Antigones migrantes : Interprétations contemporaines de la tragédie face aux enjeux de la migration

DOI : 10.52497/sociopoetiques.2494

Résumés

Cette proposition se concentre sur les réinterprétations contemporaines de la tragédie Antigone, en mettant en lumière leur rapport à la représentation du phénomène migratoire. L’objectif est de déplacer l’attention, non sur l’analyse d’un texte spécifique, mais sur une étude de la figure mythique d’Antigone, actualisée dans la contemporanéité et interprétée comme un symbole de la migration. D’un point de vue sociopoétique, il sera intéressant d’étudier comment, dans ces représentations contemporaines, les mythèmes de la tragédie sont actualisés pour donner voix aux problématiques que les migrant·e·s rencontrent d’abord lors de leur voyage et ensuite dans la société qui les accueille.

This proposal focuses on contemporary reinterpretations of the tragedy Antigone, highlighting their relationship with the representation of the migratory phenomenon. The aim is to study the mythical figure of Antigone, reinterpreted in contemporary contexts and understood as a symbol of migration. From a sociopoetic perspective, it will be interesting to examine how the mythic elements of the tragedy are updated to give voice to migrants and to the challenges they face, first during their journey and then within the host society.

Index

Mots-clés

Antigone, tragédie, adaptations, migration, études postcoloniales

Keywords

Antigone, tragedy, adaptations, migration, post-colonial studies

Plan

Texte

Modifiée et réélaborée d’innombrables fois à travers les siècles, Antigone est devenue une icône universelle de la défense des minorités cherchant à s’affirmer et à défendre leurs droits face aux forces dominantes. Ces dernières années, cette figure mythique a acquis une signification nouvelle : les adaptations contemporaines associent la protagoniste aux réalités migratoires, mettant en lumière d’abord l’expérience vécue des migrant·e·s au cours de leur voyage et, en second lieu, la situation des immigré·e·s de deuxième génération dans les pays d’accueil, en précisant que ce sont, dans les cas analysés, des personnes dont les familles ont fui leur pays d’origine – souvent en raison de conflits, de persécutions ou de conditions socio-économiques précaires – pour chercher refuge en Europe ou en Amérique du Nord.

Les études de Véronique Léonard-Roques1 ont montré que les adaptations des personnages mythologiques fonctionnent souvent comme des avatars d’un archétype initial. La figure mythique d’Antigone se construit à partir de certains mythèmes2 qui sont ensuite réactivés en fonction d’un contexte social déterminé : la situation des migrant·e·s constitue aujourd’hui un cadre permettant au personnage d’Antigone de « réapparaître, de continuer à vivre, de se réécrire et de s’activer3 ».

D’un point de vue sociopoétique, il est pertinent d’examiner comment la représentation des flux migratoires a été intégrée aux réinterprétations de cette figure et comment les auteurs ont recours à la tragédie pour aborder cet événement. Le point central réside dans la signification symbolique des corps des protagonistes tragiques : tout d’abord, le mythème du corps de Polynice laissé sans sépulture est devenu un symbole de la migration, représentant les corps de ceux qui ont perdu la vie au cours de leur voyage pour atteindre une nouvelle terre. Ensuite, le corps rejeté par la polis – qu’il s’agisse de celui d’Antigone enterrée vivante hors de Thèbes, ou de celui de Polynice, considéré comme un ennemi de la patrie – est fréquemment évoqué, car il rappelle la manière dont le pays d’accueil perçoit les immigré·e·s : comme des étrangers perpétuels. De plus, un autre élément fondamental est la lutte d’Antigone contre les lois de l’État, au nom des droits humains et universels, qui incarne le conflit entre les normes sociales imposées par l’autorité et les principes humanitaires qui transcendent les frontières géopolitiques.

Les « lois non écrites, inébranlables, des dieux4 » : des pages de journaux à la scène

D’après les données de l’ONU, en juin 2019, plus de 70 millions de personnes étaient déplacées à travers le monde, un chiffre sans précédent ; parmi elles, depuis janvier 2015 plus d’un million de migrant·e·s sont arrivés en Europe5. Cette crise migratoire s’est accompagnée d’une tragédie humanitaire majeure : selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 30 000 migrant·e·s ont perdu la vie en tentant de traverser la Méditerranée depuis 20146.

Les médias associent fréquemment le mythe d’Antigone aux situations de naufrages ; l’un des exemples les plus frappants de cette analogie est celui de Carola Rackete, capitaine du navire humanitaire Sea Watch 37. Cette jeune officière de marine allemande a franchi le blocus maritime de Lampedusa avec 42 migrant·e·s à bord, défiant l’interdiction d’accoster pour les débarquer en Italie. L’identification entre Carola Rackete et Antigone a émergé à travers une lettre de Roberto Vecchioni8 adressée au directeur du quotidien La Repubblica et publiée en première page le 29 juin 2019 sous le titre « La capitana Antigone ». Dans cet article, le mythe devient une allégorie de la lutte entre l’imposition des lois de l’État, le « contrat social », et une humanité qui réclame justice et compréhension, que l’auteur qualifie d’« humanisme » :

Carola-Antigone non ha dubbi, non ha bilance, su cui pesare il male e il bene, il vero e il falso : lei entrerà in quel porto qualsiasi siano le conseguenze. La dabbenaggine degli uomini è credere che un contratto sociale sia ferro temprato da Dio in persona. Può anche darsi, ma certo l’umanesimo è diamante ; di una luce che stravolge e sconvolge quando senti di averla dentro9.

