des principes élastiques comme des matelas, ou pas de principes du tout, sauf des règles de composition adoptées au cas par cas, abandonnées la fois suivante. Au dernier acte, le comploteur se livre au juge, et selon son jugement il sait s’il a été un libérateur ou bien un criminel ; la fiction veut échapper aux juges actuels, elle refuse l’héroïsme frelaté du vainqueur comme l’héroïsme pompier du vaincu, et dans tous les cas elle doit laisser les juges pantois. De toute façon, on trouvera difficilement un article de loi la concernant, et si jamais on le trouve, l’article se mettra à vieillir comiquement dans le voisinage de la fiction : il aura bientôt l’air d’une énigme ou d’un oracle bizarrement tourné, il subira l’influence d’une farce écrite en langue de farce et finira par dire le contraire de ce qu’il veut dire.

Pierre Senges
[Propos recueillis par Chloé Chaudet en février 2024]

1 Pierre Senges, Fragments de Lichtenberg, Paris, Verticales-Phase deux, 2008, p. 394.

2 Ibid., p. 51, p. 594, p. 21. – Le nombre de pages séparant ces citations peut certes donner l’impression qu’elles n’ont rien à voir les unes avec

3 Voir José Carlos Fernandes, Le Plus Mauvais Groupe du monde. L’Intégrale [A Pior Banda do Mundo, vol. 1-6, 1998-2007], trad. du portugais par

4 Laurent Demanze, Les Fictions encyclopédiques de Gustave Flaubert à Pierre Senges, Paris, Corti, 2015, p. 225 ; je souligne.

5 Pierre Senges, La Réfutation majeure, Paris, Verticales, 2004, p. 65.

6 Pour une analyse synthétique de cette fiction emblématique, voir notamment Loïse Lelevé, « La “complotite”, ses parodies et ses critiques : de la (

7 Pierre Senges, Veuves au maquillage, Paris, Verticales, 2000, p. 153.

8 Pierre Senges, Ruines-de-Rome, Paris, Le Seuil/Verticales, 2002, 4e de couv.

9 Ibid., p. 108.

10 Pierre Senges, L’Idiot et les Hommes de parole, Paris, Bayard, « Archétypes », 2005, p. 64.

11 Pierre Senges, Un long silence interrompu par le cri d’un griffon, Paris, Verticales, 2023, p. 64. Pour ce qui est de l’étrange répétition de cette

12 Ibid., p. 16.

13 Ibid., p. 10.

Notes

1 Pierre Senges, Fragments de Lichtenberg, Paris, Verticales-Phase deux, 2008, p. 394.

2 Ibid., p. 51, p. 594, p. 21. – Le nombre de pages séparant ces citations peut certes donner l’impression qu’elles n’ont rien à voir les unes avec les autres ; mais ne serait-ce pas là une manière facétieuse de dissimuler leur connexion ?

3 Voir José Carlos Fernandes, Le Plus Mauvais Groupe du monde. L’Intégrale [A Pior Banda do Mundo, vol. 1-6, 1998-2007], trad. du portugais par Dominique Nédellec, Paris, Cambourakis, 2018. – Cette entrée d’index ne se trouve évidemment que dans la traduction de Nédellec : étrange, non ?

4 Laurent Demanze, Les Fictions encyclopédiques de Gustave Flaubert à Pierre Senges, Paris, Corti, 2015, p. 225 ; je souligne.

5 Pierre Senges, La Réfutation majeure, Paris, Verticales, 2004, p. 65.

6 Pour une analyse synthétique de cette fiction emblématique, voir notamment Loïse Lelevé, « La “complotite”, ses parodies et ses critiques : de la (mauvaise) lecture paranoïaque à l’éloge de la fiction », ELFe XX-XXI, « Fictions du complot », n°12, automne 2023 [en ligne] DOI : https://doi.org/10.4000/elfe.5388, § 9-13.

7 Pierre Senges, Veuves au maquillage, Paris, Verticales, 2000, p. 153.

8 Pierre Senges, Ruines-de-Rome, Paris, Le Seuil/Verticales, 2002, 4e de couv.

9 Ibid., p. 108.

10 Pierre Senges, L’Idiot et les Hommes de parole, Paris, Bayard, « Archétypes », 2005, p. 64.

11 Pierre Senges, Un long silence interrompu par le cri d’un griffon, Paris, Verticales, 2023, p. 64. Pour ce qui est de l’étrange répétition de cette page 64 dans deux notes successives se référant à deux romans différents, je me contenterai de citer une remarque de Pierre Senges : « Je note simplement que 64 est le numéro atomique du gadolinium, ainsi nommé d’après Johan Gadolin, chimiste, qui était finlandais, tout comme Kaarlo Tuomi, espion notoire, agent double au service du KGB. Et ça, ça ne peut pas être une coïncidence. »

12 Ibid., p. 16.

13 Ibid., p. 10.

Citer cet article

Référence électronique

Pierre SENGES et Chloé CHAUDET, « Tout conspire », Sociopoétiques [En ligne], 9 | 2024, mis en ligne le 16 novembre 2024, consulté le 21 novembre 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=2208

Auteurs

Pierre SENGES

Chloé CHAUDET

CELIS, Université Clermont Auvergne

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