Giovanna Vitale a également utilisé la tragédie d’Antigone, dans La Repubblica, pour commenter les choix de la présidente du Conseil, Giorgia Meloni, en la comparant à Créon :

Aveva una grande occasione davanti a sé, Giorgia Meloni. Scegliere quale parte recitare, tra Antigone e Creonte, nell’immane tragedia dei migranti. Dinnanzi all’eterno dilemma morale fra legge divina e legge umana […], poteva far prevalere la prima, accogliendo l’appello del sindaco di Crotone a guardare con occhi di madre i cadaveri dei bimbi annegati: l’ultimo recuperato ieri, aveva solo sei anni […]. Ha preferito incarnare l’autorità che tutto decide e poco o nulla concede. […] Eppure sarebbe bastato rileggere Sofocle per scacciare ogni dubbio. Quando Antigone spiega a Creonte perché ha disobbedito, la ragione per cui nessun editto può avere la forza di “trasgredire le leggi non scritte e incrollabili degli dei”, dice qualcosa che la prima premier donna farebbe bene a tenere a mente. Sempre. Non solo davanti ai bambini affogati, ai sopravvissuti rimasti senza più madri né padri, agli uomini e alle donne che si sono privati di tutto pur di dare un futuro ai figli10.

Face à cette catastrophe humanitaire, au-delà des voix des médias, la littérature s’est également souvent mobilisée, rappelant sans cesse la tragédie sophocléenne. Comme l’observe Angela Albanese, les mises en scène théâtrales constituent « una forma di narrazione alternativa rispetto ai discorsi e agli sguardi irregimentati sulla migrazione proposti dai media11 ». En effet, si les médias parlent fréquemment des migrant·e·s, il manque souvent un récit qui adopte leur point de vue, qui leur donne véritablement la parole. C’est précisément ce que font la littérature et le théâtre : en s’immergeant dans ces figures, ils leur redonnent une voix. Alors que les médias les abordent souvent à la troisième personne, la littérature tente d’explorer leurs récits à la première personne, les érigeant en protagonistes.

La princesse thébaine s’impose comme une figure centrale dans les réécritures contemporaines sur la migration en raison de son affrontement avec Créon, qui incarne le conflit entre physis et nomos, entre les ágrapta nómima (les lois non écrites) et l’édit public du souverain. Effectivement, le conflit entre Antigone et Créon repose sur une opposition fondamentale, c’est-à-dire « the conflict between human dignity and the reason of the State12 ». Antigone défend l’idée que la dignité de Polynice doit être préservée, affirmant ainsi son droit à une sépulture en tant qu’individu méritant respect et considération, sous prétexte que « the dignity of an individual cannot be sacrificed in the name and by reason of the State13 ». Cette idée prend encore plus de valeur dans le contexte actuel, où le conflit entre la loi naturelle – fondée sur l’accueil et la dignité humaine – et la loi sociale – souvent dictée par des impératifs politiques ou économiques – est au cœur des enjeux migratoires contemporains.

« J’enterrerai, moi, Polynice et serai fière de mourir en agissant de telle sorte14 » : le corps de Polynice comme métaphore du corps migrant

Dans la perspective contemporaine, le cadavre de Polynice abandonné semble figurer la condition de l’apatride. Effectivement, dans la tradition antique, l’âme de celui qui n’était pas enterré était condamnée à une dérive éternelle, tout comme les exilé·e·s ou les migrant·e·s, arraché·e·s à leur terre natale et contraint·e·s d’errer sans attache. Tous deux sont privés d’un ancrage, d’un lieu où demeurer, et se perdent dans une quête incessante d’appartenance, dans une sorte de stase entre la vie et la mort, comme l’avait déjà souligné Maria Zambrano15 en définissant l’exil comme « ese límite entre la vida y la muerte16 ». Ilaria Drago, dans sa pièce Migrazioni. Antigone non muore, reprend une métaphore similaire, cette fois en parlant de la condition des migrant·e·s :

Non essere vivi, non essere morti : essere in terre di mezzo dove tutto è negato e mai lo si afferra, lo si assapora, mai il succo arriva a lenire ferite e mancanze. Non essere vivi, non essere morti e restare a vagare attoniti, fantasmi, senza peso di presenza e carne17.

Au-delà d’être une métaphore de la migration ou de l’exil, la figure du corps sans sépulture de Polynice se transforme en une métaphore du devoir de mémoire envers les victimes des naufrages qui, jamais récupérés, reposent sans nom ni identité au large des côtes européennes. Est ainsi devenue tristement célèbre ces dernières années la photo de la journaliste turque Nilüfer Demir qui capturait le corps du très jeune Aylan Kurdi, un des nombreux Polynice restés sans sépulture.

Cette question engage une réflexion plus large sur le statut du cadavre en droit et en philosophie. Dès le droit romain, une distinction fondamentale opposait la persona, sujet de droit, à la res, qui en était dépourvue. Le cadavre relevait ainsi de la catégorie des res religiosae, objets consacrés et soumis à un droit divin, mais non reconnus comme des personnes juridiques. Toutefois, la réflexion contemporaine en philosophie du droit s’est progressivement orientée vers la reconnaissance de posthumous rights, suggérant que certaines prérogatives subsistent également après la mort18. Parmi ces droits figurent le ius sepulchri (le droit d’être inhumé) et le ius mortuum inferendi in sepulchrum, (le droit d’inhumer autrui dans un lieu déterminé) ; à cela s’ajoute un droit secondaire de sépulture, qui garantit aux proches la possibilité de visiter la tombe et d’honorer la mémoire du défunt19. Or, ces droits sont systématiquement refusés aux migrant·e·s disparu·e·s en Méditerranée, dont les corps ne sont ni recherchés ni identifiés.

Cette problématique est abordée par de nombreux auteurs et autrices contemporains, parmi lesquels Drago qui affirme : « Vogliamo persi tutti coloro che consideriamo come cose, come esseri viventi di serie b. I mari si riempiono di cadaveri e i fondali urlano20. » Plus loin dans la pièce, un naufrage est mis en scène et, dans la didascalie, on lit : « Si apre una scena gestuale : è l’evocazione di tanti naufragi21 » ; à bord du navire se trouvent Antigone et Polynice, qui symbolisent les migrant·e·s luttant pour survivre face à la mer : « Polinice è tutti i naufraghi, i morti lasciati andare a fondo, quelli che hanno tentato di attraversare il mare in cerca di una vita migliore e non ce l’hanno fatta22. » En même temps, est attaquée la politique qui s’est lavé les mains de la situation : « Mentre di qua, dalla nostra parte sulla costa e nelle città sicure la politica giocava a dadi con la loro vita23 ».

De la même manière, en 2016, l’association théâtrale italienne La Compagnia della Civetta a mis en scène Antigone, un pugno di sabbia24, sous la direction d’Andrea Piazza. Dans cette adaptation, Aminata, une jeune femme originaire d’Afrique, raconte son histoire après avoir échoué sur une plage sicilienne. Le spectacle s’appuie sur les témoignages de véritables rescapés du naufrage du 18 avril 2015, offrant ainsi une réinterprétation de la figure mythique d’Antigone à travers le vécu d’un événement réel.

En 2023, dans Antigone dei barconi, écrit par Andrea de Manincor et mis en scène à Vérone par Solimano Pontarollo25, une transformation hétérodiégétique26 donne à une journaliste libyenne enceinte les traits d’Antigone, tandis qu’Ismène devient une femme mauritanienne voilée ; bien que leurs noms ne soient jamais explicitement mentionnés, l’allusion au mythe est évidente. Ces deux femmes ne sont plus sœurs de sang, mais « sœurs de malheur », unies par un destin commun : fuyant les camps de détention libyens, elles ont payé pour atteindre l’Europe, mais ont été trahies. Leur objectif devient alors de rendre hommage non au corps d’un frère, mais à tous ces « frères d’expérience » avec lesquels elles ont partagé leur voyage.

Une autre adaptation significative est Antigone Power27, écrite par l’autrice italo-somalienne Cristina Ubah Aki Farah et mise en scène en 2018 à Palerme par Giuseppe Massa. Cette production, portée par une troupe mêlant comédiens professionnels et migrant·e·s africain·e·s, s’appuie sur les récits personnels des participant·e·s, retraçant leur traversée de la Méditerranée. Dans cette version, Créon symbolise l’État-nation cherchant à se protéger de « l’envahisseur étranger » : son discours, comme le montre Gaia De Luca, semble directement inspiré de certaines figures politiques, telles que Matteo Salvini, Marine Le Pen, Viktor Orbán ou Donald Trump28.

« Je ne dois pas plus habiter chez les morts que chez les vivants29 » : le corps de l’étranger comme altérité au sein de la polis

Le corps de Polynice est avant tout celui d’un étranger ; dans Antigone, il est laissé à l’abandon hors des murs de la cité, pour avoir quitté Thèbes et s’être allié à Argos30. Drago affirme que « Polinice è considerato uno straniero, un traditore, uno venuto da lontano a rubare, invadere, appestare, infettare31 » ; c’est précisément cette image de « l’ennemi intérieur » qui structure d’autres réécritures contemporaines de la tragédie, explorant la représentation des immigré·e·s de seconde génération dans les pays occidentaux. Polynice incarne le « fratellino senza bandiera32 » dont parle Drago ; il n’est plus un citoyen, mais un « corps autre », irrémédiablement séparé de la polis.

Ce statut d’altérité rapproche Polynice d’Antigone elle-même, qui est enterrée vivante, toujours en dehors des murs de la ville. Adriana Cavarero, dans Corpo in figure, analyse la manière dont le corps est systématiquement exclu de l’ordre civique :

Avendo deciso di andare alla ricerca di un corpo muliebre scacciato dalla polis, nessuna figura tragica mi è parsa più eloquente di quella di Antigone [...] che è appunto ella stessa corpo femminile seppellito vivo dalla città, fuori delle sue mura33.

Si Cavarero insiste sur l’exclusion d’Antigone en tant que femme, cette analyse peut être élargie : Antigone incarne ici l’autre non pas en raison de son genre, mais parce qu’elle est perçue comme une étrangère. Dans la tragédie sophocléenne, la même Antigone souligne son altérité par rapport à la polis en se définissant metoikos : « Ah ! malheureuse, qui ne dois plus compter au nombre des humains ni au nombre des morts, et ne dois pas plus habiter chez les morts que chez les vivants34 ! » En règle générale, le terme metoikia désignait « the sojourn of a long-term alien resident35 ». À Athènes, les métèques bénéficiaient de certains privilèges, mais restaient soumis à des obligations civiques spécifiques et ne jouissaient d’aucun droit citoyen36. Par conséquent, en se définissant comme métèque, Antigone affirme son statut d’étrangère dans la polis37. Ce qui lie Antigone aux figures des migrant·e·s ou des immigré·e·s contemporain·e·s est donc précisément ce sentiment de liminalité : elles sont à la fois séparées de la terre qu’elles ont quittée et étrangères à celle qui les accueille.

Dans l’Antiquité, on observait une opposition nette entre l’idéalisation de la grécité et la figure du barbare, c’est-à-dire l’étranger. Dans les tragédies et les mythes grecs, l’autre était souvent utilisé comme un instrument narratif permettant d’exposer des situations d’horreur politique, sociale ou culturelle, des réalités qui n’auraient pas trouvé leur place au sein de la polis, perçue comme un modèle d’intégrité morale38. Toutefois, dans certaines réécritures de la tragédie, le concept d’altérité est renversé. Ces réélaborations cherchent désormais à intégrer l’autre dans la société et l’étranger devient le protagoniste de la réécriture : Antigone, la princesse thébaine, se transforme ainsi en une jeune immigrée qui lutte pour ses droits dans une société qui peine encore à l’accepter pleinement.

Il est intéressant de réfléchir au paradoxe selon lequel les auteurs contemporains utilisent les mythes grecs, inscrits dans le canon occidental, pour revendiquer leurs droits et se rebeller contre la société occidentale elle-même. À ce propos, Barbara Goff et Michael Simpson développent la notion de Black Aegean, qu’ils définissent comme « the zone of cultural transmission among Africa and the diaspora, ancient Greece, and contemporary Europe39 » ; leur but est d’analyser la manière dont colonisateurs et colonisés mobilisent la littérature classique gréco-romaine afin d’exprimer et de façonner leurs propres représentations. Par les transpositions de tragédies grecques, ce processus met en question l’idéologie dominante, dans une démarche que Goff et Simpson qualifient de speak back :

This "other" speaks back the colonizer’s own culture, since the plays are, in parti, adaptations or transposition of Greek tragedies, already identified by colonial culture with its possessions. […] In the same breath "the other" speaks its own culture within the difference between Greek model and the adaptation40.

Dès lors, ces adaptations, plutôt que de s’inscrire dans une continuité avec les textes originaux, se présentent sous une forme oppositive, fonctionnant comme des contre-réécritures en accord avec le concept de writing back théorisé par Salman Rushdie41. Ces réinterprétations permettent à un nouveau paradigme social et culturel de s’intégrer à la tradition existante, en l’utilisant comme un vecteur de reconnaissance. Dans ce cadre, certaines adaptations contemporaines d’Antigone se concentrent sur la condition des individus après la migration, en particulier sur les générations issues d’un héritage migratoire. Par exemple, dans le roman Home Fire de Kamila Shamshie42 le sentiment d’exclusion ressenti par la communauté immigrée est un thème central, comme on peut le constater dès les premières pages, lors d’un interrogatoire subi par Isma (l’alter ego d’Ismène) à l’aéroport de Heathrow :

– Vous considérez-vous comme britannique ? demanda l’homme.
– Je suis britannique.
– Mais vous considérez-vous comme britannique ?
– J’ai vécu ici toute ma vie.
Elle voulait dire qu’elle n’avait pas d’autre pays, mais sa réponse sonnait évasive43.

Dans le cas de la pièce Akila. Le tissu d’Antigone de Marine Bachelot-Nguyen44, la narration se concentre sur le contexte scolaire, où Akila, symboliquement associée à Antigone, lutte contre le manque d’intégration à travers son choix de porter le voile. L’objectif de l’autrice est d’offrir un regard sur la jeunesse issue de l’immigration, souvent contrainte de faire face au racisme et aux stéréotypes marqués par l’islamophobie. Le film Antigone de Sophie Deraspe45 poursuit le même objectif : Etéocle, le frère de la protagoniste, est tué par la police, probablement en raison de motivations racistes. De même, l’arrestation de Polynice pour résistance à un agent de la force publique soulève des interrogations sur la véritable gravité de son geste et on peut se demander si elle ne résulte pas d’un préjugé racial. Le film transpose ainsi le dilemme classique de la tragédie grecque dans un cadre contemporain, où Antigone se bat non seulement pour la justice sociale, mais aussi contre les discriminations raciales et les injustices systémiques auxquelles les familles d’immigré·e·s sont confrontées.

Si l’on suit l’analyse de Rossana Rossanda, selon laquelle « certo è che ad alcune tragedie si ritorna ma altre, come Antigone, sembrano tornare. Non per essere scavate e rivelare nuovi sensi, ma come allusive, rivissute46 », on peut affirmer que la tragédie d’Antigone fait retour sous une forme profondément transformée. Réinterprétée à travers la question sociale de la migration, elle subit une métamorphose qui déconstruit les mythèmes antiques pour les remodeler. Antigone devient, donc, un symbole de la résistance face aux lois étatiques, porte-parole des droits fondamentaux des migrant·e·s.

1 Pour la définition de « figure mythique », voir Véronique Léonard-Roques (dir.), Figures mythiques. Fabrique et métamorphoses, Clermont-Ferrand

2 Pour la définition de « mythèmes », voir Gilbert Durand, Figures mythiques et visages de l’œuvre. De la mythocritique à la mythanalyse, Paris, Berg

3 Alain Montandon, « Sociopoétique », Sociopoétiques no 1, 2016, [En ligne] DOI : https://dx.doi.org/10.52497/sociopoetiques.640 [consulté le 21/12/

4 Sophocle, Antigone, traduit en français par Paul Mazon, Paris, Les Belles Lettres, 2021, v. 455.

5 Voir Jennifer Ballengee, « Phantom Work. Refugees, Antigone, Comparative Literature » in Trauma and Literature in an Age of Globalization, Jennifer

6 Les données sont disponibles sur le site de l’OIM dans les pages consacrées aux personnes disparues : https://missingmigrants.iom.int/region/

7 Une telle assimilation n’a pas manqué de susciter des polémiques en Italie, aussi bien dans le milieu politique que parmi les chercheurs et

8 Roberto Vecchioni est un professeur italien, également connu en tant qu’auteur-compositeur-interprète.

9 Roberto Vecchioni, « La capitana Antigone », La Repubblica, 2019 : « Carola-Antigone n’a aucun doute, elle n’a pas de balances sur lesquelles peser

10 Giovanna Vitale, « Meloni dimentica Antigone », La Repubblica, 2023 : « Elle avait une grande occasion devant elle, Giorgia Meloni. Choisir quel

11 Angela Albanese, « Storie migranti a teatro. Gabriele Vacis e le patriche teatrali per la cura della persona », Scritture Migranti, n17, 2023, p.

12 Francesco Lo Piccolo, « In the name of Antigone: Migrants and Human Rights in Contemporary Urban Spaces » in Values, Cities and Migrations. Real

13 Ibid. : « la dignité de l’individu ne peut être sacrifiée au nom de l’État ni pour la raison d’État » (Je traduis).

14 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 71-72.

15 Pour Zambrano, l’exil est une condition semblable à une non-vie qui emprisonne les exilé·e·s dans cet état de limbe, la même situation qui a forcé

16 María Zambrano, « Carta sobre el exilio », in La Razón en la sombra (Antología del pensamiento de María Zambrano), Jesús Moreno Sanz (ed.)

17 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, Rome, Nemapress, 2019, p. 22 : « Ne pas être vivant, ne pas être mort : être dans des terres

18 Pour approfondir voir Heather Conway, The Law and the Dead, Londres, Routledge, 2016.

19 Voir Cecilia Siccardi, « I migranti scomparsi nel mediterraneo : problematiche costituzionali », Gruppo di Pisa. La Rivista, no1, 2019, p. 75-90 [

20 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, op. cit., p. 13 : « Et nous voulons perdre tous ceux que nous considérons comme des choses, comme des

21 Ibid., p. 33 : « Une scène gestuelle s’ouvre : c’est l’évocation de nombreux naufrages. » (Je traduis).

22 Ibid. : « Polynice est tous les naufragés, les morts laissés au fond, ceux qui ont tenté de traverser la mer à la recherche d’une vie meilleure et

23 Ibid. : « Pendant ce temps, ici, de notre côté, sur la côte et dans les villes sûres, la politique jouait aux dés avec leur vie. » (Je traduis).

24 Voir Gherardo Ugolini, « Antigone dei Barconi », Visioni del tragico [En ligne] URL : https://www.visionideltragico.it/blog/contributi/antigone-dei

25 Ibid.

26 Voir Gérard Genette, Palimpstes. La littérature au second degré , Paris, Seuil, « Poétique », 1982.

27 Vidéo teaser de la pièce sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=PV_eZPCbiIs

28 Gaia de Luca, « Antigone Power: una straniera alle frontiere dell’Europa », II Tolomeo, no24, 2022, p. 242 [En ligne] DOI : http://doi.org/10.30687

29 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 852.

30 Ce récit est raconté dans Les Sept contre Thèbes d’Eschyle.

31 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, op. cit, p. 18 : « Polynice est considéré comme un étranger, un traître, venu de loin pour voler

32 Ibid., p. 26 : « petit frère sans drapeau » (Je traduis).

33 Adriana Cavarero, Corpo in figure. Filosofia e politica della corporeità, Rome, Castelvecchi, 2024, p. 12 : « Ayant décidé d’aller à la recherche d

34 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 850-852. Dans la note on lit : « Antigone est semblable à une métèque puisqu’elle ne doit plus compter au nombre

35 Jutta Gsoels-Lorensen, « Antigone, déportée », Arethus, vol. 47, no2, 2014, p. 123 [En ligne] URL : https://www.jstor.org/stable/26322598 : « le

36 Pour approfondir, voir Demetra Fannie Kasimis, Drawing the Boundaries of Democracy: Immigrants and Citizens in Ancient Greek Thought, PhD diss.

37 Il faut rappeler qu’Antigone fut également une exilée volontaire, ayant accompagné son père Œdipe dans la tragédie Œdipe à Colone de Sophocle.

38 À ce propos, il serait intéressant de réfléchir à la figure de Médée.

39 Barbara Goff, Micheal Simpson, Crossroads in the Black Aegan. Oedipus, Antigone, and Dramas of the African Diaspora, Oxford, Oxford University

40 Ibid., p. 45 : « Cet autre répond à la culture du colonisateur en lui retournant sa propre culture, puisque ces pièces sont en partie des

41 Voir Maria Chiara Gnocchi, « Géométrie, géographie, géopolitique de la réécriture », InterArtes, no 1, p. 20, 2021 [En ligne] URL : https://cris.

42 Écrivaine et journaliste née au Pakistan, qui partage aujourd’hui sa vie entre Londres et Karachi. Cette double appartenance culturelle transparaît

43 Le roman a été traduit et publié en France sous le titre Embrasements ; Kamila Shamsie, Embrasements, traduction française d’Éric Auzoux, Arles

44 Marine Bachelot Nguyen, Akila. Le Tissu d’Antigone, Manage, Lansman Éditeur, 2020.

45 Sophie Deraspe, Antigone, Canada, Association Coopérative des Productions audiovisuelles (ACPAV), 2019.

46 Rossana Rossanda, « Antigone ricorrente », in Antigone, Sofocle trad. it. Luisa Biondetti, 1987, p. 12 : « à certaines tragédies on revient, mais d

Notes

1 Pour la définition de « figure mythique », voir Véronique Léonard-Roques (dir.), Figures mythiques. Fabrique et métamorphoses, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, « Littératures », 2008.

2 Pour la définition de « mythèmes », voir Gilbert Durand, Figures mythiques et visages de l’œuvre. De la mythocritique à la mythanalyse, Paris, Berg International, 1979.

3 Alain Montandon, « Sociopoétique », Sociopoétiques no 1, 2016, [En ligne] DOI : https://dx.doi.org/10.52497/sociopoetiques.640 [consulté le 21/12/2024].

4 Sophocle, Antigone, traduit en français par Paul Mazon, Paris, Les Belles Lettres, 2021, v. 455.

5 Voir Jennifer Ballengee, « Phantom Work. Refugees, Antigone, Comparative Literature » in Trauma and Literature in an Age of Globalization, Jennifer Ballengee, David Kelman (dir.), New York, Routledge, 2021, p. 217-219.

6 Les données sont disponibles sur le site de l’OIM dans les pages consacrées aux personnes disparues : https://missingmigrants.iom.int/region/mediterrean [consulté le 31/01/2025].

7 Une telle assimilation n’a pas manqué de susciter des polémiques en Italie, aussi bien dans le milieu politique que parmi les chercheurs et chercheuses, qui se sont interrogé·e·s sur la pertinence réelle de ce parallèle. Pour un approfondissement, voir Elena Porciani, « Antigone nell’epoca dell’infotainment. Dalla tragedia sofoclea al melodramma mediatico » in Antigone: Usi e abusi di un mito dal V secolo a.C. alla contemporaneità, Sotera Fornaro, Raffaella Viccei (dir.), Bari, Edizioni di Pagina, 2021, p. 261-280.

8 Roberto Vecchioni est un professeur italien, également connu en tant qu’auteur-compositeur-interprète.

9 Roberto Vecchioni, « La capitana Antigone », La Repubblica, 2019 : « Carola-Antigone n’a aucun doute, elle n’a pas de balances sur lesquelles peser le mal et le bien, le vrai et le faux : elle entrera dans ce port quelles que soient les conséquences. La naïveté des hommes est de croire qu’un contrat social soit du fer trempé par Dieu en personne. Cela peut être, mais l’humanisme est certainement un diamant ; d’une lumière qui bouleverse et perturbe quand on sent qu’on l’a en soi. » (Je traduis).

10 Giovanna Vitale, « Meloni dimentica Antigone », La Repubblica, 2023 : « Elle avait une grande occasion devant elle, Giorgia Meloni. Choisir quel rôle jouer, entre Antigone et Créon, dans la tragédie immense des migrant·e·s. Face au dilemme moral éternel entre loi divine et loi humaine […], elle pouvait faire prévaloir la première, en répondant à l’appel du maire de Crotone, en regardant avec des yeux de mère les cadavres des enfants noyés : le dernier retrouvé hier n’avait que six ans […]. Elle a préféré incarner l’autorité qui décide de tout et accorde peu ou rien. […] Pourtant, il aurait suffi de relire Sophocle pour dissiper tout doute. Lorsque Antigone explique à Créon pourquoi elle a désobéi, la raison pour laquelle aucun édit ne peut avoir la force de “transgresser les lois non écrites et inaltérables des dieux”, elle dit quelque chose que la première femme Premier ministre ferait bien de garder à l’esprit. Toujours. Non seulement face aux enfants noyés, aux survivants qui ont perdu leurs mères et leurs pères, aux hommes et aux femmes qui se sont privés de tout pour offrir un avenir à leurs enfants. » (Je traduis).

11 Angela Albanese, « Storie migranti a teatro. Gabriele Vacis e le patriche teatrali per la cura della persona », Scritture Migranti, n17, 2023, p. 75 [En ligne] DOI : https://doi.org/10.6092/issn.2035-7141/18982  : « une forme de narration alternative par rapport aux discours et aux regards institutionnalisés sur la migration véhiculés par les médias » (Je traduis).

12 Francesco Lo Piccolo, « In the name of Antigone: Migrants and Human Rights in Contemporary Urban Spaces » in Values, Cities and Migrations. Real Estate Market and Social System in a Multicultural City, Grazia Napoli, Giulio Mondini, Alessandro Oppio, Paolo Rosato, Simona Barbaro (dir.), Berlin, Springer, 2023, p. 20: « l’opposition entre la dignité humaine et la raison d’État » (Je traduis).

13 Ibid. : « la dignité de l’individu ne peut être sacrifiée au nom de l’État ni pour la raison d’État » (Je traduis).

14 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 71-72.

15 Pour Zambrano, l’exil est une condition semblable à une non-vie qui emprisonne les exilé·e·s dans cet état de limbe, la même situation qui a forcé Antigone à être « enterrada viva », comme elle le raconte elle-même dans La Tumba de Antígona.

16 María Zambrano, « Carta sobre el exilio », in La Razón en la sombra (Antología del pensamiento de María Zambrano), Jesús Moreno Sanz (ed.), Madrid, Siruela, 1993, p. 388.

17 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, Rome, Nemapress, 2019, p. 22 : « Ne pas être vivant, ne pas être mort : être dans des terres intermédiaires où tout est nié et jamais on ne l’atteint, on ne le goûte, jamais le suc n’arrive à apaiser les blessures et les manques. Ne pas être vivant, ne pas être mort et rester à errer, stupéfaits, comme des fantômes, sans poids de présence. » (Je traduis).

18 Pour approfondir voir Heather Conway, The Law and the Dead, Londres, Routledge, 2016.

19 Voir Cecilia Siccardi, « I migranti scomparsi nel mediterraneo : problematiche costituzionali », Gruppo di Pisa. La Rivista, no1, 2019, p. 75-90 [En ligne] URL : https://www.gruppodipisa.it/8-rivista/330-cecilia-siccardi-i-migranti-scomparsi-nel-mediterraneo-problematiche-costituzionali et Mauro Tescaro, « La tutela postmortale della personalità morale e specialmente dell’identità personale », Jus Civile, no10, 2014, p. 316-347.

20 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, op. cit., p. 13 : « Et nous voulons perdre tous ceux que nous considérons comme des choses, comme des êtres vivants de seconde classe. Les mers se remplissent de cadavres et les fonds marins crient. » (Je traduis).

21 Ibid., p. 33 : « Une scène gestuelle s’ouvre : c’est l’évocation de nombreux naufrages. » (Je traduis).

22 Ibid. : « Polynice est tous les naufragés, les morts laissés au fond, ceux qui ont tenté de traverser la mer à la recherche d’une vie meilleure et qui n’y sont pas parvenus. » (Je traduis).

23 Ibid. : « Pendant ce temps, ici, de notre côté, sur la côte et dans les villes sûres, la politique jouait aux dés avec leur vie. » (Je traduis).

24 Voir Gherardo Ugolini, « Antigone dei Barconi », Visioni del tragico [En ligne] URL : https://www.visionideltragico.it/blog/contributi/antigone-dei-barconi-tragedia-greca-e-tragedia-dell-immigrazione [consulté le 27/12/2024].

25 Ibid.

26 Voir Gérard Genette, Palimpstes. La littérature au second degré , Paris, Seuil, « Poétique », 1982.

27 Vidéo teaser de la pièce sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=PV_eZPCbiIs

28 Gaia de Luca, « Antigone Power: una straniera alle frontiere dell’Europa », II Tolomeo, no24, 2022, p. 242 [En ligne] DOI : http://doi.org/10.30687/Tol/2499-5975/2022/01/021.

29 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 852.

30 Ce récit est raconté dans Les Sept contre Thèbes d’Eschyle.

31 Ilaria Drago, Migrazioni. Antigone non muore, op. cit, p. 18 : « Polynice est considéré comme un étranger, un traître, venu de loin pour voler, envahir, contaminer, infecter. » (Je traduis).

32 Ibid., p. 26 : « petit frère sans drapeau » (Je traduis).

33 Adriana Cavarero, Corpo in figure. Filosofia e politica della corporeità, Rome, Castelvecchi, 2024, p. 12 : « Ayant décidé d’aller à la recherche d’un corps féminin chassé de la polis, aucune figure tragique ne m’a semblé plus éloquente qu’Antigone […] qui est précisément elle-même un corps féminin enseveli vivant par la ville, hors de ses murs. » (Je traduis).

34 Sophocle, Antigone, op. cit., v. 850-852. Dans la note on lit : « Antigone est semblable à une métèque puisqu’elle ne doit plus compter au nombre des vivants ni à celui des morts. »

35 Jutta Gsoels-Lorensen, « Antigone, déportée », Arethus, vol. 47, no2, 2014, p. 123 [En ligne] URL : https://www.jstor.org/stable/26322598 : « le séjour d’un résident étranger de longue durée » (Je traduis).

36 Pour approfondir, voir Demetra Fannie Kasimis, Drawing the Boundaries of Democracy: Immigrants and Citizens in Ancient Greek Thought, PhD diss., Northwestern University, 2010, p. 32-33.

37 Il faut rappeler qu’Antigone fut également une exilée volontaire, ayant accompagné son père Œdipe dans la tragédie Œdipe à Colone de Sophocle.

38 À ce propos, il serait intéressant de réfléchir à la figure de Médée.

39 Barbara Goff, Micheal Simpson, Crossroads in the Black Aegan. Oedipus, Antigone, and Dramas of the African Diaspora, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 39 : « la zone de transmission culturelle entre l’Afrique et sa diaspora, la Grèce antique et l’Europe contemporaine » (Je traduis).

40 Ibid., p. 45 : « Cet autre répond à la culture du colonisateur en lui retournant sa propre culture, puisque ces pièces sont en partie des adaptations ou des transpositions de tragédies grecques, elles-mêmes déjà associées par la culture coloniale à ses possessions. […] Dans le même temps, l’autre inscrit sa propre culture dans l’écart entre le modèle grec et son adaptation. » (Je traduis).

41 Voir Maria Chiara Gnocchi, « Géométrie, géographie, géopolitique de la réécriture », InterArtes, no 1, p. 20, 2021 [En ligne] URL : https://cris.unibo.it/handle/11585/853406.

42 Écrivaine et journaliste née au Pakistan, qui partage aujourd’hui sa vie entre Londres et Karachi. Cette double appartenance culturelle transparaît dans ses romans, souvent situés à la croisée de l’Angleterre et du Pakistan. Ce dualisme lui permet d’explorer des thématiques liées à l’identité, à la diaspora et aux relations entre différentes cultures.

43 Le roman a été traduit et publié en France sous le titre Embrasements ; Kamila Shamsie, Embrasements, traduction française d’Éric Auzoux, Arles, Actes Sud, 2019, p. 8-9.

44 Marine Bachelot Nguyen, Akila. Le Tissu d’Antigone, Manage, Lansman Éditeur, 2020.

45 Sophie Deraspe, Antigone, Canada, Association Coopérative des Productions audiovisuelles (ACPAV), 2019.

46 Rossana Rossanda, « Antigone ricorrente », in Antigone, Sofocle trad. it. Luisa Biondetti, 1987, p. 12 : « à certaines tragédies on revient, mais d’autres, comme Antigone, semblent revenir non pour être explorées et révéler de nouveaux sens, mais comme allusives, revécues » (Je traduis).

Citer cet article

Référence électronique

Chiara PROTANI, « Antigones migrantes : Interprétations contemporaines de la tragédie face aux enjeux de la migration », Sociopoétiques [En ligne], 10 | 2025, mis en ligne le 12 novembre 2025, consulté le 17 décembre 2025. URL : http://revues-msh.uca.fr/sociopoetiques/index.php?id=2494

Auteur

Chiara PROTANI

CELIS, Université Clermont-Auvergne
Alma Mater Studiorum, Università di Bologna

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